ETUDE. Après l'annulation en novembre 2017 des trois arrêtés préfectoraux instaurant l'encadrement des loyers à Paris, les bailleurs ne seraient plus que 48% à proposer des annonces conformes au dispositif, contre 61% l'année dernière. C'est ce qu'indique une étude de l'association CLCV publiée ce 18 juillet 2018.
Ce 18 juillet, CLCV a rendu publique une étude portant sur l'application de l'encadrement des loyers à Paris. D'après l'association, cette enquête a été réalisée entre mai et juin 2018 auprès de 16 sites Internet et sur un échantillon d'un millier d'annonces immobilières, également réparties entre locations meublées et non-meublées d'une part, et entre logements proposés directement par les particuliers et transitant par le biais d'agences d'autre part. De plus, CLCV souligne que cette étude n'avait pas pour objectif de contrôler le respect du dispositif, étant donné qu'il a été censuré par le juge administratif en novembre 2017, mais d'évaluer l'impact de cette décision judiciaire sur le comportement des bailleurs parisiens.
"Les bailleurs ont immédiatement réagi à l'annulation"
Que ressort-il donc de cette étude ? Tout d'abord, 2018 serait la première année où le taux d'annonces conformes au dispositif d'encadrement des loyers est inférieur à la moyenne, atteignant les 48%, contre 61% en 2017. CLCV note à ce propos que l'application avait toujours été majoritaire depuis l'adoption de la loi Alur (loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové) en 2015, affirmant que "les bailleurs ont immédiatement réagi à l'annulation" du dispositif et que "le marché locatif s'est tout de suite envolé". Dans le détail des prix pratiqués, l'étude montre que les loyers excédant le plafond le dépassent en moyenne de 128 € par mois, ce qui représente 1.536 € à l'année. Les bailleurs proposant directement leurs logements seraient 39% à respecter l'encadrement, contre 44% l'année dernière. La baisse est encore plus marquée chez les agences immobilières, qui ne seraient plus que 57% à suivre le dispositif en 2018, alors qu'elles étaient 77% en 2017.
Des loyers parisiens déjà soumis à un autre dispositif
Estimant que "bailleurs et professionnels se sont donc sentis pousser des ailes", CLCV déplore que, "pour des raisons purement politiques, le dispositif [d'encadrement des loyers] n'a jamais été mis en place, ou seulement de façon imparfaite". L'association raccroche également ce sujet à l'actualité législative : au moment où la loi Elan est discutée au Sénat, elle craint que, "sous couvert d'en observer les effets, [le texte] propose purement et simplement de l'enterrer". Par ailleurs, CLCV rappelle que les loyers en vigueur dans la capitale sont aussi soumis au dispositif de limitation des hausses de loyers proposés à la relocation (selon lequel le tarif est fonction, entre autres, de celui pratiqué lors du précédent bail). Et l'association de réclamer que l'encadrement soit généralisé automatiquement dans l'ensemble des zones tendues.
Le gouvernement a fait appel, la Cour a confirmé l'annulation
Pour rappel, le Tribunal administratif de Paris a annulé en novembre 2017 les trois arrêtés préfectoraux établissant l'encadrement des loyers sur le territoire parisien. Instauré en août 2015 dans la capitale (et en février 2017 à Lille), le dispositif imposait de fixer le loyer dans la limite d'un tarif de référence majoré. Prenant acte de la décision du juge administratif, le ministre de la Cohésion des territoires, Jacques Mézard, et son secrétaire d'Etat, Julien Denormandie, avaient rappelé que le gouvernement s'était engagé à évaluer le dispositif d'encadrement des loyers durant le quinquennat d'Emmanuel Macron. Et bien que l'exécutif, en concertation avec la ville de Paris, ait fait appel de l'annulation, il estimait tout de même que le dispositif était "trop récent pour pouvoir établir son efficacité et pour mesurer ses effets sur l'évolution des loyers, notamment en zone dense".
A l'époque, Jacques Mézard avait notamment déclaré : "Je me suis entretenu avec la maire de Paris [Anne Hidalgo, ndlr]. En l'état actuel des choses, comme à Lille, nous considérons qu'il est opportun de relever appel à l'encontre de cette décision. Il est important de rappeler que la mise en application de la mesure d'encadrement des loyers étant récente, il est indispensable de disposer du temps nécessaire pour en réaliser l'évaluation". Et le ministre comptait alors sur le projet de loi Elan pour apporter des mesures complémentaires, comme le développement d'observatoires des loyers dans les communes volontaires.
Mais la Cour administrative d'appel de Paris a confirmé, le mardi 27 juin dernier, l'annulation de l'encadrement des loyers dans la capitale.
La mairie de Paris réagit à l'étude CLCV
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Dans un communiqué, la ville de Paris a réagi à la publication de l'enquête CLCV sur l'impact de l'annulation de l'encadrement des loyers dans la capitale. Affirmant que "la loi Elan permet aujourd'hui une réintroduction temporaire [du dispositif]", la municipalité "l'utilisera dès cet automne pour exiger l'application stricte du contrôle des loyers".
Ian Brossat, adjoint (PCF) à la maire de Paris en charge du Logement, a regretté les enseignements de l'étude : "Comme nous le craignions, la fin de l'encadrement des loyers à Paris a conduit à une hausse considérable des prix ces six derniers mois". Selon le communiqué de la municipalité, 60% de la population parisienne seraient locataires. "Nous avions, dès l'annulation, demandé au gouvernement de revoir le dispositif pour nous permettre de continuer à encadrer les loyers. La loi Elan le permet désormais et nous le ferons dès l'automne, car c'est indispensable pour que celles et ceux qui travaillent à Paris puissent s'y loger, en particulier les jeunes, les étudiants, les familles monoparentales et les familles de la classe moyenne, qui furent les principaux bénéficiaires de cette mesure."