ENTREPRENEURIAT. Le projet de loi en faveur de l'activité professionnelle indépendante a été définitivement et unanimement adopté par les parlementaires. Une partie du patronat s'est félicitée de ce qui est perçu comme une "avancée significative". Retour sur les principales mesures du texte.
La dernière étape a été franchie : ce 8 février, Assemblée nationale et Sénat ont définitivement et unanimement adopté le projet de loi en faveur de l'activité professionnelle indépendante. Voulu par Emmanuel Macron, élaboré dans un premier temps par l'ancien président de l'U2P (Union des entreprises de proximité) Alain Griset arrivé à Bercy, avant d'être repris par son successeur au ministère des petites et moyennes entreprises, Jean-Baptiste Lemoyne, ce texte se veut la "pierre angulaire du plan indépendants" porté par le président de la République. Celui-ci avait présenté les grandes lignes du projet de loi lors du dernier congrès de l'organisation patronale, en insistant sur le fait qu'il souhaitait "créer un environnement juridique, fiscal et social plus simple et protecteur pour les indépendants".
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Des mesures fiscales et sociales en faveur des entrepreneurs avaient déjà été adoptées dans le cadre des projets de lois de Finances et de financement de la Sécurité sociale pour l'exercice 2022, mais le texte apporte son lot de dispositions nouvelles et spécifiques. À l'issue d'une commission mixte paritaire qui s'est révélée "conclusive", députés et sénateurs ont également apporté leur pierre à l'édifice.
Protection du patrimoine personnel
Parmi les principales mesures du projet de loi, sont ainsi consacrées la création d'un statut unique pour l'entrepreneur individuel et la suppression, dans le même temps, du statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL). À travers cette mesure, c'est en fait l'ensemble du patrimoine personnel du travailleur indépendant qui sera dorénavant protégé : "il devient par défaut insaisissable par les créanciers professionnels, sauf si l'entrepreneur en décide autrement", confirme Bercy. Ce qui signifie donc que seuls les "éléments utiles" à l'activité professionnelle pourront être saisis dans le cas d'une défaillance d'entreprise.
Les indépendants auront en outre la possibilité de faire évoluer "plus aisément" leur activité en faisant passer le statut de leur structure d'entreprise individuelle à société. Les conditions d'accès à l'Allocation travailleurs indépendants (ATI) vont également être assouplies, permettant désormais aux professionnels dont l'activité sera jugée non-viable - c'est-à-dire ceux dont les revenus chuteront d'au moins 30% - d'en bénéficier pour mieux rebondir. Le montant forfaitaire de l'allocation sera fixé à 800 €. Enfin, le traitement des dettes de cotisations et contributions sociales des gérants majoritaires de SARL (sociétés à responsabilité limitée) sera facilité en cas de défaillance, en rendant concrètement possible "leur effacement dans le cadre d'une procédure de surendettement des particuliers", précise le ministère de l'Économie.
Quelle réaction des banques ?
Les réactions des organisations représentatives sont toutefois partagées après cet ultime feu vert au projet de loi. L'U2P, justement, salue une "avancée significative" en faveur de l'entrepreneuriat, en soulignant l'extension de la protection du patrimoine des travailleurs indépendants. En revanche, l'organisation qui compte notamment parmi ses adhérents la Capeb (Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment) appelle à "pérenniser" la facilitation des cessions d'entreprises par le biais d'exonérations de taxation des plus-values, et donc de ne pas "la limiter à l'exercice 2022".
Mais si elle se félicite d'une protection accrue du patrimoine, l'U2P met toutefois en garde sur le comportement des établissements bancaires : "La saisie du véhicule familial ou d'avoirs bancaires personnels ne sera donc plus possible. Des saisies qui ont souvent généré de graves difficultés matérielles, non sans impact sur la vie privée", indique-t-elle dans un communiqué. "Pour autant les banques, rendues frileuses par le manque de garanties offertes par les travailleurs indépendants du fait de cette nouvelle protection, pourraient être tentées de refuser de leur accorder des prêts." Partant de cette crainte, l'organisation demande au Gouvernement de "[préparer] un accord de place avec la Fédération bancaire française afin d'officialiser l'engagement des banques à respecter l'esprit de la réforme et à accompagner le développement des entreprises". Une autre proposition consisterait à se rapprocher de la société de cautionnement Siagi dans l'optique de renforcer l'accompagnement des travailleurs indépendants dans le secteur de l'artisanat.
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"Une forme de concurrence déloyale envers [les] artisans"
À l'inverse, le son de cloche est différent du côté de la Fédération française du bâtiment (FFB) : dans une récente interview donnée à Batiactu, son président Olivier Salleron a certes reconnu la "légalité" du texte mais s'inquiète du risque d'accorder une trop grande place aux micro-entrepreneurs. Selon lui, cette situation pourrait déboucher sur "une forme de concurrence déloyale envers [les] artisans" du bâtiment. Ce qui amène la FFB à proposer, dans l'optique de l'élection présidentielle, de limiter à 2 ans le statut de micro-entrepreneur dans la filière. Une idée "qui fait l'unanimité côté patronal", assure Olivier Salleron.