Pour l'heure, le gouvernement semble résolument opposé à l'exploitation des gaz de schiste. Delphine Batho, ministre de l'Environnement, fait traîner la nomination de la commission chargée d'évaluer les risques environnementaux liés aux techniques d'extraction et prévue par une loi de juillet 2011. Cette commission, insérée dans la loi interdisant la fracturation hydraulique - la seule technique permettant actuellement d'extraire les gaz de schiste - a été officiellement créée en mars 2012 et doit comprendre un député, un sénateur, des représentants de l'Etat, des collectivités territoriales, des associations, des salariés et des employeurs d'entreprises concernées. Elle doit se réunir au moins deux fois par an, selon le décret. Toutefois, si une autre technique était développée, permettant d'extraire les gaz et pétroles de schiste de façon moins dangereuse pour l'environnement, une reprise de la discussion serait possible. « A ce moment-là, on aurait un autre débat », prévient Delphine Batho. Mais pour elle, l'avenir, « l'après-pétrole », ne devrait pas être une recherche de nouveaux hydrocarbures, un principe qui irait à l'encontre de la réduction de la consommation énergétique défendue par les écologistes.
Le gaz de schiste, ou gaz de roche-mère, est un gaz d'origine naturelle engendré par la décomposition d'argile riche en matière organique (de 0,5 à 25 %) et extrait à partir de terrains marneux ou argileux. A l'inverse du gaz naturel, il est piégé dans les roches poreuses où il se forme, entre 1.500 et 3.000 mètres de profondeur, et il est nécessaire de fracturer ces roches pour pouvoir l'extraire. Le potentiel énergétique de ces gaz intéresse de nombreux pays d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Asie au moment où l'approvisionnement en gaz naturel devient plus cher.
La fracturation hydraulique est une technique, maîtrisée par les Américains, qui consiste à casser la roche à l'aide d'un mélange d'eau sous pression, de sable et de produits chimiques. Le forage, horizontal au niveau du gaz, permet de faire remonter le mélange en surface par le puits. Mais l'exploitation industrielle des gaz de schiste soulève également la question de son impact environnemental et sanitaire. La fracturation hydraulique accroitrait les risques sismiques dans les régions concernées et des problèmes de pollution de la nappe phréatique par les produits chimiques employés comme additifs (biocides contre la prolifération bactérienne dans le puits et le fluide, lubrifiants pour favoriser la pénétration de sable dans les micro-fractures, détergents pour augmenter la désorption de gaz et la productivité du puits). Une association de médecins (ASEF) a notamment dénoncé les techniques de forage employées et les produits utilisés qui présenteraient des risques pour la santé humaine, en étant toxiques ou cancérigènes. Les roches souterraines fracturées libéreraient également, outre le gaz de schiste, des métaux lourds ou de la radioactivité naturelle.
En France, deux territoires détiennent des hydrocarbures de roche-mère : le bassin parisien et le quart sud-est. Le premier, où la connaissance géologique est avancée, notamment grâce aux forages pétroliers, renfermerait des huiles de schiste, tandis que la zone sud-est, où ces connaissances sont moins précises (plissements, formations karstiques, failles mettant en relation les aquifères), disposerait de gisements de gaz de schiste. Le pays serait considéré, avec la Pologne, comme le pays européen ayant le meilleur potentiel.