L'entrepreneur qui construit par erreur sur le terrain du voisin doit en assumer les conséquences, faute d'avoir lui-même vérifié la limite de la propriété. C'est ce que vient d'indiquer un arrêt de la Cour de cassation en date du 11 juillet 2012. Explications avec Ganaëlle Soussens, avocat à la cour, spécialisée en droit de la construction.
Un maçon, qui a construit son mur sans se renseigner sur la limite de propriété, prend le risque d'assumer la démolition et la reconstruction au bon endroit. C'est, en résumé, ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt du 11 juillet 2012.
Dans cette affaire, le maître d'ouvrage a dû démolir la partie du mur qu'il venait de faire construire et qui empiétait sur le fonds voisin. Le maître d'ouvrage a alors entrepris de rechercher la responsabilité du maçon qu'il avait chargé de la construction du mur litigieux. Précision importante : le marché indiquait sans ambigüité qu'il s'agissait de construire un mur de clôture en limites séparatives.
La Cour d'appel de Pau a refusé de condamner le maçon aux motifs :
- qu'il avait agi conformément aux « instructions du maître de l'ouvrage » ;
- et « n'est pas tenu d'une obligation d'information juridique ou de mise en garde sur les limites séparatives du fonds sur lequel il doit édifier un mur de clôture ».
Une décision de bon sens, et pourtant…
En effet, c'était là le bon sens. Bon sens que la Cour de cassation vient malmener en indiquant que le maçon ne pourra être exonérer de toute responsabilité, qu'en démontrant qu'il a « pris la précaution de s'enquérir de l'emplacement de (la) limite » de propriété.
Cette jurisprudence, même si elle paraît devoir d'application limitée, pourrait être étendue à nombre d'ouvrages dont la construction, la rénovation, l'extension sont assorties de contraintes juridiques.
Dans ces situations, évidemment innombrables, l'entrepreneur se trouvera contraint de s'inquiéter de l'existence et de l'étendue des droits dont dispose le maître d'ouvrage : droit à construire, droit de propriété, etc., sauf à risquer de devoir supporter - totalement ou partiellement - les conséquences de l'erreur sur ses propres droits que commettrait le maître d'ouvrage. Une telle obligation se trouvera sans doute atténuée si un maître d'œuvre est présent sur le chantier.
L'on ne peut néanmoins que recommander aux constructeurs de prendre la précaution d'interroger le maître d'ouvrage sur l'existence et les limites de ses droits et surtout, de se ménager et de conserver la preuve de cette démarche.