Près de trois ans après sa publication, l'encadrement des loyers prévu par la loi ALUR s'étend hors de Paris et s'applique désormais à Lille et à une partie de son agglomération. La capitale du Nord est reconnue comme étant la troisième ville la plus chère de France, avec des loyers privés ayant fortement augmenté dans les années 2000.
Les locataires de Lille, Hellemmes et Lomme (Nord) sont protégés par le dispositif d'encadrement des loyers depuis le 1er février 2017. L'agglomération lilloise est la première de province à adopter cette mesure, puisqu'elle n'était en vigueur qu'à Paris, depuis août 2015. Audrey Linkenheld, députée PS et conseillère municipale de Lille, déclare : "Depuis plusieurs années, on constatait un décrochage entre les revenus et les loyers. Jusqu'à un certain point, c'était compréhensible, en raison de l'attractivité de la ville. Mais à un moment donné, il fallait que cela s'arrête". L'élue rappelle que "pendant longtemps, Lille était plutôt moins chère que les autres grandes villes" mais qu'elle était maintenant devenue "la troisième ville la plus chère de France". Les loyers privés ont bondi de +70 % entre 2000 et 2012 contre +50 % en moyenne nationale.
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Audrey Linkenheld explique cette hausse : "Le fait que 75 % du parc privé est composé de petits logements T1 et T2, nés souvent de la division de maisons de ville, où les loyers au mètre carré sont élevés". L'élue précise avoir évalué le stock de logements et remarqué que les loyers excessifs concernaient 14 % de l'ensemble. Désormais, avec la mesure d'encadrement, il est prévu qu'à la signature d'un nouveau bail, ou lors d'un renouvellement, le loyer du logement ne puisse dépasser de plus de 20 % un loyer de référence, fixé par arrêté préfectoral, selon le nombre de pièces et la date de construction du bien. Il ne pourra pas non plus être inférieur de plus de 30 % à ce même loyer de référence, sauf exception bénéficiant d'un complément de loyer. La grille des loyers est consultable sur Internet (site de la préfecture et du ministère du Logement) et il appartient ensuite aux locataires lésés "de contester leurs loyers devant la commission départementale de conciliation".
Réactions contrastées entre les propriétaires et les locataires…
L'association nationale de défense des consommateurs (CLCV) salue cette mesure "qui va dans le sens de l'application pleine et entière de la loi ALUR". Selon l'organisation, le dispositif concernerait 28 agglomérations en France, représentant 1.151 communes, où la situation immobilière serait tendue. La CLCV remarque même que "certaines agglomérations ne sont dotées d'aucun observatoire [des prix] en raison de l'opposition des acteurs locaux (Annecy, Annemasse ou Saint-Nazaire par exemple), ce qui n'est pas admissible". Jean-Yves Mano, le président de l'association en profite pour demander aux candidats à la présidentielle, "de s'engager à maintenir ce dispositif et, surtout, à ne pas remettre en cause son extension à la banlieue parisienne".
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A l'opposé, Jean-Pierre Berlinet, le président de l'Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI), avait critiqué le dispositif au mois de décembre 2016 : "C'est beaucoup de travail pour peu de résultats". Cela va "faire fuir certains investisseurs (…) et peut-être décourager des propriétaires bailleurs déjà assommés par les taxes multiples et qui pourraient donc vendre", avait-il déclaré. Un avis que ne partage pas du tout la CLCV, qui détaille dans son communiqué : "(…) Alors même qu'on nous prédisait littéralement une apocalypse immobilière, force est de constater qu'il n'en a rien été : le marché de l'immobilier se porte bien, très bien même, et n'est nullement ralenti. Ainsi, plus d'un quart des logements achetés à Paris le sont pour être mis en location, soit 8 % de plus qu'en 2015 d'après Century 21". Un peu plus loin, l'association enfonce le clou : "Cette mesure n'est nullement liberticide (…) elle consiste à interdire les pratiques de certains bailleurs qui proposent un loyer excessif compte tenu des caractéristiques du bien loué et de sa localisation géographique au regard d'autres logements similaires". Pour la CLCV, l'encadrement constitue donc une mesure d'évaluation économique.
Entre 2018 et 2019, plus de 400 autres communes de la banlieue parisienne devraient, à leur tour, adopter cette mesure.