Alors que Manuel Valls a demandé ces jours-ci aux collectivités locales de "mieux maîtriser l'évolution des dépenses de gestion", affirmant qu'elles ne devaient pas augmenter "à nouveau de 3 %", ces dernières menacent de réduire de plus de 10 % leurs projets d'investissements en 2015. Décryptage avec André Laignel, maire d'Issoudun (Indre) et président du Comité des finances locales (CFL).
"Il n'est pas tenable que les dépenses des finances locales augmentent à nouveau de 3 % en 2013, c'est-à-dire le même niveau depuis 3 ans", a déclaré la semaine dernière le Premier ministre, selon une copie de son discours à La Rochelle, lors du rassemblement à huis clos des élus de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains (FNESR).
Et au chef du Gouvernement de poursuivre : "Je demande donc aux collectivités locales de mieux maîtriser l'évolution des dépenses de gestion, notamment par la mutualisation des services."
Les dotations au cœur des préoccupations
C'est dans ce contexte tendu sur le sujet des dotations que le Comité des finances locales (CFL) s'est remis au travail ces jours-ci pour reprendre les dossiers inachevés en juillet dernier. Au programme : l'évolution de la péréquation sur fond de réforme territoriale et de baisse des dotations de 11 milliards d'euros à absorber sur 2015, 2016 et 2017, dont les modalités de répartition entre les différents niveaux de collectivités doivent également être fixées.Toutefois, avant d'évoquer le sujet des modalités de répartition, le CFL et les associations d'élus, avec l'Association des maires de France en tête, demandent à l'Etat de revoir le montant et l'étalement dans le temps de cette ponction sur leurs ressources.
"Après avoir reporté cette réunion importante pour le sort des collectivités locales, nous devrions rencontrer en principe le 11 septembre prochain les ministres lors des Assises de l'investissement, c'est-à-dire Michel Sapin, le ministre des Finances, Marylise Lebranchu (Décentralisation et fonction publique), Christian Eckert (Budget) et André Vallini (Réforme territoriale), prévues quelques jours avant les arbitrages sur le projet de loi de finances et le Conseil des ministres du 23 septembre", signale à Batiactu André Laignel, maire d'Issoudun (Indre) et président du Comité des finances locales.
L'enjeu est d'importance, insiste le président du Comité des finales locales. "Nous sommes tout de même responsables de 70 % des investissements publics à l'échelle locale, départementale ou régionale et à ce rythme-là les élus vont décélérer les investissements en infrastructure urbaine, voiries, équipements sportifs par exemple", poursuit-il.
Avant d'avertir : "En s'appuyant sur les derniers chiffres de La Banque Postale, nous anticipons, effectivement, 6 % de baisse des investissements en 2014 et plus de 10 % l'an prochain, ce qui représente tout de même 3 milliards d'euros par an."
L'inquiétude se fait déjà ressentir du côté des organismes de prêt aux collectivités, qui s'attendent à une baisse de près de 30 % des demandes de financement, ajoute l'élu.
Des coupes à prévoir !
Autre exemple : "Cette coupe du budget dédié à l'investissement sera effective par exemple dans ma commune à Issoudun, où je pense de réduire 20 à 30 % mes projets à l'image du report de la rénovation du complexe sportif."
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Les solutions pour rétablir la confiance des élus décidés à investir ne sont pas nombreuses. Le renforcement du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) appuyé par l'Association des maires de Frances (AMF) irait dans le "bon sens", confirme le Comité de finances locales. "Ce dispositif rembourse, en effet, aux collectivités la TVA qu'elles payent sur leurs investissements, précise André Laignel. Ce serait une bonne idée mais il n'est théoriquement remboursé que deux ans après l'investissement de la collectivité. D'ailleurs, certains élus suggèrent d'étendre ce remboursement à toutes les communes. A voir."
Enfin, le Comité des finances locales (CFL) défend particulièrement un FCTVA renforcé avec le fléchage d'une partie de la baisse de dotation vers ce fonds. "Tout devrait se trancher lors de la réunion majeure du 11 septembre, conclut l'élu. C'est l'investissement qui est en jeu et notamment toutes les conséquences désastreuses chez les acteurs à l'image de la FNTP dans les travaux publics. Bruno Cavagné, président de la FNTP m'a d'ailleurs rappelé récemment : si la relance n'est pas à l'ordre du jour, c'est 60.000 emplois menacés. Le Gouvernement doit en avoir conscience." Affaire à suivre.