"La charpente métallique a été commandée aux Italiens de Cimolai, le bardage inox aux Turcs d'Okyanus… Mais le coût initial, sous-évalué à 440 M€ est presque doublé pour atteindre les 950 M€, en incluant trois ans de retard", poursuit le second chef de projet. "Nous avions beaucoup d'incertitudes techniques sur la durée de vie de l'ouvrage de 100 ans, mais nous n'avons pas fait de compromis avec la sécurité et la prévention des risques", estime-t-il. C'est Nicolas Caille qui reprend les rênes en 2012. Il rappelle la méthode de construction employée pour concrétiser le projet : "L'arche devait être construite en cinq ans. La structure de tubes a été construite à Venise et acheminée par bateaux puis camions pour être assemblée ici, sur place. Elle a été montée en deux temps, avec trois opérations de levage à chaque fois. Les deux demi-arches ont été assemblées à l'été 2015, puis ont eu lieu les installations de systèmes de démantèlement et de sécurité incendie". Les deux ponts roulants américains, d'une capacité de 100 tonnes, sont installés à 85 mètres de haut ; ils serviront à manipuler à distance les éléments de béton du sarcophage. "Il reste exactement un an de travail pour sceller l'arche aux structures existantes, poser les membranes d'étanchéité et assurer le 'commissionning', c'est-à-dire le test de tous les systèmes", anticipe l'actuel chef de projet. La ventilation, par exemple, devra assurer le contrôle hygrométrique d'un million de mètres cubes afin de garantir un air sec dans l'enceinte, tout en maintenant l'ensemble de la structure en dépression pour éviter toute fuite.
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L'équipement de confinement et de démantèlement sera transféré aux autorités ukrainiennes à la fin de 2017. Le vice-président de la BERD précise qu'elles devront assurer les coûts de son fonctionnement. A l'heure actuelle, la banque est le premier financeur de toute l'opération, avec 488 M€ versés, juste devant le Conseil de l'Europe (410 M€). Isabelle Dumont, l'ambassadrice de France à Kiev, rappelle que la France a largement contribué à son succès : "A hauteur de 178 M€, voire 250 M€ si l'on tient compte des engagements multilatéraux". Elle résume : "C'est là toute la beauté du projet : le travail de la communauté internationale pour assurer la sécurité du continent européen". De son côté, Hans Blix, ex-dirigeant de l'Agence internationale de l'énergie atomique et président du Shelter fund, compare la construction de l'arche "à un processus de guérison au long cours" où l'on viendrait "recoudre une plaie nucléaire béante". Reste que la question essentielle n'est pas encore résolue : une fois que l'arche sera opérationnelle, que se passera-t-il ? Car les opérations de démantèlement du sarcophage de béton et de tri, puis de stockage des déchets radioactifs ne sont pas financées, ni même attribuées. Le président ukrainien Petro Porochenko assure qu'elles débuteront en 2018, mais rien n'est encore arrêté.