ÉCONOMIE. Mesure-phare du soutien aux entreprises françaises lors de la tempête économique du Covid, les fameux PGE ont atteint leur objectif d'après la rue Cambon : apporter un souffle de trésorerie tout en assurant un partage plutôt équitable des risques et des coûts entre les professionnels, les banques et l'État, et sans poser de difficultés au moment du remboursement.
Les prêts garantis par l'État, ou PGE, ont fait le job. C'est en substance ce qu'affirme la Cour des comptes dans un de ses rapports d'évaluation des politiques publiques, publié en cette fin juillet. Mesure-phare du soutien aux entreprises tricolores mise en place dès le premier confinement sanitaire de mars 2020 face aux turbulences du Covid, ces prêts ont souvent été salués mais aussi critiqués par les acteurs économiques.
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D'un côté, le dispositif aurait eu le mérite d'apporter un souffle de trésorerie à des entreprises déjà en difficulté, ou en tout cas prudentes sur l'évolution de leur activité ; de l'autre, il représente un endettement supplémentaire pour ses bénéficiaires, et son remboursement a suscité de nombreuses craintes pour la viabilité des entreprises. Les Sages de la rue Cambon se sont donc penchés sur le sujet.
Accordés jusqu'au 30 juin 2022, les PGE ont fait l'objet d'une garantie par l'État comprise entre 70 et 90 %, et ont été plafonnés à 25 % du chiffre d'affaires annuel (ou de deux années de masse salariale pour les nouvelles sociétés). L'écrasante majorité des prêts ont été souscrits lors du premier confinement : sur un encours total de 137 milliards d'euros accordés par les banques au 31 décembre 2021, plus de 70 % ont été débloqués entre mars et juin 2020.
Faillites évitées
D'après la Cour des comptes, le bilan de cette politique publique est donc plutôt satisfaisant. Déployé massivement et rapidement, le dispositif s'est adressé aussi bien aux grands groupes qu'aux plus petites sociétés. "Le dispositif a été particulièrement sollicité par les très petites entreprises qui ont bénéficié de près de 88 % des prêts au 31 décembre 2021 (36,7 % en montant)", souligne le rapport.
Leur distribution a été réalisée par des établissements bancaires "en bonne santé financière" qui ont proposé un produit "simple et aisément compréhensible". Le système se serait aussi avéré particulièrement avantageux "pour les entreprises en termes de coût, avec un taux incluant la prime de garantie de 0,25 % la première année et de 1 % à 2,5 % les années suivantes".
Au final, le taux de refus des PGE s'est stabilisé autour de 3 %, sachant qu'environ deux tiers de ces refus ont débouché sur un recours au Médiateur du crédit, "dont l'intervention a permis d'aboutir à l'octroi d'un prêt dans la moitié des cas". Ainsi, l'offre de crédit des banques a été soutenue et les entreprises ont pu trouver une réponse à leurs besoins de liquidités, évitant du coup "des faillites massives".
Toujours selon l'analyse de la rue Cambon, le dispositif aurait "effectivement permis de soutenir des entreprises viables affectées par la crise". Les fameuses entreprises zombies, suspectées pour leur part d'avoir été artificiellement maintenues en vie avec les aides, auraient représenté moins de 2,5 % du total des entreprises.
Pas d'amélioration des retards de paiement des grands groupes
Les difficultés de remboursement sont quant à elles considérées comme "relativement circonscrites", grâce au niveau de souscription et aux choix d'amortissement des prêts, en phase avec la santé financière des entreprises. L'institution napoléonienne n'écarte pas pour autant tout danger : la bonne tenue des remboursements dépendra de l'évolution du contexte économique et de l'efficacité des outils d'accompagnement depuis la fin de la crise.
"Les entreprises jugées les plus à risque par la Cour devront consacrer mensuellement plus de 9 % de leur chiffre d'affaires au remboursement de dettes PGE et Urssaf (Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale), et les entrepreneurs individuels (3 % des PGE en montant, mais 19% des bénéficiaires) apparaissent particulièrement vulnérables", peut-on encore lire.
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En outre, les risques semblent avoir été bien partagés entre entreprises, banques et État. Ce sont évidemment les pouvoirs publics qui ont assumé une part plus importante que les deux autres, du fait du caractère exceptionnel de la pandémie.
Pour le reste, "les paramètres des PGE ont été plutôt avantageux pour les entreprises, notamment les plus petites, et sécurisants pour les banques dans un contexte de taux d'intérêt faibles". Les Sages pointent cependant un manque de contrôle des engagements des grands groupes, et estiment que les PGE qui leur ont été octroyés n'ont pas permis d'améliorer leurs retards de paiement, qui affectent ensuite tous les acteurs de la chaîne.
Suivre en temps réel la trésorerie des entreprises
Pas d'inquiétude enfin sur les fraudes éventuelles et le coût pour les finances publiques : "Le coût des PGE pour l'État devrait rester contenu (moins de 3 milliards d'euros), alors qu'ils ont permis de soutenir environ 700.000 entreprises à hauteur de près de 140 milliards d'euros", précise la Cour des comptes.
Pour éviter malgré tout de futurs abus, celle-ci recommande notamment de procéder à un contrôle exhaustif des bénéficiaires de PGE ayant cessé leur activité au moment de la souscription du prêt, ou encore de mettre en place un suivi en temps réel de la situation des comptes bancaires des entreprises afin d'améliorer la connaissance de leur trésorerie.