Réduit au dixième de sa surface originelle, le lac Tchad se meurt en Afrique. Un architecte camerounais a donc imaginé un système pour le sauver et permettre à ses millions de riverains de survivre avec lui. Découverte.
Entre les années 1960 et le début des années 2000, le lac Tchad, véritable poumon d'une région désertique partagée entre quatre pays (Tchad, Cameroun, Nigeria, Niger) est passé de plus de 25.000 km² en moyenne à moins de 2.000 km². Dans le même temps, la population installée sur ses rives a doublé pour dépasser les 20 millions d'âmes. Les prélèvements accrus pour l'irrigation des cultures dans ce milieu aride et les barrages installés sur les fleuves en amont ont drastiquement diminué les apports en eau douce et fait chuter la profondeur moyenne, au point de rendre la navigation impossible. Face à cette situation, divers projets ont été échafaudés, dont le creusement d'un canal entre le bassin du lac et le fleuve Oubangui, situé en Centrafrique à 1.350 km de là…
L'architecte camerounais Hermann Kamte a eu une autre idée : celle d'utiliser les eaux du golfe de Guinée - en les dessalant - pour faire remonter le niveau du lac. Mais loin de se limiter à une simple question de pompage et réinjection d'eau de mer, il a prévu un ensemble d'activités autour d'un point central, matérialisé par une île artificielle, baptisée "The Forgotten - Dead or Alive". Elément principal, une conduite d'adduction d'eau amènera l'eau depuis la côte Atlantique du Cameroun jusqu'à destination. Sur place, la structure implantée sur le lac se chargera de la filtrer et de la traiter avant de la déverser dans le milieu. Un centre d'études des eaux sera également implanté dans l'île, afin d'aider à mieux comprendre l'écologie du lac et d'accélérer sa reconstitution. Il est espéré qu'une meilleure gestion des ressources permettra de se passer du dispositif de pompage d'eau de mer à l'horizon de 2080.
Tout un projet lacustre
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L'île artificielle n'oubliera personne, puisqu'un dispensaire sera prévu pour les populations du lac. Il est aussi envisagé que l'endroit serve de… base de loisirs nautiques pour attirer du tourisme et générer des revenus dans l'économie locale. Sur les rives, des projets de plantations d'arbres et d'irrigation raisonnée des cultures sont également envisagés. Subsistent deux questions : tout d'abord celle de la complexité technique de la réalisation d'une canalisation sur plusieurs centaines de kilomètres afin d'acheminer de l'eau de mer jusqu'au cœur du continent. La seconde est celle du financement par les pays riverains du lac et par d'éventuelles aides internationales. Rappelons que dans le même ordre d'idée, la Jordanie prévoit de ressusciter la mer Morte au moyen d'un pipeline acheminant de l'eau de la mer Rouge. Un projet de moindre envergure puisque la distance à couvrir n'est "que" de 180 km, que la gravité facilitera l'écoulement et que l'eau ne sera évidemment pas dessalée…