POLITIQUE. Le projet de loi d'urgence pouvant permettre une reconstruction rapide de Mayotte a été adopté en commission à l'Assemblée nationale. Mais de nombreuses voix critiques se sont élevées, affirmant que les élus locaux n'avaient pas été consultés pour l'écriture de ce texte.
Première étape pour le projet de loi d'urgence pour la reconstruction de Mayotte. Le premier acte législatif du gouvernement du Premier ministre François Bayrou a été adopté en commission à l'Assemblée nationale dans la nuit de mardi 14 janvier à mercredi 15 janvier 2025.
Le texte a pour objectif d'accélérer les règles et les procédures en matière d'urbanisme afin de permettre la reconstruction rapide de l'archipel français dévasté par le cyclone Chido le 14 décembre 2024. Au moins 39 habitants de ce territoire ultramarin situé dans l'océan Indien avaient péri. Les bâtiments et infrastructures ont également été fortement endommagés. Le seul hôpital a été partiellement détruit, tout comme 80% des écoles.
"Nous cherchons une réelle ambition" dans ce texte
Le projet de loi d'urgence n'est qu'une "première réponse" à la crise multiforme qui frappe Mayotte, a affirmé le ministre des Outre-mer Manuel Valls, au cours des débats entamés le 13 janvier après-midi. Mais le texte a été fortement critiqué par l'opposition, qui le juge insuffisant.
"Nous cherchons en vain, dans ce projet de loi, une réelle ambition ou même la traduction législative du plan "Mayotte debout" [de François Bayrou, présenté le 30 décembre dernier]", a attaqué la rapporteure du texte, la députée de Mayotte Estelle Youssouffa (Liot).
"Il reste muet sur des sujets essentiels"
"Nous sommes face à un texte technique, rédigé par la haute administration au lendemain du cyclone et avant la formation du gouvernement, sans consultation avec les élus locaux ni les parlementaires. Ce qui nous est présenté apporte, certes, des réponses utiles pour accélérer la reconstruction mais il reste largement muet sur des sujets essentiels, comme l'immigration", a-t-elle critiqué. Plus de la moitié de la population de l'archipel est étrangère, selon l'Insee.
"L'alerte cyclonique du 11 janvier a replongé la population dans un nouveau cauchemar de dévastation, avec des vents violents, des pluies torrentielles, coulées de boues et inondations. Le ciel nous est de nouveau tombé sur la tête et a détruit les biens qui nous restaient. Nous avons tous, sinon perdu un toit, subi des inondations et des dommages matériels importants, perdu notre emploi ou outil de travail alors que l'eau et l'électricité manquent toujours, que les bâches sont introuvables, que les distributions alimentaires et d'eau sont insuffisantes", a témoigné la députée. "Mayotte est à terre, la population à bout."
Un texte qui "passe à côté de son sujet"
La seconde députée de Mayotte, Anchya Bamana (RN), s'est dite, elle, "en colère" contre un projet de loi "qui passe à côté de son sujet", en ne permettant pas de lutter contre la "submersion migratoire".
Plusieurs députés ont également accusé le gouvernement d'avoir tenté de faire adopter par amendement des mesures de lutte contre les bidonvilles, s'exposant à un risque d'irrecevabilité. Les amendements ont finalement été écartés car ils ont été jugés sans lien direct ou indirect avec le texte.
"Reconstruire durable"
"Le cyclone Chido nous impose de reconstruire Mayotte mieux, correctement, durable, solidement. Nous vous demandons le courage de ne pas répéter les mêmes erreurs, d'enfin nous écouter", a appelé Estelle Youssouffa. La rapporteure a rappelé la situation de l'archipel : "un département sous-développé, sous-équipé, et systématiquement écarté des mesures de progrès et d'égalités prises pour le pays par les gouvernements successifs".
Un autre projet de "loi programme" doté de mesures de plus long terme est prévu pour mars, a répondu le ministre Manuel Valls. Le texte de loi d'urgence sera quant à lui examiné dans l'hémicycle le 20 janvier, avant que le Sénat s'en empare le 3 février.
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