RÉACTIONS. Au surlendemain des arbitrages sur la prochaine Réglementation environnementale 2020, les réactions continuent à s'enchaîner : les professionnels de la maintenance et des services en efficacité énergétique critiquent vertement, aux côtés de la filière du chauffage à eau chaude, le texte présenté. À l'inverse, l'Association pour les pompes à chaleur juge qu'il répond à l'urgence du changement climatique.
Il y avait fort à parier que les arbitrages sur la Réglementation environnementale 2020 présentés par le Gouvernement ce 24 novembre n'allaient pas laisser les (nombreux) acteurs du secteur de la construction indifférents. Au surlendemain de cette annonce, les réactions des organisations professionnelles continuent de s'enchaîner, aussi bien pour souligner l'aspect positif que l'aspect négatif des mesures dévoilées. Ainsi, les adhérents du Syndicat national de la maintenance et des services en efficacité énergétique (Synasav, membre de la Fédération des services énergie et environnement - Fedene) ont massivement interpellé leur président fraîchement élu, Roland Bouquet, sur le contenu du texte, lui faisant part de leurs interrogations voire de leur "choc". Ce à quoi le responsable de l'organisation leur a répondu ce 26 novembre dans une lettre ouverte que, "tant sur le fond que sur la forme, les acteurs de la filière gaz, et en particulier le Synasav, [sont] restés cois devant tant de précipitation et d'annonces prématurées".
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Un "changement de cap à 180°" qui interroge
Le syndicat, qui interprète "ce changement de cap à 180°" comme "de l'incohérence", estiment en outre que les professionnels qu'ils représentent sont "malmenés" par la version actuelle de la RE2020, affirmant que la filière s'est organisée depuis longtemps pour promouvoir et optimiser les solutions gaz, dans une logique de décarbonation du pays. "Les industriels ont développé des générateurs sans cesse plus performants. Les entreprises ont fait monter en compétences leurs équipes techniques pour installer et maintenir des appareils sans cesse plus efficients, proposant aux utilisateurs des solutions de confort sans cesse plus économes et accessibles. Les énergéticiens développent des solutions bio-méthanes pertinentes qui ont toutes leur place comme de futurs vecteurs clés de la transition énergétique", plaide Roland Bouquet.
Et de pointer la délicate problématique du fameux pic de consommation électrique, notamment en période hivernale, ainsi que la date de ces arbitrages, s'interrogeant : "Le moment était-il vraiment bien choisi pour faire de telles annonces à la filière gaz ? Dans un contexte économique à l'équilibre rompu par les conséquences des confinements successifs, et alors que les chefs d'entreprises se doivent de rivaliser d'imagination au jour le jour pour maintenir coûte que coûte leurs activités et les emplois, on leur annonce quoi ? Qu'un pan complet de la filière gaz va disparaître en 2021 ?" Les entreprises spécialisées dans l'efficacité énergétique et dans la maintenance des systèmes de chauffage - majoritairement des chaudières gaz - sont donc appelées à faire preuve d'adaptation, en continuant à se former pour assurer l'entretien des pompes à chaleur (Pac), des ventilations et des climatisations. Si "ce nouveau défi" est perçu comme "porteur de grands changements", il devrait aussi être "générateur de nombreuses opportunités" pour le Synasav.
Une "décision abrupte" qui menace la relance économique
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L'incompréhension est également de mise chez les professionnels du chauffage à eau chaude, représentés par l'organisation Énergies & Avenir. Dans un communiqué, celle-ci tire la sonnette d'alarme sur les conséquences "sous-estimées" de la RE2020 sur sa filière, de surcroît lors de la crise économique actuelle. Regrettant la "décision abrupte" d'exclure les solutions gaz des logements individuels, les entreprises du secteur soulignent que la boucle à eau chaude permettant d'intégrer la chaleur renouvelable s'en trouve ainsi rompue. "La filière du chauffage à eau chaude est non seulement engagée pour l'efficacité énergétique mais est aussi un pilier de la relance économique française", abonde le président d'Énergies & Avenir, Philippe Méon. "C'est une filière qui représente plus de 300.000 emplois non-délocalisables et repose sur un réseau de plus de 80 usines dont plusieurs tournées vers l'export", notant au passage que "près de 100% de ces équipements sont fabriqués en France".
Dans le secteur, on s'interroge en outre sur les méthodes de calcul de la performance énergétique imposées dans le texte : "La première étape fondamentale était de conserver un coefficient de conversion de l'électricité (Pef) et un contenu carbone du chauffage électrique représentatifs du mix électrique - plutôt que des valeurs spéculées et sous-estimées - qui permettent de valoriser les équipements les plus performants et d'écarter d'office l'effet Joule qui est irréversible", estime Philippe Méon. Là encore, les doutes et les craintes se focalisent sur la hausse de la consommation d'électricité non-renouvelable ainsi que sur le risque de pointe électrique. Afin de "rectifier" ces orientations, l'organisation demande donc aux pouvoirs public de soutenir les solutions hybrides combinant gaz et électricité, lesquelles "permettent de respecter les performances énergétique et climatique pour offrir une alternative au tout-électrique". En outre, les professionnels du chauffage à eau chaude appellent à "une meilleure prise en compte des équipements permettant le développement de la chaleur renouvelable, notamment ceux fonctionnant aux gaz renouvelables".
La filière des Pac salue le texte et met en avant ses technologies