INDUSTRIE. Ce mercredi 13 février, plusieurs ministres et représentants du secteur de la construction ont signé le Contrat stratégique de filière "Industries pour la construction", qui doit impulser de nouveaux défis à la profession. Pour ce lancement, six projets "structurants" ont été dévoilés, et six autres vont être suivis. Des organisations professionnelles du BTP ont réagi à cette ratification.
Le secteur de la construction a ouvert un nouveau chapitre de son histoire ce mercredi 13 février à Bercy : plusieurs ministres et représentants de la profession s'y sont retrouvés pour signer le Contrat stratégique de la filière "Industries pour la construction". Ce document résulte des travaux du Comité stratégique de la filière "Industries pour la construction", labellisé le 28 mai 2018 par le comité exécutif du Conseil national de l'industrie (CNI) et présidé par Hervé de Maistre, directeur général de Saint-Gobain Construction France et par ailleurs président de l'AIMCC (Association française des industries des produits de construction). "Cette feuille de route est enthousiasmante et donc à ce titre abondante", a déclaré ce dernier. "Il y a une forte demande en termes de logements, de transition énergétique, d'infrastructures... Nous signons ici un engagement commun avec l'État, les régions et les maires, et tous les acteurs du bâtiment pour y répondre." Des représentants de l'Association des maires de France étaient effectivement présents et ont rappelé à cette occasion que ce contrat reposait avant tout sur la confiance entre les différentes parties prenantes.
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L'ensemble des acteurs du bâtiment et des travaux publics est représenté au sein de ce comité : des entreprises générales aux producteurs de matériaux en passant par les sociétés d'ingénierie, toute la filière ainsi regroupée a élaboré un plan d'actions qui se veut ambitieux pour lui permettre de répondre efficacement aux défis majeurs auxquels elle se retrouve confrontée. La numérisation, la transition énergétique, l'économie circulaire et le recyclage, ou encore la connectivité des infrastructures routières sont autant de thèmes incontournables que ce contrat tente d'aborder en mettant en avant des projets structurants et des axes de travail. "Il est plus difficile de structurer et de représenter une filière comme celle de la construction par rapport à celle de l'automobile", a noté au passage Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie. "Mais la construction demeure un secteur très important pour notre économie, dont les indicateurs économiques fondamentaux sont bons. Et je précise que c'est la première fois qu'une programmation pluriannuelle de projets d'infrastructures est mise en place, pour les 10 prochaines années. Sur les 5 ans à venir, le budget sera même en hausse de 40% par rapport à la période 2014-2018."
"Nous pourrions pourvoir jusqu'à 200.000 emplois avec la rénovation du bâti"
Concrètement, le Contrat stratégique de filière pour le secteur de la construction se fixe donc six enjeux majeurs, qui sont transposés dans six projets structurants. Le premier d'entre eux concerne l'indispensable numérisation de la filière : il s'agit du projet BoostConstruction, dont l'objectif est de mettre sur pied une plateforme numérique pour héberger les dictionnaires des propriétés des ouvrages et des produits de la construction. De cette manière, la "description numérique" pourra être facilitée entre tous les acteurs du chantier. Ensuite vient le projet d'économie circulaire, qui se décompose en trois axes : concevoir un bâtiment réversible et modulable, repenser la route pour répondre à la multifonctionnalité des usages, et enfin réaliser un bâtiment démonstrateur et des infrastructures routières "zéro déchets". Ici, le but est de fournir une méthodologie pour qualifier la réversibilité et l'évolutivité des bâtiments tout en faisant émerger des solutions, notamment des démonstrateurs.
Le troisième projet concerne la massification de la rénovation énergétique et se divise lui aussi en deux axes : d'une part, déployer un parcours de rénovation énergétique performante ; d'autre part, co-piloter un programme pour favoriser l'efficacité énergétique des campus universitaires. Déploiement des "passeports efficacité énergétique", recours à l'intelligence artificielle et à l'économie locale, lancement d'un pilote pour vérifier la soutenabilité financière du programme seront autant d'objectifs à suivre pour l'État et la filière. "La rénovation du bâti est une opportunité d'activité pour les entreprises du secteur. Grâce à cela, nous pourrions pourvoir jusqu'à 200.000 emplois, acquérir des parts de marché et accroître nos exportations", a poursuivi la secrétaire d'Etat. "Ces défis s'accompagnent aussi de plans de formation, car l'objectif serait d'atteindre 2.000 apprentis par an. Nous resterons donc attentifs à la mise en œuvre et au rythme de cette mise en œuvre."
"Ce contrat associe toutes les facettes du public et du privé"
Quatrième projet : promouvoir à l'export des technologies "smart, safe and sustainable cities". Le programme 3SC (pour des villes intelligentes, sûres et durables) doit permettre de créer une offre nationale de logement abordable pour un déploiement à l'international, essentiellement en Afrique. Puis, le projet d'accélération de la croissance des entreprises à travers le dispositif "accélérateur PME" a pour finalité d'augmenter le nombre d'ETI dans la filière. Un objectif qui passera par la mutualisation des réflexions stratégiques, l'identification des axes prioritaires de croissance et la mise en place d'ateliers et de réseaux. Enfin, le sixième projet consiste à accompagner les emplois et les compétences des industries pour la construction : les acteurs veulent instaurer un engagement de développement et mobiliser l'ensemble des parties prenantes, entre autres pour augmenter les effectifs d'apprentis. Le ministre de la Ville et du Logement, Julien Denormandie, a confirmé les chantiers auxquels les professionnels du bâtiment doivent s'atteler : "Ce contrat associe toutes les facettes du public et du privé. Il faut traiter de la généralisation du BIM dans le bâtiment, de la question de la réversibilité, comme la transformation des bureaux en logements, ou de la question de la transition énergétique. L'attractivité de la filière est un autre défi à relever."
"La logique de ce contrat de filière, c'est d'irriguer l'ensemble du secteur avec de l'innovation"
Pour chacun de ces projets structurants, l'État s'engage à mobiliser les fonds nécessaires, à apporter un soutien technique et éventuellement à lever certains verrous réglementaires, après examen. Du côté de la filière, le travail portera sur l'identification - et la réalisation sous conditions - de projets démonstrateurs, la mobilisation des territoires ou encore les actions de formation. En conclusion, le ministre de la Transition écologique a souligné l'intérêt de cette décision pour dynamiser la rénovation énergétique : "On voit avec ce contrat stratégique de filière que les enjeux économiques et écologiques vont de paire", a affirmé François de Rugy. "Le bâtiment possède un impact environnemental de plus en plus important, qu'il nous faut réduire, mais c'est aussi un formidable levier d'action. La logique de ce contrat de filière, c'est d'irriguer l'ensemble du secteur avec de l'innovation. Ce contrat peut être un outil extrêmement utile car nous sommes en train de conduire une transformation. Tout changement est un effort mais c'est aussi une formidable opportunité."
Les travaux publics routiers veulent profiter "des effets de synergie"
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Dans un communiqué, l'organisation Routes de France souligne "[l'] acte important" que représente la signature du Contrat stratégique de filière Industries pour la construction. Son président, Pierre Calvin, était effectivement présent lors du point presse ce mercredi 13 février à Bercy. Le syndicat professionnel regroupant les entreprises de travaux publics routiers espère ainsi "bénéficier des effets de synergie de l'ensemble de l'écosystème pour intensifier les actions engagées, pour adapter les infrastructures routières aux mutations des usages de mobilité et préparer les routes de demain à la multifonctionnalité de leurs usages". En outre, l'organisation estime que la ratification du contrat "s'inscrit dans le prolongement de l'accord de coopération technique avec la Plate-forme automobile (PFA)". Les réflexions et projets de Routes de France s'articuleront autour de quatre axes de travail : un volet prospectif, un volet benchmark (étude comparative), un volet technique en lien avec la FPA et un volet suivi des démonstrateurs "Route à énergie positive". Enfin, le syndicat s'alliera à la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) pour mener d'autres actions au sein de la filière, à l'instar de l'amélioration du taux de recyclage et de la compétitivité des déchets du BTP, ou la lutte contre les îlots de chaleur urbain.
Les autres actions de la filière industries pour la construction