Les célèbres barrages du Lesotho sont devenus une sérieuse affaire judiciaire. Le groupe canadien Acres International a été condamné pour corruption, quatre ans après l'inauguration de la structure hydraulique.

Ancienne colonie britannique perdue au milieu du pays des Boers, le Lesotho, comme le Swaziland, constitue une enclave stratégique. Ses fleuves irriguent l'Afrique du Sud, pays vaste et aride en certaines régions. La chute des extractions de diamants a fait de l'eau l'une des rares richesses de ce pays. L'eau des hautes terres devient un produit d'exportation: le détournement de la haute Sengu vers l'Ash, par plus de 100 km de tunnels, a permis la construction, en Afrique du Sud, de trois centrales électriques et l'extension des périmètres irrigués, mais le contrat, négocié avant la fin du régime d'apartheid, est peu avantageux pour le Lesotho. La nature, peu clémente pour ce pays-refuge des Sothos, a toutefois laissé les profonds bassins, qui longe le Drakensberg, la chaîne de montagne qui sépare les eaux du plateau de l'Orange et constitue la meilleure protection de ce pays longtemps convoité.

Détourner les eaux du Lesotho pour alimenter les mégalopoles Pretoria et Johannesburg, situées au Nord du pays, était prévu. Trois projets ont été réalisés. Le premier était la construction du barrage de Katse, confiée à la société italienne Impregilo, en vue de constituer un énorme réservoir de 1,95 milliards de mètres cubes sur une quarantaine de kilomètres de long. Dans ce lac artificiel, un consortium baptisé Lesotho Highlands Project Contractor (LHPC) a construit une prise d'eau, c'est-à-dire un tunnel de 45 km de long, alimentant un deuxième réservoirs situé plus au nord. Enfin, un troisième barrage et trois autres tunnels ont été construits par le tandem Impregilo-Hochtief.

Le groupement était piloté par Spie Batignolles, associé à Campenon Bernard SGE, aujourd'hui Vinci Construction, au britannique Balfour Beatty, à l'allemand Züblin et au sud-africain LTA. Accusées de corruption, plusieurs sociétés sont aujourd'hui devant les tribunaux. La société canadienne d'ingénierie Acres International vient pour sa part d'être condamnée, le 28 octobre, à une amende de plus de 2,2 millions de dollars par la Haute Cour du Lesotho. Elle a été reconnue coupable d'avoir versé, dans les années 1990, à Masupha Sole, alors maître d'ouvrage, une enveloppe de 436.000 dollars afin d'obtenir une partie des marchés sur un chantier estimé à plus de deux milliards de dollars.

Musapha Sole, qui était à l'époque PDG de Lesotho Highlands Development Authorities, a été condamné en juin à 18 ans de prisons. Il a décidé de faire appel. Le juge Mahapela Lehohla a déclaré, après avoir rendu son verdict contre la firme canadienne : " La Cour veut envoyer le clair message que les sociétés recherchant des contrats feraient mieux de ne même pas envisager d'essayer de corrompre des officiels ".

Le juge a avancé qu'à sa connaissance, " c'est la première fois qu'une firme multinationale (opérant) dans un pays en développement a été condamnée pour corruption d'un officiel public. Les montants sont stupéfiants et beaucoup de tort a été causé au Lesotho. "

D'autres procédures sont en cours à l'encontre d'entreprises européennes.

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