FUTURS ARCHITECTES. Alors que l'Ensa de Normandie a connu plusieurs semaines de blocages, la mobilisation aurait désormais atteint "la moitié des écoles", d'après le collectif national qui coordonne la lutte des écoles d'architecture pour obtenir des moyens supplémentaires.
Quand la crise conjoncturelle d'une école en difficulté rencontre le mécontentement général d'une institution en manque structurel de moyens. Le mouvement de blocage des cours des Ecoles nationales supérieures d'architecture (Ensa), parti début février de Normandie, aurait atteint la moitié des écoles. Le Collectif national Ensa en lutte fait savoir, le 8 mars, que "presque la moitié des écoles du territoire ont banalisé tous leurs enseignements pour trouver des résolutions à ces problématiques structurelles et obtenir réponse de la part de nos ministères de tutelle".
Tout est parti, en début d'année, de l'Ensa Normandie, qui connait une grave crise de personnel, au point que les cours n'ont pu être assurés, faute de fonctions support. Le blocage des enseignements, "mais pas de l'école", a été voté début février, expliquaient récemment des membres du corps enseignant à Batiactu. Un mouvement de contestation, rassemblant le personnel, des professeurs et des élèves, s'est ainsi formé, afin d'alerter l'État sur la situation "catastrophique de l'établissement qui n'est plus en mesure de remplir certaines de ses missions de formation et de recherche".
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Situation difficile dans la plupart des Ensa
Si le mouvement s'est répandu dans plusieurs autres écoles nationales d'architecture, c'est que le constat est partagé, depuis longtemps, sur l'indigence de l'enseignement de l'architecture en France. Le tout dans un contexte d'une forme de pénurie d'architectes, voire d'une désertification de pans entiers du territoire.
En décembre dernier, les directeurs d'Ensa réclamaient, dans une lettre ouverte, l'ouverture d'écoles dans les régions non pourvues, l'augmentation du nombre de places et, globalement, celle des moyens. François Brouat, président du collège des directeurs d'Ensa, n'a pas dit autre chose aux sénateurs, lors de son audition, le 1 mars, par la commission de la culture.
Un budget par élève très en dessous de celui des universités
François Brouat y dénonçait le "numerus clausus de fait" dû au manque de moyens pour accueillir les nombreux candidats à la formation, alors que "le pays va avoir besoin de plus d'architectes pour affronter les enjeux qui nous attendent".
Concernant les moyens des écoles, il a rappelé que, si la réforme de 2018 alignant les statuts des enseignants-chercheurs avec ceux de l'université avait permis d'améliorer la situation, le compte n'y est toujours pas : d'après le rapport de l'Igac (Inspection générale des affaires culturelles) de décembre 2021, la dépense publique moyenne par étudiant en architecture est de 8.500 euros, "contre 10.500 euros à l'université… et plus de 13.000 euros en écoles d'ingénieurs".