NUCLEAIRE. L'Autorité de sûreté nucléaire est globalement satisfaite des "options de sûreté" de Cigéo, le futur site de stockage souterrain des déchets issus des centrales françaises. Un point d'étape important pour l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, qui déposera une demande d'autorisation en 2019. Quelques points restent cependant à travailler.
L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a pris son temps pour étudier en détail le dossier des options de sûreté du projet de stockage profond Cigéo (Centre industriel géologique situé entre la Meuse et la Haute-Marne), déposé par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) en avril 2016. Elle a mobilisé, pendant plus d'un an, ses experts ainsi que ceux de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et a même soumis le document à des autorités étrangères, coordonnées par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Et, ce 15 janvier 2018, elle vient de rendre un avis définitif favorable au projet, comme le commente Soraya Thabet, la directrice de la sûreté à l'Andra : "Cet avis est pour nous positif et conforte nos grandes orientations en matière de sûreté (…) En effet, l'ASN a souligné la maturité technologique du projet et la qualité du dossier".
La solution retenue par la France, pour ses déchets radioactifs de moyenne et haute activité à durée de vie longue (HA/MA-VL), sera donc bien le stockage en couche géologique profonde. L'ASN estime que le projet Cigéo "a atteint dans son ensemble une maturité technique satisfaisante au stade du dossier d'options de sûreté", solidement étayé par une bonne documentation, comme une connaissance détaillée de la géologie locale ou une maîtrise des composants du stockage (colis, ciments, argiles, métaux). Comme le souligne l'Andra, "pour la grande majorité des déchets prévus (plus de 80 %), l'ASN a considéré que les options de sûreté sont satisfaisantes".
C'est un "Oui mais…"
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Cependant, l'ASN a identifié des sujets sur lesquels l'Agence devra apporter des éléments de justification complémentaires : sur l'architecture du stockage, sur le dimensionnement de l'installation face aux risques naturels (séisme, incendie), sur la surveillance du site, et sur la gestion de situations post-accidentelles. Et l'Autorité a formulé une réserve sur un type de colis spécifique : les colis bitumes, qui représentent 18 % des volumes de déchets prévus dans Cigéo. Ces derniers sont issus du traitement des effluents radioactifs liquides des sites de La Hague et de Marcoule, qui, une fois traités, deviennent des boues qui sont séchées puis enrobées dans une matrice de bitume puis conditionnées en fûts d'acier. Produits depuis la fin des années 1960, ils sont à ce jour entreposés dans des installations de surface et contiennent des produits chimiques variés dont certain à faible activité mais vie longue (FA-VL), et d'autres à moyenne activité (MA-VL). L'ASN estime que les options de conception présentées ne présentaient pas une sécurité suffisamment démontrée, notamment dans le cas d'une élévation de température au sein du colis par des réactions exothermiques. Une incertitude sur leur comportement qui n'est toutefois pas de nature à remettre en cause le projet pour toutes les autres sortes de déchets. Pour l'heure, il ne sera donc pas possible d'entreposer ces colis dans le site géologique prévu.
L'étude de nouvelles solutions de gestion des bitumes devrait donc se prolonger afin que l'Andra puisse proposer des options plus robustes face au risque d'incendie et à l'incertitude de leur comportement. Cette demande de l'ASN ne sera d'ailleurs pas bloquante pour la suite de l'instruction du dossier. L'Andra qui dispose désormais d'une feuille de route, va orienter son travail en vue d'un dépôt de demande d'autorisation de création, qui devra être remis à l'ASN en 2019, et qui comprendra toutes les précisions réclamées par l'Autorité.