BILAN. Le président français a terminé sa tournée européenne dont le but était de convaincre ses homologues, de certains pays de l'Est notamment, à durcir la directive sur les travailleurs détachés. Après un début encourageant, le ton a changé.
Du 23 au 25 août, lors de sa tournée européenne, le chef de l'Etat avait pour mission de convaincre certains de ses homologues du bien-fondé de la révision de la directive sur les travailleurs détachés, qui doit être étudié en octobre par l'Union européenne. La mission était délicate car Paris souhaite durcir les mesures pour lutter contre les abus du travail détaché, en passant notamment à un an la durée maximale du détachement ou en instaurant le principe du "à travail égal, salaire égal". Des mesures mal perçues par certains pays de l'Est, qui s'étaient déjà vivement opposés à la révision en brandissant le carton jaune en juillet 2016 (Lire notre article).
Vers un renforcement des contrôles au niveau européen
Dès le premier jour (23 août), lors d'une rencontre à Salzbourg, organisée par le chancelier autrichien Christian Kern, les premiers ministres tchèque (Bohuslav Sobotka) et slovaque (Robert Fico) ont donné leur accord de principe pour réviser la directive. "Il reste à affiner les paramètres dans les semaines à venir pour trouver un compromis intelligent en octobre au niveau des ministres du Travail et pouvoir acter, sous la présidence estonienne, qui nous réunira, un véritable accord", avait déclaré Emmanuel Macron à l'issue de la conférence de presse quadripartie.
Les dirigeants se sont surtout accordés sur le renforcement des contrôles au niveau européen. "Ce que nous avons acté tous les quatre, c'est de renforcer le partenariat dans les contrôles et donc d'agir de concert en développant des actions bilatérales réciproques en termes de renforcement des contrôles pour lutter contre le travail détaché abusif", a annoncé le chef de l'Etat. Ce dernier considère que ces discussions "marquent une véritable étape, une véritable avancée vers un compromis pour le mois d'octobre".
Changement de ton avec la Roumanie
Si Emmanuel Macron semble avoir convaincu la République Tchèque et la Slovaquie, le lendemain (24 août) le ton a changé en Roumanie, pays fortement opposé à la révision de la directive. Lors de la conférence de presse conjointe avec le Président de Roumanie, Klaus Werner Iohannis, le chef de l'Etat français a reconnu que c'était "un sujet sensible dans [son] pays". Même s'il s'est félicité "de cette volonté commune de travailler ensemble," Emmanuel Macron avait alors dénoncé "le cadre trop faible" de la directive des travailleurs détachés qui "conduit des entreprises françaises à embaucher en France des ressortissants du reste de l'Union européenne et en particulier des pays à bas coûts." Et alors que la Roumanie doit prendre la présidence de l'Union au 1er janvier 2019, Emmanuel Macron a indiqué qu'il souhaitait que cela se fasse avant : "je suis persuadé que nous trouverons un accord d'ici à la fin de l'année", a-t-il déclaré.
Le président roumain, même s'il a reconnu que cette directive ""n'est pas suffisamment claire et pas suffisamment bonne", s'est montré plus prudent en indiquant cependant qu'un accord pourrait être trouvé d'ici à la fin de l'année.
Echanges musclées avec la Pologne
L'ambiance s'est tendue le dernier jour de cette tournée (25 août). Alors que le chef de l'Etat français se rend en Bulgarie, la Pologne décide de se faire entendre et réitère son refus de réviser la directive. La première ministre polonaise, Beata Szydlo, a annonccé que son pays refuserait "jusqu'au bout" une réforme de la directive, "dans l'intérêt des travailleurs polonais". Une annonce vivement critiqué par Emmanuel Macron qui évoque "une nouvelle erreur" de Varsovie qui se met, selon lui, "en marge de l'Europe.
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Même si le premier ministre bulgare s'est montré "affable" avec Emmanuel Macron, comme le rapporte le journal Le Monde, il lui a toutefois adressé un avertissement : "La Pologne et la Hongrie ne sont pas que des amis, ils sont une partie importante de l'Union européenne", a-t-il déclaré.
Malgré cet épisode avec la Pologne, Emmanuel Macron pense qu'un accord sera trouvé avant la fin de l'année sur la directive des travailleurs détachés. "Je ne crains pas que cela fragilise la construction d'un compromis ambitieux et positif, au contraire", a-t-il déclaré. Il s'est dit convaincu que la France réussirait à obtenir la majorité qualifiée nécessaire pour réformer et durcir cette directive afin de lutter contre le dumping social.