ENQUÊTE. Pratiques commerciales trompeuses voire agressives, sommations de payer invalides, demandes de frais illicites... La DGCCRF vient de publier les résultats de son travail de traque des anomalies rencontrées dans le cadre des pratiques de recouvrement amiable de créances. Huissiers de justice et sociétés de recouvrement sont dans le viseur.

Le secteur du recouvrement de créances à l'amiable (c'est-à-dire sans porter l'affaire devant les tribunaux) n'est pas exempts de tout reproches. C'est l'un des enseignements d'une enquête réalisée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Cinquante études d'huissiers de justice et 67 sociétés de recouvrement de créances ont été contrôlées par l'organisme, ce qui l'a amené à formuler 15 avertissements, 15 injonctions administratives et 10 procès-verbaux pénaux. Un tiers des sociétés visitées franchissaient donc la ligne jaune.

 

"Concernant les huissiers de justice, plusieurs manquements ont été relevés", expose la DGCCRF. "Par exemple, certains huissiers imposent au débiteur de payer des 'dommages et intérêts transactionnels' en plus de la créance principale sans les avoir négociés au préalable avec celui-ci ; d'autres facturent des 'sommations de payer', alors qu'aucune somme ne peut être réclamée au débiteur pour une telle prestation. Par ailleurs, l'information sur le prix de la mise en œuvre de la procédure simplifiée de recouvrement des petites créances n'est pas toujours délivrée."

 

Pratiques commerciales abusives

 

Quant aux sociétés de recouvrement de créances, elles utilisent "des courriers-types mentionnant des frais correspondant à une sanction pénale ou administrative et qui ne peuvent donc pas figurer dans une procédure de recouvrement amiable". De la pratique commerciale agressive, pour l'organisme.

 

 

En matière de pratiques commerciales trompeuses, la moisson de la DGCCRF a également été riche. "Certaines sociétés de recouvrement de créances entretiennent la confusion entre la phase de recouvrement amiable et la phase de recouvrement judiciaire : leurs courriers n'indiquent pas le fait qu'elles exercent dans le cadre d'une procédure amiable ou encore font référence à une procédure d'injonction de payer", indique par exemple la DGCCRF. Certains entités se permettent aussi de réclamer des frais de manière illicite comme s'il s'agissait de frais légaux exigibles, par exemple des dommages et intérêts.

 

Enfin, "certaines sociétés de recouvrement de créances facturent aux débiteurs des frais de recouvrement soit indus (frais de quittance, frais de mise en demeure, dommages et intérêts transactionnels) soit en les mentionnant sous de fausses dénominations (intérêts de retard)".

 


Créances inférieures à 4.000 euros : une pratique de la loi Macron encore peu utilisée

La loi Macron, votée en 2015, instaurait un dispositif permettant de faciliter l'obtention de créances inférieures à 4.000 euros. "Depuis le 1er juin 2016, un créancier peut s'adresser à un huissier de justice pour lui demander de mettre en œuvre une procédure de recouvrement amiable de créances simplifiée pour les dettes n'excédant pas 4 000 euros", détaille le site de l'Institut national de la consommation. "Celle-ci permettra au créancier d'éviter de devoir recourir au juge."

 

D'après la DGCCRF, cette pratique est pour l'instant peu utilisée. "En effet, compte tenu de ses obligations déontologiques, l'huissier de justice ayant établi le titre exécutoire permettant au créancier de poursuivre l'exécution forcée ne peut ensuite mettre en œuvre cette exécution forcée en cas d'échec du recouvrement amiable. Dès lors, c'est un autre huissier de justice que celui ayant initié le recouvrement amiable qui met en œuvre le recouvrement forcé. Cette procédure ne semble donc pas suffisamment attractive pour les professionnels visés."

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