Poursuivant la logique de décarbonation, négaWatt prévoit que l'éolien deviendra la première source d'électricité en 2050, avec 247 TWh fournis par an (contre 123 TWh en 2030) au moyen d'un parc terrestre installé de 49 GW. L'association compte sur le développement progressif d'éoliennes de nouvelle génération capables d'être actionnées par des vents plus faibles. "Par rapport à la situation actuelle, le parc terrestre est multiplié par 3,1 en 2050, soit un total d'environ 18.000 éoliennes… à comparer aux 26.000 éoliennes déjà implantées en Allemagne fin 2015 !", souligne-t-elle. Cette production sera complétée par le déploiement de 11 GW d'éolien offshore posé et de 17 GW d'éolien flottant : "Cette filière présente un potentiel significatif à la fois en Atlantique et en Méditerranée, permettant de développer des projets industriels complets de reconversion, notamment pour le secteur pétrolier et les chantiers navals".
Du côté de l'hydrolien, le document reste sceptique : "Si des prototypes de taille industrielle sont aujourd'hui à l'essai, les retours d'expérience ne sont pour l'instant pas tous probants". C'est pourquoi la synthèse n'escompte qu'une production limitée à 14 TWh/an à l'issue de son scénario. En revanche, le photovoltaïque prendra son essor, orienté de telle façon à "réduire les pointes de production de midi et de favoriser le début de matinée et la fin d'après-midi". Le parc envisagé pour 2050 est de 140 GW pour 147 TWh produits. Filière historique, l'hydraulique ne disposerait pas, selon l'association, de potentiel de développement important, l'amélioration des équipements existants ne faisant que compenser la baisse de ressource en eau imputable au dérèglement climatique et estimé à -15 %. La production resterait donc globalement stable, à 54 TWh/an.
Meilleure utilisation des surfaces et rénovation massive
Concernant le parc de bâtiments, l'association souligne l'enjeu considérable qu'il représente, avec 40 % de consommation d'énergie finale : "L'essentiel de cette consommation est liée aux besoins de chaleur pour le chauffage, l'eau chaude sanitaire et parfois la climatisation qui sont associés à l'occupation des bâtiments eux-mêmes. C'est pourquoi une action globale sur le parc de logements et de bâtiments tertiaires s'impose comme une priorité". Le scénario plaide tout d'abord pour une maîtrise des surfaces occupées avec une légère diminution des surfaces unitaires (à 42 m² par personne) et une baisse sensible de la proportion de maisons individuelles dans le logement neuf, ainsi qu'une réduction du rythme de construction de bureaux. L'association propose d'indexer ce rythme sur la croissance de la population pour atteindre 1,1 milliard de m² en 2050 (contre 950 millions actuellement). Mais, au-delà de la construction neuve, négaWatt soutient que l'enjeu principal reste "la mise en œuvre d'un vaste chantier de rénovation énergétique, visant à la fois un traitement complet du parc existant et un niveau élevé de performance, non seulement au niveau de l'enveloppe mais aussi des systèmes". Le rapport avance un volume annuel de travaux porté à 780.000 logements par an plus 3,5 % des surfaces tertiaires à traiter, pour "avoir la certitude que la quasi-totalité du parc construit avant 2000 soit traitée avant 2050". Les chantiers devront réduire l'énergie grise contenue dans les matériaux employés en favorisant l'utilisation de bois en structure, isolation ou menuiserie, afin de parvenir à 15 % de la masse totale (contre 7 % à ce jour).
Un impact positif sur l'économie
Dernier bénéfice de ce scénario, en dehors d'émissions de gaz à effet de serre réduites, d'importantes retombées socio-économiques. négaWatt précise : "Le bilan net sur l'emploi est positif tout au long de la période. Il croît progressivement, à mesure que les investissements se rentabilisent, passant de plus de 100.000 ETP (emplois temps plein) en 2020 à près de 400.000 en 2030 puis plus de 500.000 en 2050". L'association envisage que l'évolution se fera en deux temps, avec la mutation de l'économie portée par le programme de rénovation et de développement des EnR, puis un recueil des dividendes de la transition, avec des effectifs stabilisés. Des économies de grande ampleur seront réalisées dans les dépenses énergétiques : "A partir de 2030, on assiste à un décrochage, les dépenses du scénario devenant moins élevées de 26 milliards d'euros par an en 2040 : les investissements sont alors amortis, laissant la place à des gains nets". A l'horizon de 2050, l'étude estime qu'il serait possible de générer 370 milliards d'euros qui seraient ainsi réinjectés chez les agents économiques afin de créer des centaines de milliers d'emplois (ou de favoriser la reconversion de certains secteurs en déclin). Des conclusions similaires à celle de l'étude "Energy (R)evolution" imaginé par Greenpeace en 2015, ou par l'Ademe.