Alors que la réforme des retraites a été à l'épreuve de la rue, ce mardi 7 septembre, revenons sur le "compte de prévention de la pénibilité" qui sera définitivement mis en place à partir du 1er janvier 2015. Avec quel financement ? Sur quel mode de calcul ? Les partenaires sociaux et les professionnels du BTP s'interrogent.

Sujet casse-tête, voire épineux particulièrement dans le secteur du BTP. Si l'annonce du futur compte-temps pénibilité - qui s'inscrit dans la réforme des retraites dévoilée le 27 août dernier- satisfait une majorité des partenaires sociaux, dans le bâtiment, ce n'est pas le même son de cloche. "Ainsi, six articles du texte (Ndlr: le projet de loi sera soumis au Parlement le 7 octobre prochain) sont consacrés à la mise en place d'un compte personnel de prévention de la pénibilité", nous a précisé ces jours-ci l'UPA.

 

 

Cumul de points
En effet, les artisans et les entreprises du bâtiment ne voient pas d'un bon œil ce dispositif. "Ouvert pour tout salarié du secteur privé exposé à des conditions de travail réduisant l'espérance de vie, le compte permettra de cumuler des points en fonction de l'exposition à un ou plusieurs facteurs de pénibilité (Ndlr: dix au total)", a rappelé l'Exécutif.

 

Et de préciser en détails : "Chaque trimestre d'exposition donnera droit à un point (Ndlr : deux points en cas d'exposition à plusieurs facteurs)." Par ailleurs, le nombre total de points sera plafonné à 100.

 

Deux cotisations des employeurs, dont les niveaux seront définis par décret, financeront la prise en compte de la pénibilité. La première sera prélevée sur toutes les entreprises, sur la base de leur masse salariale. La seconde sera établie en proportion des salaires versés aux seuls employés exposés à la pénibilité.

 

Sur ce point, syndicats et partenaires sociaux sont extrêmement vigilants. "Au final, l'UPA compte bien engager une concertation avant l'automne avec le ministre du Travail pour en discuter à travers chaque branche professionnelle", nous a signalé Pierre Burban. Par ailleurs, la création du compte individuel de pénibilité risque de générer, d'après lui, une très grande complexité et de nombreux contentieux en plus du surcoût pour l'entreprise. "Ainsi le choc de simplification annoncé par le gouvernement ressemble déjà à un flop", ajoute-t-il.

 

Incompréhension
"Le Gouvernement estime qu'entre 18 % et 20 % des salariés pourraient être concernés, cela signifie que toutes les PME dans le bâtiment seront visées, indique à son tour Didier Ridoret, président de la FFB. Ce n'est pas aux entreprises du bâtiment à payer la pénibilité. C'est un arbitrage injuste. Par ailleurs, il est carrément impossible de mesurer l'impact en termes de coûts. Et pourtant, notre Direction des affaires sociales a tenté l'exercice particulièrement technique et complexe…" Et d'ajouter sur un ton colérique : "Une fois de plus, on découragera les employeurs du BTP à embaucher des ouvriers sur les chantiers."

 

 

"Comment déterminer les métiers pénibles, et qui va payer ?", s'interroge aussi Patrick Liébus, président de la Capeb. Qui se dit "très réservé" sur le compte-pénibilité que souhaite mettre en place le Gouvernement. "Cela va être ingérable ! Cela va créer des conflits entre salariés et patrons et surtout stigmatiser certains métiers", souligne-t-il. Et de continuer à prôner la prévention par branche, seule solution, selon lui, pour résoudre le problème de la pénibilité.

 

Désormais, Matignon table sur un rendement de 500 millions d'euros par an en 2020. Le taux sera fixé par décret. Il devrait être de "0,3 % à 0,5 %", indiquent les conseillers de Jean-Marc Ayrault. "Au nom de la solidarité interprofessionnelle", toutes les entreprises paieront aussi une autre cotisation, dont le taux "sera beaucoup plus faible".

actionclactionfp