REPRISE. Au lendemain de la présentation du plan de relance gouvernemental, les artisans jugent que la réponse économique va dans le bon sens mais que tous les freins empêchant une relance pérenne du bâtiment ne sont pas encore levés. Les pouvoirs publics promettent quoi qu'il en soit que 40 milliards d'euros du plan seront fléchés vers les TPE-PME.
Dans le plan de relance sobrement baptisé "France relance", présenté ce 3 septembre 2020, l'exécutif a souligné que les TPE-PME allaient concentrer près de 40 milliards d'euros directs et indirects, dans le but de dynamiser leurs investissements, de les accompagner dans le déploiement du numérique et la transition écologique, mais aussi de conquérir de nouveaux marchés. "L'envergure de France relance est considérable et je suis fier de le porter, aux côtés du Premier ministre et de Bruno Le Maire [ministre de l'Economie, ndlr]", a affirmé Alain Griset, ministre chargé des TPE-PME à Bercy. "Ce plan est à la fois ambitieux et réaliste, il apporte des solutions concrètes aux défis du quotidien des PME sur des sujets-clés comme la rénovation énergétique, la numérisation, la revitalisation des centres-villes, la baisse des impôts de production ou encore les enjeux de financement", a-t-il poursuivi.
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1,6 milliard d'euros pour la transition écologique des TPE-PME et 565 millions pour leur transformation numérique
Dans le détail des lignes budgétaires, une enveloppe de 5,2 milliards d'euros sera dédiée à l'accroissement des investissements, qui se décompose en 1,5 milliard pour développer notamment les prêts participatifs de long terme, 3,2 milliards pour alléger les impôts de production, et 40 millions pour les "Prêts croissance TPE", un dispositif de financement "des investissements matériels et immatériels" selon le ministère. Pour le reste, 565 millions seront fléchés vers la transformation numérique des TPE-PME, pendant que les mesures d'accompagnement vers la transition écologique profiteront d'1,6 milliard, dont notamment 200 millions pour instituer un crédit d'impôt en faveur des investissements de rénovation des bâtiments des TPE-PME.
Les petites entreprises devraient par ailleurs toucher environ 3 milliards d'euros pour l'accès à la formation et la montée en compétences - une somme qui englobe l'activité partielle de longue durée ainsi que les mesures en faveur de l'embauche des jeunes - et à peu près 11 milliards pour les encourager à se positionner sur de nouveaux marchés, de la rénovation thermique des bâtiments publics à la réhabilitation de logements sociaux, grâce entre autres à des outils comme l'assurance-prospection et le chèque-export. Le ministère chargé des TPE-PME insiste enfin sur les 900 millions qui feront office de soutien aux entreprises de l'artisanat, via la requalification de l'habitat et des commerces et la création d'une centaine de foncières commerciales dans les régions pour redynamiser les centres-villes et centres-bourgs.
"Il faut envisager de se pencher sur le niveau des charges qui pèsent sur les TPE"
Les organisations professionnelles du secteur apprécient-elles ces mesures ? Quoi qu'il en soit, la Confédération des artisans et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), dans un communiqué diffusé le 4 septembre 2020, estime que tous les freins empêchant une reprise pérenne du bâtiment ne sont pas encore levés. Sur le plan économique, elle attend le détail des mesures gouvernementales relatives aux financements et aux charges des entreprises. "Nous avons noté, sur le financement des entreprises, la volonté du Gouvernement de négocier avec les banques des taux d'intérêt le plus bas possible pour les petites entreprises qui rembourseraient leur PGE [Prêt garanti par l'État, ndlr] au-delà d'un an. [...] Au-delà de la baisse des impôts de production, il faut également envisager de se pencher sur le niveau des charges qui pèsent sur les TPE tout au long de la crise générée par le Covid ainsi que sur la prise en charge des surcoûts résultant de la mise en œuvre des règles sanitaires sur les chantiers", explique le président de l'organisation, Jean-Christophe Repon.
Mais la Capeb en attend davantage, également, sur le front de la rénovation énergétique. "Nous accueillons bien sûr favorablement la hausse de financement de deux milliards d'euros de Ma prime rénov', qui s'ouvrira à davantage de bénéficiaires, prévue dans le plan de relance", assure Jean-Christophe Repon. "Toutefois nous rappelons que pour atteindre cet objectif ambitieux de logements rénovés, il faudra également réunir plusieurs conditions, notamment simplifier le dispositif RGE, fluidifier le dispositif des CEE, accompagner les entreprises et informer les clients."
Renforcer l'accompagnement des CEE et simplifier la qualification RGE
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Concrètement, l'organisation considère que deux axes doivent donc être approfondis pour redynamiser les marchés de rénovation énergétique. D'abord, le dispositif des CEE doit bénéficier d'un accompagnement renforcé pour réduire les difficultés administratives auxquelles se retrouvent confrontées les entreprises RGE, tout en évitant les effets d'aubaine de la part de certains intermédiaires qui engendrent souvent des sous-traitances déséquilibrées. C'est pourquoi l'artisanat demande de limiter les possibilités de sous-traitance d'une entreprise non-RGE à des entreprises RGE, et demande à ce titre que des "développeurs" soient mis en place pour épauler les professionnels dans la recherche de dispositifs d'aides. "Cet accompagnement pédagogique constituerait une forme d'appui de 'tertiaire' de la petite entreprise pour qu'elle intègre toute la gestion administrative que génère ce type de financement", précise un communiqué.
Le second axe consiste à simplifier la qualification RGE de manière à en limiter la fraude. D'autant que les entreprises seraient en proie à "une certaine désaffection" pour ce dispositif car elles en attendraient visiblement davantage de bénéfices. En 2020, la profession n'a comptabilisé que 48.000 entreprises qualifiées RGE, dont une grande majorité de TPE de moins de 10 salariés. D'après la Capeb, trois demandes majeures remontent du terrain : déjà, renforcer les contrôles ciblés sans pénaliser les entreprises vertueuses ; ensuite, simplifier les procédures ; enfin, faire évoluer le dispositif sur le modèle de Consuel (conformité des installations électriques) ou de PG (Professionnels du gaz).