ÉCONOMIE. Les petites et moyennes entreprises ont su relever la tête après la tempête du Covid, leur permettant aujourd'hui d'être relativement sereines pour les prochains mois. Ce qui ne veut pas pour autant dire que les sujets d'inquiétude ont été totalement écartés : inflation, pénuries, manque de main-d'oeuvre... La construction aussi est concernée, souvent en première ligne de ces problématiques.
Lorsque la tempête du Covid a commencé à souffler, beaucoup ont craint pour la survie des plus petites entreprises, à commencer par le Gouvernement qui a déployé en urgence un arsenal de mesures de soutien pour éviter la catastrophe. Mais, deux ans après la survenue de la pandémie, les entreprises n'ont-elles finalement pas été plus fortes que la crise sanitaire et économique ? C'est le principal message d'une étude du Cercle Perspectives qui vient de paraître : ce collectif regroupant professionnels du conseil et experts-comptables a réalisé en décembre dernier une enquête auprès d'environ 4.500 très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME), tous secteurs confondus, pour connaître leur situation et leurs perspectives de développement après cette période d'épreuves. Précision : 70% des répondants sont des sociétés comptant entre 1 à 5 salariés, 14% sont dans le BTP, 3% dans l'immobilier, 3% sont des bureaux d'études et 1% travaille dans l'énergie.
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Les résultats s'avèrent probants : la confiance des entrepreneurs n'a jamais vraiment été ébranlée, et reste solidement ancrée. Les très bonnes tendances observées s'expliqueraient, "d'une part, par les mesures de soutien massif à l'économie mises en oeuvre par l'État, qui ont permis aux TPE-PME de passer la crise, et d'autre part, par la capacité d'adaptation extraordinaire des TPE-PME, qui ont su, selon les situations, développer de nouveaux produits, vendre en ligne, s'adapter au télétravail ou investir dans de nouvelles compétences", analyse le président du Cercle Perspectives, Laurent Chapart. Bien sûr, ces généralités doivent être relativisées dans la mesure où les différents secteurs de l'économie ont pu réagir différemment aux turbulences et ainsi se retrouver dans des situations qui leur sont propres.
Les entreprises de la construction ayant embauché des apprentis confiantes dans leur activité future
D'une manière générale, 73% des petits patrons estiment que leur chiffre d'affaires 2022 sera supérieur (44%) ou égal (29%) à celui qu'ils ont enregistré en 2019, avant la pandémie. Parmi eux, ceux à la tête de structures de plus de 11 salariés, évoluant dans le BTP, et ayant bénéficié du plan "1 jeune, 1 solution". Les chefs d'entreprises se disent confiants dans la capacité de production de leur société (83%), dans leurs perspectives d'avenir (79%) et dans la solidité financière de leur structure (74%).
Avec la reprise économique que l'on observe actuellement dans le monde, les dirigeants accordent de l'importance à trois priorités : la structure financière de leur entreprise (93%), son développement commercial (84% en général, moins de 78% dans le BTP) et la santé économique de leurs prestataires et partenaires (83%). Le niveau d'importance accordé à l'organisation de l'outil de production est pour sa part de 79% au global, mais de plus de 85% dans la construction. Des préoccupations qui n'empêchent pas les entreprises d'envisager le développement de nouveaux produits ou services (37%), la réalisation d'investissements (33%), la conclusion de nouveaux partenariats (29%) ou la recherche de compétences inédites (20%).
Une meilleure perception du rôle social et environnemental de l'entreprise, mais encore très peu d'actes concrets
Toujours d'après l'étude, 8 TPE-PME sur 10 ont réussi à préserver leur relation client, voire à l'améliorer. Elles ont de même mis l'accent sur la numérisation de leur activité : seulement 8% d'entre elles n'ont pas fait évoluer leur offre sur Internet. Un phénomène dans lequel ont en revanche beaucoup de mal à s'inscrire les entreprises du bâtiment, sans doute peu concernées, du fait de la nature-même de leur activité, par ces outils technologiques.
Si les chefs d'entreprises sont globalement 65% à se sentir en outre davantage concernés par leur responsabilité sociale et environnementale (RSE), ils sont malgré tout 82% à ne pas avoir développé de politique spécifique dans ce domaine, priorité étant donnée à la relance de leur activité. Dans la construction, les politiques RSE concernent en effet principalement les grands groupes, comme l'a révélé une enquête menée par Batiactu sur le sujet.
Deux "fragilités structurelles importantes"
Attention malgré tout à ne pas verser dans l'excès d'optimisme. Bien qu'elles abordent l'avenir avec confiance, trois problèmes conjoncturels inquiètent les entreprises : l'inflation, qui engendre un impact important sur les coûts de production pour 84% des TPE-PME (et qui impacte encore plus durement celles du BTP) ; les difficultés d'approvisionnement, qui perturbent 69% des entreprises (au premier rang desquelles celles du bâtiment) ; et les problématiques de recrutement - ou de fidélisation des salariés - qui concernent 83% d'entre elles. Sur ce dernier point, il semble que les professionnels de la construction soient majoritairement concernés, a fortiori pour les entreprises de 11 salariés et plus - des "difficultés qui augmentent plus la taille de la société augmente", précise l'étude.
Et si une nouvelle crise devait éclater, les entreprises resteraient confrontées à deux "fragilités structurelles importantes" : le niveau de trésorerie - 84% des TPE-PME qui ont contracté un PGE (Prêt garanti par l'État) n'ont pas encore commencé à le rembourser, 1 sur 3 considérant qu'elle aura même "du mal à le faire" - et l'anticipation des risques - les trois quarts des répondants admettent "ne pas avoir le temps et les ressources nécessaires" pour élaborer des "réponses adaptées" aux situations à risques, à l'image des cyberattaques.
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Avoir touché une aide ne rassure pas forcément sur l'avenir
Les entreprises les moins confiantes sont paradoxalement celles ayant bénéficié des dispositifs d'aide, comme le Fonds de solidarité ou le PGE. Les deux tiers des répondants à l'enquête déclarent avoir touché une aide financière ; plus précisément un PGE (54%, dont 16% seulement l'ont déjà remboursé), une allocation d'activité partielle (49%) ou encore le Fonds de solidarité (45%). Sont également assez peu optimistes, mais de manière plus logique cette fois, les structures ayant du mal à embaucher, ainsi que celles qui sont particulièrement exposées aux problèmes d'approvisionnement et aux hausses de prix qui vont avec - une inflation qu'elles seront d'ailleurs 84% à répercuter sur leurs prix de vente.
Sur le total de répondants, 17% affirment par ailleurs être concernés par le télétravail, essentiellement dans la finance et l'assurance, et pour les structures de plus de 20 salariés. Mais un bon tiers (38%) des entreprises pratiquant le télétravail indiquent cependant que "cette nouvelle organisation leur pose des difficultés".
Enfin, dans le détail des régions, ce sont les petites entreprises d'Île-de-France qui affichent le plus fort optimisme (82,6% d'entre elles sont positives sur leur avenir), suivies par celles de Bourgogne (82,3%) et des Pays de la Loire (81,9%). À l'inverse, les Hauts-de-France (75,9%), l'Occitanie (75,9%) et la Provence-Alpes-Côte-d'Azur (74,8%) sont un peu plus tempérées dans leur perception de l'avenir.