ENTRETIEN EXCLUSIF. Accompagnateur rénov, financement du reste à charge, incompréhension avec les architectes et certains artisans : Olivier Sichel, auteur d'un rapport sur la rénovation des passoires thermiques, s'explique dans les colonnes de Batiactu.


Rarement un rapport aura vu certaines de ses principales propositions reprises si rapidement. Les conclusions d'Olivier Sichel, directeur général délégué de la Caisse des dépôts, ont été rendues publiques à la mi-mars ; quelques semaines après, il en était fait mention dans le compte-rendu du conseil des ministres. Pour rénover plus rapidement les passoires thermiques, les pouvoirs publics ont en effet décidé de suivre le rapport Sichel sur au moins deux grands axes : la création d'un accompagnateur rénov, chargé de suivre un projet de rénovation de A à Z, et le lancement d'un prêt avance rénovation, sur le modèle du prêt avance mutation. Dans un entretien exclusif à Batiactu, Olivier Sichel s'explique sur ses propositions, qui avaient notamment fait tiquer les organisations d'architectes et certains artisans, craignant de se voir chaperonnés par un 'accompagnateur rénov'.

 

 

Batiactu : Votre proposition de créer un accompagnateur rénov, qui suivrait un projet de rénovation de A à Z, a fait couler beaucoup d'encre. Certains artisans, notamment, s'inquiètent d'être 'chaperonnés' par un acteur qui leur imposerait le type de travaux à réaliser, les appareils à installer, le montant du devis... L'accompagnateur rénov laissera-t-il leur indépendance aux artisans du bâtiment ?

 

Olivier Sichel :
Cet accompagnateur rénov' a pour fonction de rassurer le ménage dans un dialogue qui peut parfois être technique et compliqué dans des travaux lourds et engageants : on parle du foyer où le ménage habite et de montant représentant parfois une année de revenus. Ce tiers va faciliter le dialogue et mettre de la sécurité et de la confiance pour permettre à chaque ménage de s'engager dans cette démarche malgré les obstacles.

 

Batiactu : Les architectes se sont également plaints d'avoir été oubliés dans votre rapport, avant d'être rassurés par le gouvernement il y a quelques jours. Confirmez-vous qu'ils sont, selon vous, bien placés pour devenir accompagnateurs rénov ?

 

O.S. :
Bien sûr, les architectes peuvent jouer ce rôle. Il y a eu un malentendu. Effectivement, nous n'avons pas cité le mot 'architecte' dans notre rapport, pas plus que celui de 'plombier' ou de 'chauffagiste'. Mais il y a toute une série de métiers qui interviennent dans l'accompagnement des ménages, et les architectes en font partie. C'est un rôle qui est ouvert à une grande diversité d'acteurs, des énergéticiens bien sûr, mais aussi d'autres organisations comme La Poste, des acteurs de l'économie sociale et solidaire comme Soliha, des sociétés d'économie mixte comme Île-de-France énergies, et même des bailleurs sociaux qui pourraient investir ce champ dans des territoires détendus où la construction neuve a tendance à ralentir. Chacun s'appropriera ce rôle avec sa sensibilité et son approche. La prochaine étape, c'est lorsque l'Agence nationale de l'habitat (Anah) rédigera le cahier des charges pour les accompagnateurs rénov'. Ils ont déjà un certaine expérience, puisqu'ils pratiquent déjà cette démarche dans le cadre de leur programme "habiter mieux - sérénité". A partir de là, les acteurs pourront répondre aux appels d'offres pour être agréés.

 

Batiactu : A peine rendues publiques, des propositions de votre rapport font déjà l'objet de reprises dans la loi climat et résilience. Êtes-vous satisfait qu'à la différence d'autres travaux de ce type, il ne finisse pas comme on dit 'dans un tiroir' ?

 

O.S. :
J'en suis bien sûr très satisfait, mais je rappelle que cela s'explique par le contexte dans lequel la demande a été faite. Il y a une volonté sincère d'Emmanuelle Wargon, ministre déléguée au Logement, et de Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, d'aboutir à des solutions permettant de massifier les rénovations énergétiques de passoires thermiques. Je connaissais personnellement ces deux ministres, ils connaissaient mon passé dans le secteur de l'Internet et mes réalisations au sein de la Banque des territoires. Ce rapport n'était ainsi pas destiné à 'caler une armoire', mais à formuler des propositions très concrètes et opérationnelles. Il y avait dès le départ une volonté politique de passer à l'acte.
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