Alors que l'Ile-de-France se prépare à revivre dès ce lundi - en exercice - une crue centennale, l'Institut d'aménagement d'urbanisme (IAU) estime qu'une crue identique à celle de 1910 affecterait 435.000 logements, soit l'équivalent de 8 % du parc francilien. Quelles sont les principales caractéristiques de cette exposition et les évolutions observées ? Eléments de réponses.

Alors qu'à partir de ce lundi, un exercice de gestion de crise baptisé "EU Sequana 2016" simulera une inondation majeure en Ile-de-France, l'Institut d'aménagement d'urbanisme (IAU) vient de dévoiler plusieurs études sur les conséquences d'une nouvelle crue centennale dans le domaine du logement.

 

Le tableau du scénario catastrophe serait accablant : habitations inondées, commerces détruits, un million de personnes sans eau chaude et électricité, 500 kilomètres carrés sous l'eau et deux points de PIB en moins… Sans compter Maisons-Alfort presque totalement englouti, comme une bonne partie du Val-de-Marne. A Paris, les 12ème, 7ème et 15èmes arrondissements seraient les plus submergés. Et aucun pont ne serait encore utilisable entre La Défense et Gennevilliers.

 

23,3 millions de m² de surfaces habitables potentiellement exposées aux inondations par débordement, soit 8 % du parc francilien

 

"Ce sont environ 435.000 logements dont environ 8 % du parc du francilien, totalisant 27,3 millions de m² de surfaces qui sont aujourd'hui exposés à une crue d'occurrence centennale, relève Ludovic Faytre, chargé d'études à l'IAU Ile-de-France. Sur les 435.000, ce sont 120.000 logements qui auraient directement les pieds dans l'eau…"

 

Autre caractéristique : la forte exposition au niveau de l'aléa. Près de 48% des logements, soit 205.000, sont exposés à des niveaux d'aléas forts et très forts, c'est-à-dire à des hauteurs de submersion entre 1 m et 2 m ou supérieures à 2 m, poursuit le chargé d'études à l'IAU.

 

Parmi les plus grandes entreprises susceptibles de subir des aléas "forts à très forts", se trouvent le siège de la RATP, des dépôts SNCF, l'hôpital Georges-Pompidou, le ministère des Finances, la Caisse des dépôts et consignations... mais aussi de grandes entreprises privées, détaille l'Institut.

 

Nombre de logements localisés en 2009 en zones inondables
En Ile-de-France, le nombre de logements localisés en 2009 en zones inondables. © DGFIP, IAU Ile-de-France
"Le Val-de-Marne, le territoire le plus menacé"

 

Par ailleurs, les études de l'IAU démontrent que les logements concernés s'inscrivent essentiellement dans les lits majeurs de la Seine (81 %) et de la Marne (15 %). "A noter que le Val-de-Marne est le territoire le plus menacé, avec plus de 123.000 logements en zone inondable, suivi de Paris (107.700) et des Hauts-de-Seine (94.450)", souligne l'IAU dans ses analyses.

 

Dans le Val-de-Marne, près de 80% des logements localisés dans ces zones d'aléas (95.700 logements), devant l'Essonne (50,7% de logements exposés à ces niveaux d'aléas, 18.300 logements concernés). En revanche, la Seine-Saint-Denis, beaucoup moins exposée au fleuve, ne serait concernée qu'à hauteur de 11.700 logements.

 

Ainsi, une quinzaine de communes comptent plus de 10.000 logements en zone inondable, essentiellement en petite couronne : trois arrondissements parisiens (15ème, 12ème, 7ème), Alfortville, Asnières, Ivry, Gennevilliers, Créteil. En grande couronne, Chelles serait la seule commune à dépasser le seuil, affirme l'IAU.

 

"A noter que la place occupée dans le 15ème s'explique notamment par l'implantation de plusieurs immeubles de grande hauteur (IGH) à vocation d'habitat sur les berges de Seine, dans le quartier Beaugrenelle", ajoute l'organisme.

 

 

De plus, l'IAU, rappelle qu'en termes d'occupation du sol, les espaces strictement dédiés à l'habitat occupaient en 2008, 13,1% des zones inondables d'Île-de-France, soit plus de 6.000 ha. "Ce taux augmente ainsi sensiblement en petite couronne, où les zones d'habitats représentent plus de 35 % des surfaces exposées, la quasi-totalité des zones inondables se trouvant par ailleurs urbanisée", indique l'IAU. Tout en précisant, qu'"à l'échelle régionale, ces 6.000 ha se répartissent à 70 % dans de l'habitat individuel et 30% dans de l'habitat collectif."

Protéger la voie publique parisienne

Enfin, si le système des ouvrages de protections (digues, batardeaux...) développé par la ville de Paris pourrait théoriquement protéger la voie publique parisienne d'une inondation par débordement jusqu'au niveau de la crue de 1910, les autres territoires de l'agglomération centrale paraissent beaucoup plus vulnérables, estime l'étude de l'IAU.

 

Avant de dresser le bilan suivant : "Au regard des ouvrages de protection existants (niveau des murettes de protection inférieur au seuil de la crue centennale), le Val-de-Marne ressort là encore comme le territoire le plus sensible à une inondation majeure."

 

En termes économiques, une telle crue coûterait entre 17 et 20 milliards d'euros pour les dommages directs, pour moitié imputés à l'habitat, et plus du double en tenant compte de la dégradation des réseaux et des pertes d'exploitation des entreprises, conclut l'IAU.

 

Face à une crue majeure, "les activités économiques sont très vulnérables", insiste l'Institut : endommagement ou paralysie de l'outil de production, inaccessibilité de l'entreprise, interruption d'approvisionnement..." Les dépendances multiples (énergie, systèmes de communication, transports, logistique...) constituent des facteurs de fragilité supplémentaires".

 

En attendant cette éventuelle crue historique, le lancement des opérations de simulation se fera ce lundi matin à la Maison de la radio en présence du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve et du préfet de police de Paris Michel Cadot. Le scénario prévoit une montée des eaux quotidienne de 50 cm pour atteindre plus de 8 mètres…

 

 

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