DECRYPTAGE. Dégradés depuis une vingtaine d'années, certains quartiers anciens de centre-ville font aujourd'hui l'objet d'une attention particulière dans le cadre du programme gouvernemental de revitalisation des centres-bourgs. Pourtant, seules 7 conventions d'opération sur 54 ont été signées à fin juin 2016. L'Anah nous explique les raisons de ce retard et les nombreux "outils" à sa disposition pour les redynamiser.
Vacance de logements, habitat insalubre, habitat dégradé, marchands de sommeil ou encore disparition des commerces. Aujourd'hui, certains centres-villes anciens des villes de communes de petites moyenne tailles se déqualifient et ce phénomène touche toutes les dimensions de la vie quotidienne, nous a fait récemment remarquer Blanche Guillemot, la directrice générale de l'Agence nationale de l'habitat (Anah).
L'enjeu du programme gouvernemental est donc de taille : requalifier les centre-villes et leur donner une nouvelle attractivité grâce à une rénovation de l'habitat, un retour des commerces, une meilleure accessibilité et un réaménagement des espaces publics.
Participer au "recyclage du foncier"
"La rénovation du parc de logements privés anciens est la raison d'être de l'Anah depuis sa création, précise Blanche Guillemot. C'est pourquoi un contrat avec les collectivités a été signé dans le cadre d'opérations programmées sur 5 ans (OPAH) pour agir, quand cela est encore possible, sur la qualité des logements situés dans des quartiers anciens centraux. Nous avons aussi déployé des solutions techniques 'lourdes' dédiées à la restructuration et nous avons participé au recyclage du foncier lorsque la dégradation des logements est trop importante."
Ces actions sur le parc privé contribuent donc au recul de la vacance et à faire revivre ces bassins de vie en produisant des logements à loyer et charges maîtrisés, rappelle l'Anah. "C'est la raison pour laquelle on est partie prenante des différents programmes nationaux comme le Programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD) ou encore le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), programme de revitalisation des centres bourgs, mis en place par les pouvoirs publics et les collectivités, qui tente de répondre en partie à cette question."
Le programme expérimental pour la revitalisation des centres-bourgs peine à démarrer…
Seul bémol : ce programme peine à démarrer. Piloté par Sylvia Pinel, ex-ministre du Logement, Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, et George Pau-Langevin, ministre des Outre-Mer, ce dispositif a été lancé en 2014 pour une durée de six ans.
Un chiffre à retenir ? Sur les 54 communes de moins de 10.000 habitants sélectionnées par le Gouvernement, seules sept ont signé une convention d'opération programmée (OPAH centre bourgs) jusqu'en 2019 pour un montant moyen de 4 millions d'euros par opération. Parmi elles figurent : Joinville (Haute-Marne), Lodève (Hérault), Pont-Saint-Esprit (Gard), Sierck-les-Bains (Moselle), Giromagny (Territoire de Belfort), Schirmeck (Bas-Rhin) et enfin Salins-les-Bains (Jura). "Et près de 12 conventions devraient être signées d'ici à l'automne 2016", a annoncé la directrice générale de l'Anah, chargée de conduire ce programme avec le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET).
L'Anah explique la longueur de ces délais notamment par "la lourdeur des opérations à venir et la phase de préparation d'ingénierie qui a précédé la signature des conventions."
Précisions d'ailleurs que c'est le CGET qui assure le pilotage du programme et gère les conventions permettant de bénéficier des crédits du Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). "Justement, chacune des 54 communes a acquis une subvention au titre du FNADT dans le but de recruter un chef de projet et des études d'ingénierie", note Christian Mourougane, directeur général adjoint de l'Anah. Tout en précisant qu'une aide à l'ingénierie oscille entre 100.0000 euros et 300.000 euros. Une condition indispensable pour ces collectivités qui ne disposent pas des compétences d'ingénierie.
L'exemple de Sierck-les-Bains (Moselle)
Parmi les exemples de projet de revitalisation de centres-bourgs qui vont dans le bon sens, l'Anah cite le cas de Sierck-les-Bains (Moselle), une commune de 1.600 habitants frontalière avec le Luxembourg. La convention signée le 31 mai 2016, entre l'Etat, l'Anah, Sierck-les-Bains et la Communauté de Communes des 3 Fontaines prévoit une enveloppe de 3,4 millions d'euros, financés à hauteur de 60 % par l'Agence.
"En répondant à cet appel à manifestation d'intérêt (AMI) regroupant jusqu'à 300 candidature, cette commune où 16% des logements sont inoccupés avait pour ambition de lutter contre les inégalités", complète Blanche Guillemot.
Désormais, la collectivité va engager une Opah lui permettant d'aider les propriétaires occupants ou bailleurs à conduire des travaux, sous certaines conditions de ressources. A noter que les taux de subvention de cette commune est l'équivalent équivalent à 50% pour les propriétaires occupants très modestes dont le revenu est inférieur à 14.000 euros par an, nous précise Christian Mourougane. Quant aux bâtiments les plus dégradés, des procédures d'opérations de restauration immobilière (ORI) peuvent être engagées. "Faute d'accord avec des propriétaires récalcitrants, la ville a la possibilité de jouer la carte de l'expropriation", signale le directeur adjoint de l'Anah.
Face à cette question épineuse de la revitalisation des centres historiques marquée également par une augmentation accrue de la vacance commerciale, l'Anah estime que : "la requalification doit s'appuyer sur la politique de rénovation énergétique, devenue un élément fondateur de l'élément durable et sur la capacité des acteurs de la construction à se coordonner." Dans ce sens, l'Anah signera bientôt avec la Caisse des dépôts un partenariat pour co-financer l'ingénierie des projets de requalification des centres anciens qui font défaut à l'heure actuelle.
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