Dans son rapport rendu public ce mercredi 8 avril, la Cour des comptes s'inquiète notamment des incohérences de l'attribution des logements sociaux franciliens et épingle également les aides à l'investissement locatif. Elle estime que ces dispositifs sont assortis d'un "zonage grossier". Au total, 14 propositions ont été formulées par les magistrats. Découvrez lesquelles.
Un nouveau coup de balai sur les logements sociaux franciliens mais aussi sur les aides à l'investissement locatif. La Cour des comptes a rendu public, mercredi 8 avril, son rapport consacré au logement en Ile-de-France dans le but de donner de la "cohérence à l'action publique". Les magistrats de la rue Cambon y constatent les limites des politiques menées depuis deux décennies dans trois domaines majeurs : l'aménagement, qui encadre et conditionne la production de logements, le logement social et le logement privé.
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"Au final, l'amélioration de la situation du logement en Île-de-France n'est pas seulement une question d'effort financier : il importe tout autant que les interventions publiques soient mieux organisées, mieux ciblées et surtout plus cohérentes", signale la Cour des comptes dans un communiqué.
Un impact limité des politiques d'aménagement sur la production de logements
Tout d'abord, la Cour constate que "les instruments de planification ou les interventions foncières ont eu une efficacité limitée, notamment parce qu'il est difficile d'obliger à construire." En matière de planification, les objectifs de construction de logements fixés dans le schéma directeur de la région d'Île-de-France (Sdrif) n'ont jamais été réalisés. Pour atteindre l'objectif actuel de 70.000 logements par an, il faudrait, d'après la Cour, "augmenter de deux tiers le rythme de construction." Un rapprochement du périmètre des futures intercommunalités franciliennes et de celui des divers instruments de planification, de programmation et de contractualisation de l'offre de logement est donc nécessaire, signale l'institution. Il serait également cohérent qu'"après les programmes de l'habitat et les plans d'urbanisme, ces intercommunalités deviennent à terme compétentes pour délivrer les permis de construire."De plus, il est "indispensable d'exploiter toutes les possibilités foncières, notamment dans des zones comme les villes nouvelles, pas entièrement terminées et plus abordables qu'en centre d'agglomération, où la construction n'est souvent possible qu'après destruction du bâti existant." S'agissant des opérateurs, les outils d'aménagement, après une période de moindre dynamisme, connaissent une évolution qui va dans le bon sens, avec la fusion des quatre établissements publics fonciers. Enfin, la fiscalité locale et celle des plus-values immobilières sont actuellement trop favorables à la rétention foncière.
Logement social : des résultats insuffisants
La Cour constate à la fois la forte réorientation, à partir de 2010, de l'effort de l'État en direction de l'Île-de-France et le poids conséquent des autres financeurs, tels que les collectivités territoriales. Les effets des interventions publiques sont toutefois mitigés, du fait du coût très élevé des opérations, notamment à Paris, rappelle le rapport.Bilan de la loi SRU en "demi-teinte"
Confrontés à la diminution des aides et au coût élevé de construction des logements, les bailleurs franciliens ont tendance, pour équilibrer leurs opérations, à privilégier les logements du type prêt locatif social (PLS), assortis des niveaux de loyers les plus élevés, au détriment des logements de types PLAI et prêt locatif à usage social, accessibles aux plus modestes. Ainsi, au cours de la période 2005-2012, en Île-de-France, l'agrément des PLS l'a emporté sur les PLAI, qui correspondent pourtant aux logements sociaux les plus demandés. Par ailleurs, le bilan de la mise en œuvre de l'article 55 de la loi SRU en Île-de-France est en "demi-teinte", déplore le document.Autre point évoqué : l'objectif renforcé de la loi "SRU 2" de janvier 2013 (25 % de logements sociaux au lieu de 20 %) ne corrige pas les imperfections du système, et risque de les amplifier.
Les dispositifs d'aides à l'investissement locatif dans le viseur
"La lutte contre la vacance des logements connaît de faibles résultats en raison de l'impact limité, voire nul, de la taxe sur les logements vacants ou de la politique de réquisition", tranche la Cour. S'agissant des aides fiscales, qui représentent un coût élevé, la Cour relève l'importance des effets d'aubaine liés à leur zonage "grossier" et "insuffisant" sur les besoins de logements intermédiaires en zones tendues. Avant d'enfoncer le clou : ces dispositifs d'aides sont "insuffisamment évalués" et n'ont pas eu l'effet attendu de modération des loyers.Quant à l'accession à la propriété principalement stimulée par les prêts à taux zéro, leur affectation à près de 80 % à l'acquisition dans l'ancien a "soutenu la hausse des prix sans réussir à déclencher un renouvellement de l'offre en construction neuve : les décisions de réserver les aides au neuf depuis le 1er janvier 2012, sous conditions de ressources, semblent donc aller dans le bon sens", conclut la Cour avec cette fois-ci une petite lueur d'optimisme.
La Cour formule 14 recommandations, visant notamment à confier aux établissements publics de coopération intercommunale la délivrance des autorisations de construire. En voici, les autres suggestions :