ANALYSE. L'offre des solutions pour les constructions intelligentes n'est pas encore structurée. Ces produits restent encore l'apanage de précurseurs et ne sont pas entrés dans une phase de consommation de masse. Le cabinet Xerfi-Precepta publie une étude sur le sujet.

En 2017, Guillaume Retour de Xerfi-Precepta, estimait : "Les contours du smart building se précisent". Il était l'auteur d'une étude sur le sujet qui, en substance, évoquait ce marché comme un segment en devenir. Un an et demi plus tard, Thibaud Brejon, autre analyste du même cabinet, en est au même point. Dans une nouvelle étude intitulée "Les grands défis des acteurs des smart buildings - Leviers de croissance et nouveaux jeux relationnels", il note qu'il s'agirait d'un marché prometteur… mais encore en devenir. Moins téméraire que son prédécesseur, qui chiffrait à 2 Mrds € le marché européen en 2017, Thibaud Brejon concède : "Le marché du bâtiment intelligent est aujourd'hui difficile à quantifier. La faute à l'absence de suivi statistique en France et aux difficultés à estimer deux ou trois briques intelligentes qui le composent (équipements électriques pour intégrer le bâtiment tertiaire à un smart grid, et NTIC pour le piloter)".

 

 

Conclusion : seul le marché de la gestion technique des bâtiments (GTB) est à ce jour bien connu. Il se porte bien même, avec une croissance forte en 2018 (+3,5 %) mais son volume est bien loin des milliards d'euros promis, puisqu'il n'est que de 75 M€ en France. Sur l'autoconsommation tertiaire, l'étude de Xerfi précise : "Elle est encore limitée, malgré des appels d'offres stimulant la création d'installations photovoltaïques en particulier sur les toitures des hypermarchés". Quant aux solutions communicantes pour les bâtiments, elles ont eu "un impact marginal sur la baisse de consommation énergétique". Tout reste donc à faire. Et l'expert Xerfi l'assure : le bâtiment intelligent devient peu à peu une réalité en France. Même si, pour l'heure, il n'est porté que par un cercle restreint "d'early adopters" qui les déploient sur quelques programmes pilotes…

 

Structurer l'offre par la fédération des acteurs

 

 

Alors comment massifier le nombre d'opérations de smart buildings ? Xerfi recommande l'interopérabilité des offres, avec des équipements de différents industriels qui devront malgré tout être compatibles. En 2017 déjà, l'étude précédente donnait les exemples des protocoles KNX, LonTalk et BACNet, utilisés dans la gestion technique des bâtiments et les installations domotiques. Et elle pointait également la limite de la sécurisation des données recueillies, que mentionne l'étude de 2018 : "Protéger les données des bâtiments et des opérateurs est une nécessité. C'est d'autant plus vrai qu'avec l'augmentation des objets connectés et la communication des offres entre elles, la vulnérabilité des infrastructures numériques n'a jamais été aussi élevée". Selon Thibaud Brejon, l'offre globale, encore peu lisible et trop complexe, doit se structurer, notamment par des relations partenariales entre différents acteurs. Ce que son prédécesseur nommait "co-innovation" se transforme chez lui en "coopétition", mais l'idée reste que la concurrence frontale traditionnelle s'estompera "car aucun opérateur ne dispose en interne des multiples compétences nécessaires pour construire une offre globale". Et il entrevoit que plusieurs familles d'entreprises pourraient jouer les premiers rôles : les grands groupes de BTP tout d'abord, qui adopteront une posture d'ensemblier lors de la construction d'éco-quartiers. Les fabricants de matériels et d'automatismes ensuite, qui disposent de fortes capacités d'innovation et d'expérience en matière de GTB, et qui intègrent des capacités d'audit, de conseil et d'installation. Les autres opérateurs enfin, énergéticiens ou du Web, dont le rôle, plus vague, sera de "jouer les complémenteurs critiques". En définitive, rien n'est encore joué dans le monde des smart buildings.

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