SECURITE SOCIALE. Si elle se déroule relativement bien, la transformation du Régime social des indépendants (RSI) en Sécurité sociale des indépendants (SSI) ne va pas sans quelques anicroches. En période d'épidémie de la covid-19, certains indépendants ont ainsi connu des difficultés pour le versement des indemnités journalières maladie et maternité.
Le Régime social des indépendants (RSI) a disparu, remplacé progressivement par la Sécurité sociale des indépendants (SSI). Si la transformation semble s'effectuer sans difficultés majeures, de premiers dysfonctionnements se font jour depuis le début de l'année 2020, comme on peut le lire dans le rapport du Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) publié ce 24 septembre 2020. Le hasard a voulu que ce soit précisément durant la période, déjà difficile, du confinement que ces problèmes aient affleuré. "Beaucoup de travailleurs indépendants ont été particulièrement en difficulté [durant cette période], du fait tant du niveau de leur protection sociale (pas d'indemnités journalières pour une partie d'entre eux, pas d'indemnisation économique des pertes de gains...), que de leurs conditions d'accès au service public", note le Haut conseil.
"Tout le monde est sur le pont pour mettre fin à ces difficultés"
"Concernant le passage du RSI à la SSI, nous ne rencontrons pas de difficultés majeures, nous constatons même des avancées sur la vieillesse et le recouvrement", estime Sophie Duprez, présidente du Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI), contactée par Batiactu. "Mais nous déplorons tout de même de gros problèmes avec l'assurance maladie." Quels sont-ils ? Tout d'abord, un manque de mise à jour du site internet de la SSI, où un indépendant ne peut toujours pas, à ce jour, savoir quels sont ses droits. "Il y a eu, par ailleurs, ces derniers mois, des difficultés sur le versement des indemnités journalières maladie et maternité", continue Sophie Duprez. "Cela serait lié au fait que l'assurance-maladie applique la réglementation de façon beaucoup plus stricte que ne le faisaient les organismes conventionnés." A cela sont aussi venus s'ajouter des bugs informatiques aboutissant au rejet de 10 à 30% des indemnités journalières des travailleurs indépendants. Le CPSTI reprend actuellement les dossiers l'un après l'autre de manière à démêler chaque situation. "Tout le monde est actuellement sur le pont pour mettre fin à ces difficultés, et l'administration nous dit qu'une solution devrait être rapidement trouvée", assure la présidente du conseil.
Ces difficultés, assure le Haut conseil, "montrent néanmoins qu'une vigilance doit être maintenue dans la prise en charge des travailleurs indépendants". Un progrès en termes de communication doit être effectué envers les assurés, surtout sur le site internet. "Certains ont pu remarquer que le site sécurité sociale-indépendants, par les renvois qu'il faisait à des pages génériques de sites du régime général, ne permettaient pas aux travailleurs indépendants de disposer d'une compréhension claire et immédiate des règles qui s'appliquaient à eux."
"Ce rapport constitue un formidable travail", Sophie Duprez (CPSTI)
"Ce rapport du Haut conseil du financement de la protection sociale constitue un formidable travail", explique Sophie Duprez, présidente du Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI), à Batiactu. "Cela fait vraiment plaisir de voir qu'au plus haut niveau de l'administration française, on s'intéresse à analyser concrètement la situation des indépendants. Il est ainsi écrit noir sur blanc qu'à un salaire équivalent au Smic, un indépendant va payer beaucoup plus de cotisations qu'un salarié mais disposera de droits bien plus réduits. Sans compter qu'en cas de faillite, il devra mettre en jeu ses biens personnels pour s'acquitter de sa dette. Ce travail rejoint donc les constats que nous effectuons depuis des années, et nous ne manquerons pas de faire des propositions pour mettre fin à cette situation injuste. J'ai d'ailleurs demandé un rendez-vous avec le ministre délégué aux PME, Alain Griset, pour inclure des dispositions pour les travailleurs indépendants dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale."
Le petit patronat milite pour "l'auto-modulation des cotisations"
Le rapport du Haut conseil note également que, malgré la disparition du RSI, "plusieurs grands irritants perdurent avec des démarches jugées complexes, des règles perçues comme instables et des décalages temporels entre perception des revenus et acquittement des cotisations toujours mal admis". Cela nécessite en effet à un indépendant qui verrait son revenu diminuer d'une année sur l'autre de provisionner ses cotisations à l'avance - ce qui est d'autant plus compliqué dans une période de difficultés économique comme celle que nous traversons, où les trésoreries sont mises à mal. La Confédération des PME, pour traiter cette difficulté, réclame "la généralisation de l'auto-modulation des cotisations des travailleurs indépendants". Ce mécanisme permettrait au travailleur indépendant de déclarer chaque mois ses revenus de manière à ce que les cotisations sociales soient calculées en fonction de ceux-ci, sans décalage temporel important dans le temps. "Cette généralisation permettrait au travailleur indépendant de bénéficier d'un dispositif proche de celui du régime général de la sécurité sociale et d'effectuer un rapprochement cohérent avec les dernières réformes."
"Le HCFiPS reconnaît que la transition, pourtant complexe, a été réussie"
Le rapprochement avec le régime général semble d'autant plus justifié que, comme le confirme le Haut conseil, le statut d'indépendant, lorsque le niveau de revenu est proche du Smic, est clairement défavorable par rapport à celui de salarié. En bref, dans ce cas-là, un indépendant paye nettement plus de cotisations, mais touche moins d'aide en retour, notamment en matière de retraites. Cette inégalité de traitement a tendance à se combler comme le niveau de revenus augmente.
Pour autant, le rapport fait état d'une amélioration de la qualité de service de la SSI, par rapport au RSI. "Le taux de décroché téléphonique s'élevait à près de 95% en 2019 contre 77% en 2017 ; le nombre de visites à l'accueil était en diminution d'un quart (de 200.000 environ à 150.000) entre 2018 et 2019, signe d'un moindre besoin d'aide. [...] Le HCFiPS reconnaît que la transition, pourtant complexe, a été réussie, notamment grâce au travail de pilotage transversal mené par la direction de la sécurité sociale."