On ne rigole pas avec l'inspecteur du travail, qui a des pouvoirs assez élargis dans le cadre de sa mission de contrôle. Prenez donc sa visite au sérieux, à défaut de quoi, vous risquez de passer par la « case amende / prison ».
Ah ! Les visites de l'inspecteur du travail...
C'est comme l'Arlésienne, vous en aviez souvent entendu parler mais l'inspecteur n'avait jamais pointé ne serait-ce que le bout de son doigt à la porte de votre entreprise.
Mais là, ça y est. Avec la rentrée, votre inspecteur a lui aussi repris du service, frais et reposé après ses vacances, et vous vous trouvez sur le chemin de sa tournée. Sa visite est prévue pour la semaine prochaine, vous avez reçu son courrier, dans lequel il vous demande de préparer un certain nombre de documents pour qu'il puisse les consulter.
Et même si vous pensez que certaines pièces qu'il souhaite voir ne sont pas très pertinentes, préparez-les quand même, à défaut de quoi vous risquer des poursuites pénales.
Si, si.
Le simple fait de ne pas présenter un document est déjà un obstacle
C'est ce qui est arrivé à la directrice d'un hôtel, reconnue coupable d'obstacle aux fonctions d'inspecteur du travail, pour n'avoir pas produit le décompte horaire des salariés sur un mois donné, et condamnée à 3.500 euros d'amende.
NOTEZ-LE
L'obstacle aux fonctions d'inspecteur ou de contrôleur du travail est un délit pénal jugé par le tribunal correctionnel. En tant qu'employeur, vous encourrez une peine pouvant aller jusqu'à un an de prison et 3.700 euros d'amende (Code du travail, art. L. 8114-1).
En effet, pour les juges, le simple fait de ne pas communiquer à l'inspecteur les documents qu'il demande, sans pour autant s'opposer ouvertement au bon déroulement de sa mission, suffit à constituer le délit.
La directrice avait pourtant avancé deux arguments pour s'exonérer de sa responsabilité :
- elle avait donné à l'inspecteur les plannings de travail qui équivalaient, selon elle, au décompte horaire, puisqu'il suffisait à l'inspecteur de calculer les heures selon le planning ;
- seul son adjoint devait être mis en cause du fait de la mise en place d'une délégation de pouvoirs.
Ces arguments ont été vite balayés par les juges. D'une part, le décompte horaire est un des documents prévus par la loi comme devant être mis à la disposition de l'inspecteur. D'autre part, son adjoint était en arrêt maladie à l'époque des faits, la suspension de son contrat de travail entraînant automatiquement la suspension de la délégation de pouvoirs.
Appréciation de l'obstacle au regard des circonstances de la visite
Il faut quand même préciser que, dans cette affaire, la directrice ne s'était pas contentée de ne pas donner les documents.Les juges ont prononcé une lourde peine au regard de son attitude, plutôt hostile. Ils ont relevé les tergiversations pour obtenir un rendez-vous, les tentatives d'intimidation, visant à déstabiliser l'inspecteur, caractérisées par les courriers au directeur départemental du travail pour se plaindre de son comportement, les explications fluctuantes et variables sur la raison de la non-remise des documents (une fois ils se trouvaient ailleurs qu'au siège social, ensuite ils n'avaient pas été établis, enfin, ils n'avaient pas été réclamés par l'inspecteur lors de sa visite).
Rassurez-vous : Si vous oubliez involontairement un document et que vous mettez tout en œuvre pour le produire ensuite, vous ne serez pas poursuivi. C'est l'« oubli » volontaire, à fortiori le refus, qui est répréhensible, et considéré comme un obstacle à la mission de l'inspecteur du travail.
Pour plus de précisions sur le rôle et le pouvoir de l'inspecteur du travail, les Editions Tissot vous conseillent leur ouvrage « Gérer le personnel ».
Cour de cassation, chambre criminelle, 19 juin 2012, n° 11-81654 (est un obstacle à ses fonctions, le fait de ne pas produire les documents demandés par l'inspecteur du travail)