LEGISLATION. Le Gouvernement prépare son projet de loi d'orientation des mobilités (LOM), un texte comprenant quelques dispositions particulières, comme celle de réserver la possibilité aux agglomérations de plus de 100.000 habitants d'instaurer un système de péage urbain. Une alternative jugée pertinente pour combattre la congestion des infrastructures et la pollution de l'air.
Elisabeth Borne, ministre des Transports rattachée au ministère de la Transition écologique et solidaire, doit porter le projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) voulu par le Gouvernement. D'après Les Echos, le texte est actuellement épluché par le Conseil d'Etat, avant d'être officiellement présenté en Conseil des ministres début novembre. Néanmoins, certaines dispositions ont déjà fuité, comme celle des péages urbains : concrètement, l'exécutif souhaiterait donner la possibilité aux agglomérations de plus de 100.000 habitants de mettre en place un système identique à celui déjà adopté par des métropoles européennes comme Londres, Rome ou encore Stockholm.
Onze métropoles françaises concernées
A l'échelle de l'Hexagone, ce sont onze agglomérations qui seraient concernées, selon l'Association des maires de France : Paris, Lyon, Marseille, Lille, Toulouse, Nice, Bordeaux, Nantes, Toulon, Grenoble et Douai-Lens. Les autorités organisatrices de mobilités (AO), généralement des communes ou des communautés de communes, pourraient instaurer puis gérer ces péages urbains, et ensuite en percevoir les recettes. Mais quel prix serait alors appliqué par les AO ? Le montant "est déterminé de manière forfaitaire pour chaque entrée dans la zone soumise au tarif", explique le projet de loi. "Pour les véhicules légers, ce montant est au plus égal à 2,50 €." En revanche, pour les autres catégories de véhicules, le tarif pourrait être multiplié par 4. Mais ces montants peuvent encore être doublés "dans des unités urbaines de plus de 500.000 habitants" (Paris, Lyon et Marseille), ce qui amènerait les usagers traversant ces villes à débourser 5 € pour un véhicule léger, et 20 € pour un véhicule lourd. Ce "tarif de congestion", perçu "lors du franchissement des limites d'un périmètre géographique déterminé", permettrait de "limiter la circulation automobile et [de] lutter contre la pollution et les nuisances environnementales", toujours d'après le texte gouvernemental.
Tarifs réduits voire gratuité pour certaines catégories d'usagers
Dans l'idée de l'exécutif, il n'y aurait pas besoin d'installer des barrières de péages à l'entrée des agglomérations. Le projet LOM reposerait sur un "téléservice", confiant aux usagers le soin de payer à l'avance, soit avec des forfaits journaliers, soit sur une durée plus longue. Pour le contrôle, plusieurs solutions technologiques sont à l'étude, à l'instar de caméras positionnées dans les centres urbains, qui permettraient de vérifier si les automobilistes se sont bien acquittés de leur obole. En même temps, le texte envisage la mise en place de tarifs réduits, voire de gratuité, pour certaines catégories d'usagers ou certaines circonstances spécifiques, "notamment ceux dont le domicile ou le lieu de travail est situé dans la zone soumise à tarif de congestion". De plus, les véhicules "d'intérêt général", autrement dit les services de secours comme les ambulances, ainsi que les véhicules assurant "un service public de transport", seront évidemment exonérés de péage.
Les exemples londonien et romain
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Le péage urbain est perçu par certains spécialistes de la question comme une solution intéressante et pertinente pour réduire les problèmes de congestion du trafic routier et pour limiter la pollution de l'air. Cette méthode a déjà été éprouvée dans d'autres métropoles européennes, comme Londres, Rome ou encore Stockholm. Dans le cas de la capitale britannique, la mise en place du "tarif de congestion" en 2003 a permis de remplir les caisses de la ville mais le reste du bilan est mitigé, comme l'explique France Info : les Londoniens versent quotidiennement 13 € ou 24 € (dans le cas où leur véhicule est considéré comme très polluant) pour traverser l'agglomération du lundi au vendredi, de 7h à 18h30. Les fameux "cabs", les taxis londoniens, en sont dispensés pour leur part. Des batteries de caméras sillonnent chaque rue du centre-ville et scannent chaque plaque d'immatriculation. Cependant, bien que le trafic entrant ait diminué de 30% depuis 15 ans, la pollution de l'air, elle, a au contraire augmenté. La faute à des transports en commun plus nombreux, et qui émettent davantage de CO2.
En revanche, les résultats sont bien plus satisfaisants à Rome : la capitale italienne a institué un péage urbain en 2001 sur une zone de 8 kilomètres, surveillée par 72 caméras. France Info précise que les rues du centre ne sont accessibles qu'aux usagers ayant acheté un laissez-passer, valable du matin au soir. Des agents sont positionnés à des postes de contrôle pour vérifier les plaques d'immatriculation, sachant que l'amende va de 45 à 300 €. Résultat : en 10 ans, le trafic routier quotidien de Rome aurait diminué de 40.000 véhicules, soit une baisse de 35% de la circulation, et un recul de 30% de la pollution de l'air. A noter : chez nos voisins transalpins, toutes les villes de plus de 100.000 habitants disposent de ZTL, ou Zones à trafic limité, dont l'objectif est notamment de protéger les centres historiques des effets néfastes de la congestion et de la pollution.