HABITAT COLLECTIF. Pour mieux s'intégrer dans une dent creuse du 18e arrondissement, un immeuble de logement s'est déguisé en construction haussmannienne. Son secret ? Des panneaux composites où est imprimée une photographie de façade typiquement parisienne. Thomas Corbasson, l'architecte, nous raconte l'histoire de ce projet.
"A l'origine de tout projet, il y a cette question contextuelle de rapport à l'environnement et à l'existant", déclare Thomas Corbasson, du studio Chartier-Corbasson Architectes. Pour évoquer l'immeuble de la rue Championnet (18e arrondissement de Paris), il relate : "C'est un client privé, un médecin, qui est venu nous démarcher, à la suite d'une exposition au pavillon de l'Arsenal. Il avait hérité d'un terrain et nous a mis en concurrence avec un autre cabinet d'architecte. C'est une démarche originale !". Dans les faits, le terrain est une "dent creuse" au plan trapézoïdal de 190 m² de surface, situé entre des immeubles d'habitation de la fin du 19e siècle. "C'était un peu complexe de dégager des vues", avoue le maître d'œuvre.
"Mais nous avions déjà rencontré ce cas de figure à Amiens, sur un autre projet. Le plan, pas évident, imposait de s'articuler par rapport aux cours existantes. La volumétrie a donc été travaillée de façon à offrir les appartements les plus spacieux possible", poursuit l'architecte. L'immeuble ménage donc des vides en réponse à ces cours pour créer ces vues, et les circulations verticales sont concentrées dans un espace minimum. "L'escalier n'est pas monumental mais c'est un escalier en colimaçon à claire-voie qui est situé entre le mur mitoyen en pierres, qui a été décapé, et une façade de blocs de verre, qui apporte de la clarté naturelle vers les paliers", dévoile Thomas Corbasson.
Découvrez l'immeuble de la rue Championnet en images dans les pages suivantes.
Rue Championnet : totalement intégré dans son environnement
Les appartements ont des distributions optimisées : "Ils offrent de grands séjours traversant, afin d'apporter de la lumière au sud (côté cour) et des vues au nord (côté rue)". Pour gagner en volume, cette façade sur la rue Championnet se déforme et se gonfle de façon discrète. Et elle se pare de panneaux Trespa qui lui permettent de s'intégrer à son environnement : ceux-ci sont recouverts d'une photographie en léger relief qui représente un immeuble haussmannien voisin. Le cabinet d'architectes précise : "L'impression sur Trespa consiste en la création d'un relief en creux qui reproduit une trame de 27 mm, type impression de journal, à même de reproduire l'impression photographique de la façade souhaitée". Thomas Corbasson ajoute : "Mais ce n'est pas un pastiche de Haussmann". La construction s'inscrit dans la continuité de l'alignement à perte de vue de la rue.
Rue Championnet : des clins d'oeil aux immeubles parisiens
Réinterprétation contemporaine de ce type d'immeuble, il intègre un clin d'œil dans le hall, qui se réfère aux constructions parisiennes par un traitement bicolore : "Il y a une face et un sol foncés, tandis que l'autre mur et le plafond sont clairs". A l'extérieur, volets et trumeaux sont traités de manière uniforme, tandis que les garde-corps sont traités en vitrage clair et que les menuiseries en aluminium anodisé adoptent un ton naturel. Le rez-de-chaussée est, pour sa part, caractérisé par une alternance de panneaux vitrés translucides et de panneaux Trespa pleins, de couleur anthracite, traités anti-graffiti. Les portes des locaux (garage à vélo, local poubelles) adoptent cette même teinte foncée et sont en métal laqué.
Rue Championnet : un chantier motivant pour ses intervenants
Concernant le chantier, le maître d'œuvre explique : "Nous avons travaillé avec l'entreprise générale ACR d'Aulnay-sous-Bois, et nous n'avons pas eu de gros soucis. Ca a été un vrai plaisir que de travailler avec les différents intervenants, fournisseurs et sous-traitants. Cela s'est bien passé avec tout le monde, ce projet était très motivant". Quant aux performances du bâtiment, Thomas Corbasson annonce que ses performances dépassent les exigences de la réglementation thermique, ce qui a permis d'obtenir un bonus de surface à construire. Et même si les finitions sont loin d'être basiques, le budget de 2,1 M€ hors taxe correspond à une construction de logements sociaux. Le secret ? Pour l'architecte, il s'agit de l'implication de tous les acteurs, y compris industriels, à l'image du fournisseur de quincailleries qui a développé une solution sur mesure afin d'intégrer discrètement les vis dans le motif de la façade.
Rue Championnet : la fiche technique
à lire aussi
Plan masse :
Rue Championnet : un salon, une double exposition
Les appartements, clairs et spacieux, disposent de salons traversant avec vue côté rue et source de lumière naturelle, côté cour.
Rue Championnet : le duplex en R+6/7
Le dernier étage bénéficie d'un bel appartement duplex avec mezzanine et vue sur les toits de la capitale.
Rue Championnet : claire-voie et clarté pour l'escalier
Les circulations verticales sont réunies dans un espace délimité par un mur mitoyen de pierre et une façade de blocs de verre qui apporte de la lumière naturelle aux paliers.
Rue Championnet : le hall d'entrée bicolore
Le hall d'entrée est traité en deux tons, foncé pour un mur et le sol, clair pour l'autre mur et le plafond.
Rue Championnet : une façade en trompe l'oeil
La façade de l'immeuble reproduit celle des autres constructions de la rue, afin de s'inscrire dans leur perspective, avec balcons filants et modénatures caractéristiques.
Rue Championnet : les toits de Paris
Le duplex du dernier étage, aux toitures fortement inclinées, reprend lui aussi l'allure des immeubles haussmanniens environnants. En y ajoutant des espaces extérieurs.
Localisation : rue Championnet, 18e arrondissement (Paris)
Client : privé
Architecte : Chartier-Corbasson Architectes
Bureau d'études : FACEA
Emprise : 190 m²
Surface : 932 m² SHON
Entreprise générale : ACR
Fournisseurs : ROB Louage & Wisselinck (quincaillerie, ferrures, rails) ; Trespa (revêtement de façade) ; Cifbois (usinage des panneaux) ; Technal (menuiseries extérieures) ; Bohle (garde-corps) ; Graniti Fiandre (carrelages) ; Kone (ascenseurs)
Calendrier : livraison en 2016
Budget : 2,1 M€ HT