CONJONCTURE. Pour la première fois depuis la crise sanitaire, le volume d'activité de l'artisanat du bâtiment a perdu 3% au 2e trimestre 2024. Si tous les segments sont impactés, la construction neuve est évidemment la plus touchée. L'entretien-amélioration est également en berne.

Le basculement de l'activité du bâtiment semble se confirmer pour 2024. Dans sa note de conjoncture du 2e trimestre, la Capeb (Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment) confirme que le volume de chantiers des entreprises artisanales est en recul sur l'ensemble des segments. Pour la première fois depuis la crise sanitaire, l'activité globale a perdu 3% entre avril et juin sur un an, après avoir déjà cédé 1,5% au 1er trimestre.

 

 

La maçonnerie en difficulté

 

Une mauvaise dynamique qui s'observe sur l'ensemble du territoire national : l'Île-de-France signe la moins mauvaise performance avec "seulement" -1,5%, tandis que la Nouvelle-Aquitaine subit une baisse de 4,5%. Tous les corps de métiers sont également impactés, avec des évolutions comprises entre -2% et -4%. "Les entreprises de maçonnerie présentent la tendance la plus dégradée pour le 5e trimestre consécutif, en raison de leur plus forte présence en construction neuve", relève la note de conjoncture de la Capeb.

 

Le neuf continue effectivement son plongeon : -6,5% pour les artisans du bâtiment spécialisés dans cette activité entre le 2e trimestre 2023 et la même période un an plus tard. En cause : la dégringolade des permis de construire et des mises en chantier, surtout dans la catégorie des logements individuels purs. En cumul de juin 2023 à mai 2024, ils chutent respectivement de 15,5% et de 21,5% en comparaison au cumul des 12 mois précédents.

 

Les carnets de commandes résistent

 

Jusqu'alors considéré comme une bouée de sauvetage, l'entretien-amélioration ne parvient plus à remplir ce rôle. Il se rétracte de 1% au 2e trimestre de cette année et la situation ne devrait pas s'améliorer dans les prochains mois : les ventes de logements anciens cumulées sur un an, perçues comme un indicateur fiable de ce segment de travaux, ont atteint un plus bas depuis 2016, et sont aussi inférieures de 22% par rapport à leur niveau d'avril 2023.

 

Moteurs de la croissance de l'artisanat du bâtiment en 2022 comme en 2023, les chantiers d'amélioration de la performance énergétique des logements enregistrent, pour la première fois depuis le Covid, une diminution de 0,5%. Les entreprises ont malgré tout encore de la visibilité. Leurs carnets de commandes représentaient 72 jours de travail en moyenne à fin juin, soit 2 jours de moins qu'au 1er trimestre 2024 et 7 jours de moins qu'au 2e trimestre 2023. Mais l'opinion des chefs d'entreprises sur leur évolution est constamment mauvaise depuis la fin 2022, surtout dans la construction neuve (-20 points), moins dans l'amélioration-entretien (-8 points).

 

Plus de 6.000 postes détruits entre janvier et mars

 

En y ajoutant la multiplication des tensions de trésoreries et la progression des faillites, le contexte est évidemment morose pour les professionnels de la filière. Début juillet, la Capeb indique qu'environ 25% des entreprises artisanales ont fait part de difficultés financières, d'un montant moyen de 29.000 €. Le secteur de la construction a vu ses défaillances d'entreprises bondir de plus d'un quart en comparaison à leur niveau d'avant-Covid.

 

Cela a logiquement une incidence sur l'emploi : entre janvier et mars, les artisans du bâtiment auraient ainsi détruit 6.600 postes, et cette tendance devrait malheureusement se poursuivre. "Pour la première fois depuis 2015, la part d'entreprises artisanales du bâtiment qui envisagent des licenciements (ou non renouvellements) dépasse la part d'entreprises envisageant des recrutements, respectivement 10% et 8%", souligne la confédération.

 

Brouillard politique

 

 

Qui se rassure tout de même avec plusieurs signes encourageants, tels que la baisse des taux moyens des crédits à l'habitat observée depuis janvier, le retour à une inflation sous le seuil des 3% sur un an, ou encore la première baisse des taux directeurs de la Banque centrale européenne (BCE) actée en juin. "L'amélioration des conditions de financement serait un facteur positif pour l'immobilier, et par extension pour la demande de travaux", analyse la Capeb.

 

Reste aussi à voir ce qui ressortira de la nomination de Michel Barnier au poste de Premier ministre, et de la capacité de son futur gouvernement à faire passer des textes de lois dans une Assemblée nationale divisée comme jamais. Pas sûr donc qu'un éventuel redressement de l'activité du bâtiment se fasse sentir dès 2025.

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