Si le phénomène n'est pas nouveau, le rythme de transformation des espaces naturels en zone d'habitation s'est fortement accéléré ces dix dernières années.

Paris, ligne de métro numéro 12 : c'est la bousculade pour trouver une place dans la rame qui se rend à la porte de Versailles. Comme chaque année, des dizaines de milliers d'agriculteurs venus de toute la France occupent la capitale pour le Salon de l'agriculture. Si cette sympathique invasion ne dure que quelques jours, il n'en est pas de même au niveau du territoire où les zones urbaines grignotent de plus en plus l'espace naturel français.

Selon une étude* de l'Institut français de l'Environnement publiée mardi, la France convertit ses zones naturelles de prairies, landes et forêts en maisons individuelles, jardins, routes et parkings à un rythme accéléré depuis une dizaine d'années.

En 2000, l'emprise artificielle représentait 8% du territoire français. A priori, ce pourcentage paraît peu important par rapport aux 27% de forêts, 30% de sols cultivés ou 20% de prairies. Mais le grignotage par l'espace artificiel s'accélère: +1,6% par an depuis 1992, contre +1,2% sur la période 1981/1990.

L'habitat individuel, qui comprend les maisons mais aussi les jardins, pelouses, voies d'accès et parkings, a "consommé" en moyenne 330 km2 supplémentaires chaque année en France depuis 1992, contre 275 km2 annuels de 1982 à 1990. Les zones pavillonnaires représentent davantage d'espace que le réseau routier français.
La plus grande partie de ces terrains est en fait absorbée par les pelouses, témoignant de l'étalement urbain de plus en plus prononcé.

Cet étalement n'est pas sans conséquences. Il génère un gros besoin de transports, la construction de voies d'accès et de parkings, synonymes de bruit et de pollution de l'air.

Autre problème tristement d'actualité : les nouveaux terrains artificiels (7.400 km2 de 1992 à 2000) sont gagnés d'abord sur les prairies (1.520 km2), qui jouent moins efficacement leur rôle de réservoir de "biodiversité" (richesse de la faune et de la flore). Mais surtout, l'imperméabilisation des sols par les construction amplifie le risque d'inondation en empêchant l'absorption de l'eau dans les sols et en favorisant son ruissellement en surface.

Tous les départements français sont touchés par l'artificialisation des terres, sauf les Alpes-de-Haute-Provence indique l'étude de l'IFEN qui constate que le phénomène n'est pas forcément lié à la croissance démographique.
Ainsi, en Dordogne, la population n'a cru que de 0,06% par an entre 1990 et 1999, mais un record de 170 km2 de terres ont été converties en surfaces artificielles, du fait de l'essor de résidences secondaires.

Aux deux extrêmes, l'Institut étudie le cas de l'Ile-de-France, où 21% des surfaces sont déjà artificialisées, et du Limousin (seulement 6%). Le grignotage de terrains naturels est nettement plus marqué dans le Limousin entre 1993 et 2001 (+15% contre +6% en région francilienne).

En Ile-de-France, la densité est telle que les nouveaux terrains artificiels sont pour l'essentiel consacrés à du bâti et non à des espaces verts. Ils sont gagnés sur d'anciennes cultures (maraîchages,...), mais également sur les propres espaces verts des villes qui ont tendance à les convertir en bâti.

*L'étude IFEN est réalisée à partir de photographies aériennes et de relevés sur le terrain, dans le cadre de l'enquête "Teruti" du service statistique du ministère de l'Agriculture.


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