FINANCES PUBLIQUES. Dans un courrier du 4 septembre 2019, la Chambre nationale des artisans des travaux publics et du paysage (CNATP) interpelle une nouvelle fois Bercy et Matignon sur les conséquences de la suppression de l'avantage fiscal sur le GNR pour les entreprises du secteur. Et de prévenir que "de nombreux professionnels n'hésiteront pas à se mobiliser massivement".
Alors que le Gouvernement a rendu ses arbitrages sur le budget 2020, l'inquiétude ne cesse de monter chez les professionnels des travaux publics sur l'épineuse question du gazole non-routier (GNR). En vue de la préparation du projet de loi de Finances pour l'exercice 2020, l'exécutif a effectivement tranché : la suppression du taux réduit de TICPE (Taxe intérieure de consommation des produits énergétiques) sur le GNR pour le secteur du bâtiment et des travaux publics est bel et bien actée. Pour étaler cette modification dans le temps, Bercy a décidé de procéder par étapes, en réalisant plusieurs tranches de suppression sur trois ans, avec une première réduction, de l'ordre de 45%, qui devrait avoir lieu en juillet 2020. Des mesures d'accompagnement seront parallèlement instaurées pour épauler les professionnels de la construction. Pour autant, cette décision est loin de rassurer le secteur.
Une "double peine" pour les travaux publics face au secteur agricole
Ce 4 septembre 2019, la Chambre nationale des artisans des travaux publics et du paysage (CNATP, rattachée à l'Union des entreprises de proximité) a adressé un nouveau courrier au ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, ainsi qu'au Premier ministre, Edouard Philippe, pour les alerter encore une fois sur les conséquences "désastreuses" de cette suppression. Plusieurs conseillers de Matignon et de l'Elysée avaient aussi été interpellés par l'organisation il y a plusieurs mois. Mais les dernières décisions gouvernementales ont motivé la CNATP à reprendre la plume, allant jusqu'à parler de "double peine" pour les professionnels du secteur, à savoir "l'impact financier important et le risque non-négligeable de recrudescence des vols de carburant (...) à laquelle s'ajouteraient les détériorations de leurs matériels". Du fait de la suppression des colorants pour distinguer les types d'essence (rouge pour le GNR et blanc pour le gazole), la CNATP craint effectivement une hausse des actes de délinquance.
L'autre sujet majeur de crispation est celui de la différence de traitement entre secteurs d'activité, les travaux publics craignant d'être sollicités là où d'autres professions pourraient continuer à bénéficier de cet avantage fiscal. "La CNATP ne peut accepter également la concurrence déloyale du monde agricole (exploitant agricole ou entreprise de travaux agricoles) agissant dans les activités du BTP qui eux pourraient continuer à consommer un carburant détaxé", avertit l'organisation dans leur courrier rendu public. "Faut-il rappeler le principe fondamental d'équité fiscale : mêmes chantiers, mêmes exigences, mêmes conditions d'exercice, mêmes taxes !" Et d'affirmer que "l'idée de remise en cause et d'étalement sur trois années ne pourra être entendue par nos entreprises si d'autres secteurs restent épargnés !"
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Un éventuel mouvement social dans le secteur ?
Pour les représentants des artisans, le poste carburant s'avère particulièrement significatif dans les budgets des entreprises disposant de véhicules ou d'engins de chantiers. D'après les calculs de la CNATP, la suppression du taux réduit de TICPE engendrerait une envolée de 50% de la facture énergétique des professionnels, une réduction de leur marge voire même le creusement de déficits, "car il semble difficilement envisageable, notamment pour l'ensemble des chantiers réalisés pour le compte des particuliers, de répercuter les hausses correspondantes". Un impact financier qui pourrait également se traduire sur le nombre d'embauches, le taux de formation des apprentis et celui des investissements. Allant jusqu'à parler de "survie" des entreprises de la filière, la CNATP tire la sonnette d'alarme sur un éventuel mouvement social dans le secteur, prévenant que "de nombreux professionnels n'hésiteront pas à se mobiliser massivement si ces annonces venaient à être confirmées, sans prise en compte des demandes de la profession". Et de conclure : "Jusqu'alors la CNATP contient ces volontés de mouvements en précisant qu'elle agit dans la concertation ; néanmoins la CNATP souhaite être entendue sur ses requêtes légitimes précitées (...)".