L'hiver approche et les températures chutent : des pics de consommation d'électricité sont à prévoir. Or, si la France importait jusqu'à récemment des milliers de mégawatts à ces moments cruciaux, l'arrêt des réacteurs nucléaires allemands change la donne. Des pannes et des coupures d'électricité seraient à craindre.
Suite à la catastrophe de Fukushima, l'Allemagne a décidé l'arrêt immédiat de 8 de ses 17 réacteurs nucléaires, avec pour conséquence une raréfaction prochaine de l'électricité… en France. En effet, si notre pays est exportateur de courant électrique pendant la majeure partie de l'année, la consommation hivernale explose à certaines heures, aux alentours de 19h00, heure de retour chez soi et de préparation du repas. Lors de ces pics de consommation, la France importe du courant des pays limitrophes, jusqu'à 8.000 MW, soit l'équivalent de la production d'environ 8 réacteurs.
Entre décembre 2009 et janvier 2010, l'épisode neigeux et les températures négatives persistantes, situées bien en dessous des moyennes saisonnières, a ainsi mené à un record de consommation à 92.400 MW (la demande moyenne se situe entre 50.000 et 70.000 MW), nécessitant l'importation d'électricité allemande, qui sera désormais manquant. Une chute d'un degré de la température moyenne dans l'Hexagone induit une surconsommation de 2.300 MW supplémentaires, liée notamment à la politique du chauffage tout électrique, menée dans les années 1970-1980.
Le RTE sous haute tension
Des coupures maîtrisées, opérées par RTE (Réseau de Transport d'Electricité), seraient donc envisageables dans le cas d'un hiver rigoureux. Cela dépendra, outre la météo, de la disponibilité des réacteurs du parc français (7 réacteurs sur 58 se trouvant en entretien) et de la production des centrales thermiques allemandes. En ultime recours, RTE ferait appel au civisme des utilisateurs en leur recommandant d'éteindre les pièces inoccupées et de ne pas utiliser certains équipements énergétivores aux heures de pointe (sèche-linge notamment), comme cela a déjà été le cas en Bretagne, une des régions les plus fragiles énergétiquement.
Du côté des professionnels, le gestionnaire du réseau de distribution pourrait demander aux industriels de pratiquer l'effacement, une mesure mise en place en 1994. Contre des tarifs avantageux, des groupes sidérurgiques, chimiques ou automobiles, gros consommateurs de courant, peuvent suspendre l'alimentation de certains sites en mettant des installations en veille ou en utilisant des groupes électrogènes. Le seul impératif est un délai de 24 heures pour leur laisser le temps de s'organiser et un maximum de 22 jours d'effacement entre novembre et mars. En 2010, la capacité d'effacement totale était d'environ 3 GW, permettant à RTE de bénéficier d'une certaine marge de manœuvre. Contacté, le gestionnaire du réseau n'a pas souhaité répondre aux questions portant sur la menace de pénurie hivernale avant la publication, le 10 novembre prochain au plus tard, d'un état des lieux sur la consommation et l'importation d'énergie en France.