TECHNOLOGIES. Véhicule autonome, smart city, intelligence artificielle, 5G… Alain Kergoat (Urban Practices - Smart Building Alliance) et Guillaume Loizeaud (Reed Exposition) font le point sur les grandes tendances observées dans les allées du Consumer Electronic Show 2019.

L'immense salon de l'électronique grand public vient de s'achever à Las Vegas (Nevada). Et le constat des visiteurs est sans appel : la voix a pris le pouvoir en devenant le principal medium. Guillaume Loizeaud, le directeur de Batimat (Reed Exposition), décrypte cette tendance : "C'est un grand changement, les assistants personnels viennent s'insérer dans différents marchés et cas d'usages, habitat, véhicule…". Alain Kergoat, président d'Urban Practices, qui se rend au CES chaque année, renchérit : "Cela avait démarré en 2017 avec Amazon Alexa. En 2018, il y a avait eu la réaction de Google. Mais en 2019, c'est l'invasion de la voix, avec une bataille marketing entre géants mondiaux. Même si Microsoft et Facebook sont moins présents et que Apple ne participe jamais à ce salon". Quelques startups, notamment françaises, sont également actives dans ce segment des assistants. "Il y a une accélération de cette tendance, avec un enjeu industriel et commercial pour s'imposer, à coups de centaines de millions de dollars pour la maîtrise de l'écosystème le plus large possible", poursuit-il. Les interfaces vocales devraient dominer le marché, plus simples à utiliser que des interfaces tactiles sur des écrans (smartphones, tablettes, interphones…). Pour preuve, l'industriel Legrand a présenté sur le salon un interrupteur connecté capable de relayer Amazon Echo, Google Home ou Apple Siri.

 

 

Obéir à la voix et à l'oeil

 

"Les Gafam et les géants de l'électronique grand public comme Toshiba, LG ou Samsung sont bien présents sur le marché de l'habitat. Les téléviseurs de dernière génération sont pilotés à la voix eux aussi et intègrent la 'Home experience' pour piloter une installation domotique", assure Guillaume Loizeaud. Selon son partenaire d'Urban Practices, "les Gafam s'intéressent à la maison depuis des années. Un jour, ça marchera. Il y a un processus financier et marketing de convergence entre différents univers, et celui qui maîtrisera l'expérience utilisateur s'imposera auprès des usagers". Quel acteur sera capable de fédérer tous les autres au sein d'un même écosystème ? La question reste posée. Mais, pour les deux analystes du CES 2019, "c'est la fin des systèmes fermés et étanches, il y a un enjeu de compatibilité et de fluidité". L'habitat serait ainsi de plus en plus connecté et permettrait aux clients d'exploiter un plus large éventail de services.

 

Deuxième grande tendance, celle de la mobilité durable qui serait en passe de damer le pion à la smart-city. Guillaume Loizeaud reprend : "La voiture autonome n'est plus de la science-fiction. C'est pour bientôt, dans les 3 à 5 qui viennent, elles seront déployées sur les routes". Pour lui, les temps de trajets, incompressibles, deviendront du temps libre, une fois que les conducteurs seront déchargés de l'attention nécessaire au contrôle du véhicule. Une révolution de la circulation qui impactera même la segmentation des marchés, puisque la voiture deviendra l'extension de la maison et permettra d'y consommer de la culture, des loisirs ou de l'information. La frontière s'estompera entre un habitat intelligent d'un côté, un bureau hi-tec de l'autre et l'offre de mobilité autonome entre les deux, comme un trait d'union. Alain Kergoat confirme : "La Smart city disposait de son hall mais l'offre présentée était disparate. C'est dans le hall Mobilité que s'exprime le mieux le lien avec la ville intelligente, notamment au travers des questions de recharge électrique. Une coopération se mettre en place entre véhicule et bâtiment, au-delà du seul parking". Pour lui, ce marché émergent, encore chaotique au niveau des technologies n'est pas encore uniformisé mais des initiatives comme l'Automotive Grade Linux pourraient permettre d'éviter des systèmes propriétaires.

 

 

L'arrivée de la 5G, génération suivante de téléphonie très haut débit, constituera un autre maillon d'une chaîne importante des services connectés. Le président d'Urban Practices détaille : "Les infrastructures ont été présentées, fibres optiques et téléphones 5G arrivent, ouvrant de nouvelles perspectives en téléphonie mobile qui pourraient mettre à mal des réseaux comme Sigfox ou LoRa". L'émergence de l'intelligence artificielle aura également d'importantes conséquences. "C'est une grande tendance qui relève le défi d'analyse des comportements humains pour mieux les restituer sous forme de services enrichis". Les spécialistes envisagent des applications dans le marché de l'hôtellerie, avec des grooms digitaux capables d'apprendre les habitudes des clients récurrents, ou dans le marché du maintien à domicile et des EHPAD afin d'identifier la survenue d'accidents domestiques chez des seniors. La santé sera en effet une préoccupation importante qui constituera un marché à forte valeur ajoutée.

 

Les deux rapporteurs signalent toutefois que des thématiques étaient absentes du salon américain. "Le grand sujet européen de la protection des données privées n'était clairement pas un sujet au CES", note Guillaume Loizeaud. De même, le développement durable n'était pas très bien représenté à Las Vegas. "Les rares solutions green tech sont de vraies ruptures mais peu de stands étaient positionnés sur ce segment, principalement des Français et des Israéliens. Les Etats-Unis ne sont pas en pointe…", fait-il valoir. La protection des ressources en eau et en matériaux, ainsi que la sécurité des biens et des personnes (détection de fuites ou de polluants) font partie des quelques solutions présentées sur le salon.

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