TENSIONS. Au lendemain de l'ouverture d'une concertation autour du calendrier du chantier du Grand Paris express par le Premier ministre, confusion et inquiétude règnent parmis les acteurs et les professionnels.
"Nous avons tous hâte que cette séquence s'achève pour pouvoir avancer", explique à Batiactu une source interne de la Société du Grand Paris (SGP) à Batiactu. "Nous aimerions pouvoir nous concentrer sur l'essentiel et non pas sur des histoires de calendrier qui traînent en longueur." Drôle d'ambiance ces derniers jours parmi les principaux protagonistes de ce dossier emblématique et aux lourds enjeux qu'est le Grand Paris.
Preuve du flou qui règne actuellement autour du "chantier du siècle", l'annulation de la cérémonie des voeux de la Société du Grand Paris (SGP) qui devait se tenir le mercredi 24 janvier 2018. Le premier ministre Edouard Philippe vient en effet de semer le trouble en annonçant la tenue d'une concertation avec les élus sur le calendrier du projet, sans préciser combien de temps elle durera. Une chose est sûre : un décalage dans le temps semble aujourd'hui acté sur le principe, même si, comme l'a affirmé Edouard Philippe, l'ensemble du GPE sera bien intégralement réalisé.
D'après le Canard enchaîné daté du 24 janvier 2018, la concertation lancée par le premier ministre a surtout pour objectif de "prendre le temps de voir les élus pour les associer et leur faire assumer les retards". Pour l'hebdomadaire satirique, une moitié du réseau sera mise en service avant les JO 2024, l'autre moitié, comprenant notamment la ligne 18 Orly-Saclay-Versailles (ce qui a le don d'exaspérer le député et mathématicien Cédric Villani), ne viendra qu'après - l'annulation récente de l'exposition universelle, qui devait être accueillie à Saclay, laissait présager ce choix.
Il est demandé aux acteurs de "patienter pour régulation"
Selon des informations du quotidien Le Monde, "le prolongement de la ligne 14 devrait être livré à temps en 2024, mais la 15, véritable rocade du Grand Paris, ne verrait le jour qu'en 2024 au lieu de 2022 pour sa partie sud - et encore plus tard, jusqu'en 2030 et au-delà, pour la suite du parcours". Quant à la ligne 16, qui devait ouvrir en 2023, "elle pourrait n'être réalisée qu'a minima, entre Le Bourget RER et Saint-Denis-Pleyel, pour 2024, mais attendre au moins jusqu'à 2026 pour la partie est". Enfin, toujours selon Le Monde, la 17 pourrait avoir deux ans de retard, et la 18 ne voir le jour qu'en 2026. Bref, il sera demandé aux acteurs, pour ainsi dire, de "patienter pour régulation", comme l'entendent quotidiennement les usagers franciliens des transports ferrés.
A cela s'ajouterait la mise à l'écart (également annoncée par Le Monde) de Philippe Yvin, président du directoire de la Société du Grand Paris (SGP), quelques jours après la publication d'un rapport accablant de la Cour des comptes sur la gestion et l'organisme.
Cet étalement probable des travaux du Grand Paris ne devrait pas faire l'affaire des PME du secteur, comme nous le précisait le 23 janvier le président de la Fédération régionale des travaux publics d'Île-de-France, José Ramos. "Si le planning est trop détendu, y aura-t-il les 20% de marchés prévus pour les PME ?", se demandait-il. "Les grands groupes ne font appel à des sous-traitants que s'ils ont besoin de ressources extérieures." Il nous affirmait également attendre avec impatience les détails du nouveau calendrier.
La Société du Grand Paris dispose-t-elle d'assez de moyens ?
Rappelons également que, comme l'indiquait le rapport de la Cour des comptes, les effectifs de la SGP semblent sous-dimensionnés. "Le dimensionnement de la SGP apparaît très en deçà de ce que l'on peut constater pour les structures chargées de la maîtrise d'ouvrage des très grands projets d'infrastructures souterraines de transport", peut-on y lire page 103. "La comparaison avec le projet Crossrail à Londres est, de ce point de vue, édifiante pour un projet pourtant de moindre envergure. Ainsi, la société de projet Crossrail limited, chargée de la maîtrise d'ouvrage du projet, emploie directement 700 personnes, soit environ le triple des effectifs actuels de la SGP."