DÉBAT. Les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024 et l'arrivée du Grand Paris Express parviendront-ils à tenir leur objectif de départ ? A savoir, ouvrir des champs de possibles aux habitants des quartiers prioritaires de la ville, par les héritages olympiques et de nouvelles mobilités. Pour des élus, acteurs de la Solideo, de la Société du Grand Paris et de l'Anru, tout serait question d'anticipation.
A cinq ans de l'échéance olympique, et sept de la livraison totale du nouveau métro francilien, les élus de Seine-Saint-Denis angoissent déjà. Quand Thierry Dallard, président du directoire de la Société du Grand Paris évoque "les 50 à 80 milliards d'euros d'investissements immobiliers à proximité des futures gares", la question de la gentrification n'est jamais bien loin. De même, avant l'héritage escompté, les collectivités se demandent déjà si leurs populations pourront tirer profit des périodes pré, pendant et post-chantier.
"Il faut s'y mettre dès maintenant pour les JOP, de même pour la Société du Grand Paris avec un retard de formation et des entreprises qui peinent à trouver leurs salariés", gronde Patrick Braouezec, président de l'établissement territorial Plaine Commune pendant le Forum régional des acteurs du renouvellement urbain à Paris.
Pour de nombreux acteurs, il est bien question "d'anticiper les travaux et d'arriver dans un an et demi avec les différents systèmes de formations pour mobiliser les populations dans cette aventure", affirme Isabelle Vallentin, directrice-générale adjointe de la Société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo).
"Prenons garde à ne pas créer de nouvelles fractures"
Président de l'Anru et maire de Clichy-sous-Bois, Olivier Klein exhorte : "nous avons une opportunité formidable, prenons garde à ne pas créer de nouvelles fractures". Lui plaide pour un juste retour pour les quartiers prioritaires en appelant "les forces qui ont la capacité à former à se décentraliser et faire découvrir leurs métiers".
Il faut anticiper l'après, et s'assurer qu'en s'élevant au ciel, les équipements olympiques et les gares du futur Grand Paris Express n'auront pas fait disparaître des populations, notamment les plus fragiles. "Comment faire en sorte que ces gens ne soient pas chassés ?", questionne Patrick Braouezec, ancien édile de Saint-Denis qui répond simultanément qu'il "faut se donner les moyens de maîtriser du foncier et les prix de l'immobilier".
Acter la rupture du modèle de développement francilien
Thierry Dallard en appelle également à la "puissance publique" pour proposer une politique de logement adossée à la montée en échelle… et en loyer des programmes immobiliers en quartiers de gare. De son côté, Isabelle Vallentin rappelle que la Solidéo "a déjà travaillé avec la Direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement, et l'Anru pour réserver des logements" dans les structures du village olympique et du village des médias.
"Les leçons que je tire à titre personnel, c'est qu'il faudra certainement se mettre ensemble pour avoir des capacités d'anticipation plus efficaces", décrète le préfet de la région Ile-de-France Michel Cadot. Il appelle par ailleurs à ne pas perdre de vue que la fabrique du métro et celle des jeux acteront une rupture de modèle. "Notre modèle ne peut plus être celui qui a été choisi implicitement depuis des décennies, celui de l'étalement urbain, ce n'est plus possible", déclare le représentant de l'Etat.