INTERVIEW. A la tête de la Fédération régionale des travaux publics d'Ile-de-France, José Ramos, tire la sonnette d'alarme sur les risques de report qui pèsent sur le Grand Paris Express.
Batiactu : Pour la première fois depuis le lancement du Grand Paris en 2010, les acteurs du projet, -les équipes de la Société du Grand Paris (SGP), les collectivités- s'inquiètent sérieusement du ralentissement du calendrier des constructions des 68 gares. Partagez-vous le même sentiment ?
José Ramos : Depuis l'été dernier, nous entendons d'insistantes rumeurs de ralentissement du calendrier de réalisation du futur Grand Paris Express (GPE) ou encore de la remise en cause d'une partie de la ligne 16 (au sud de Clichy-Montfermeil), d'un autre tronçon de la ligne 17 et enfin du prolongement de la 14 jusqu'à l'aéroport d'Orly.
Le Gouvernement n'a effectué aucun arbitrage, ce que nous regrettons sincèrement à la Fédération régionale des travaux publics. Car les prochains appels d'offres pour lancer les chantiers de l'est (ligne 16), attendent un feu vert qui ne vient toujours pas ! Nous espérons que la décision ne sera pas prise au-delà de la mi-décembre 2017. Un arbitrage pris par l'Etat au-lendemain des fêtes serait dramatique pour le planning du projet.
Une conférence des territoires "spécial Grand Paris" était annoncée pour octobre. Elle a ensuite été repoussée au 14 décembre 2017 et nous n'avons toujours pas reçu le carton d'invitation. Un arbitrage qui tarde à être pris peut laisser penser que la question sera tranchée au plus haut sommet de l'Etat.
José Ramos : Depuis l'été dernier, nous entendons d'insistantes rumeurs de ralentissement du calendrier de réalisation du futur Grand Paris Express (GPE) ou encore de la remise en cause d'une partie de la ligne 16 (au sud de Clichy-Montfermeil), d'un autre tronçon de la ligne 17 et enfin du prolongement de la 14 jusqu'à l'aéroport d'Orly.
Le Gouvernement n'a effectué aucun arbitrage, ce que nous regrettons sincèrement à la Fédération régionale des travaux publics. Car les prochains appels d'offres pour lancer les chantiers de l'est (ligne 16), attendent un feu vert qui ne vient toujours pas ! Nous espérons que la décision ne sera pas prise au-delà de la mi-décembre 2017. Un arbitrage pris par l'Etat au-lendemain des fêtes serait dramatique pour le planning du projet.
Une conférence des territoires "spécial Grand Paris" était annoncée pour octobre. Elle a ensuite été repoussée au 14 décembre 2017 et nous n'avons toujours pas reçu le carton d'invitation. Un arbitrage qui tarde à être pris peut laisser penser que la question sera tranchée au plus haut sommet de l'Etat.
à lire aussi
"Nous sommes conscients qu'il y aura forcément un ripage du calendrier"
Au final, nous sommes toujours au regret d'avoir moins de visibilité pour les entreprises de TP franciliennes qui ont engagé des frais. C'est intenable pour elles. Rappelons que pour chaque projet de gare, une entreprise de TP dépense, en moyenne, trois millions d'euros incluant notamment les frais d'études, pour des marchés de génie civil évalués à près d'un milliard d'euros. Nous sommes conscients qu'il y aura forcément un ripage du calendrier, mais il ne faudrait pas que le Gouvernement bloque les appels d'offres des marchés en cours d'attribution ou qu'il répartisse les lots. Les derniers propos du chef de l'Etat, prononcés le 13 novembre 2017, sur le projet de la ligne 16 du GPE, au cours de sa visite à Clichy-Montfermeil (Seine-Saint-Denis) nous, ont par exemple, inquiétés.
Batiactu : En quoi le Grand Paris est-il un enjeu majeur pour la région Ile-de-France ?
José Ramos : Avec le Grand Paris, nous sommes en mesure de programmer, en concertation avec les donneurs d'ordre et les investisseurs, près de trente ans d'aménagement en Ile-de-France. En revanche, comme je vous l'ai précisé, nous avons surtout besoin d'une stabilité des crédits de paiement pour pouvoir avancer. Nous ne pouvons pas vivre que d'imagination, une loi de programmation est nécessaire. Certes, les impératifs des Jeux olympiques en 2024, la Coupe du monde de rugby en 2023 et pourquoi pas l'Exposition universelle sur le plateau de Saclay en 2025 sont autant d'événements moteurs. A ces sérieuses rumeurs sur les ralentissements de projets, s'ajouterait aussi la suppression de la ligne 18, celle qui doit desservir le plateau de Saclay. Elle représente près de 20% de la recherche française. Si on arrête la ligne 18 à Saint-Aubin (Essonne), on pourrait se retrouver dans une voie sans issue !
"A l'horizon 2022, nos entreprises ont calculé qu'elles ont besoin de 5.000 à 12.000 salariés en plus, tous métiers confondus"
Batiactu : Craignez-vous aussi une pénurie de main d'œuvre qualifiée ?
José Ramos :
Le démarrage des premiers chantiers redonne une nouvelle dynamique aux Travaux Publics en Ile-de-France. C'est inédit, depuis la réalisation des lignes RER dans les années 1970. Et nous constatons bien une mise sous tension des métiers du BTP. Je citerai notamment les cadres de travaux, les chefs de chantier ou encore les topographes. En anticipant les décisions de l'arbitrage gouvernemental, nos entreprises ont calculé qu'elles ont besoin de 5.000 à 12.000 salariés en plus, tous métiers confondus, à l'horizon 2022.
Par ailleurs, je suis confiant dans la capacité des entreprises ou des groupements d'entreprises adjudicataires des marchés sous maîtrise d'ouvrage de la Société du Grand Paris à développer des synergies avec les entreprises locales. Je précise que la SGP comme la profession, ont validé le barème de 20% des prestataires des différents marchés réservés aux PME, lorsque la règlementation prévoit 10%. Grâce au Grand Paris, la formation va pouvoir aussi être relancée dans nos entreprises.
Batiactu : Quel regard portez-vous sur le travail détaché ?
José Ramos :
Vu le montant des marchés, la consultation sera nécessairement européenne, nous sommes forcément attentifs. Même si nous préférons avoir de l'embauche locale, le principe du détachement sur un chantier est une réponse possible. Il n'est pas interdit d'embaucher un travailleur détaché. Il faudra espérer que le maître d'ouvrage applique à l'ensemble des intervenants la charte régionale de bonnes pratiques pour la réalisation des infrastructures en Ile-de-France et qu'il reste attentif aux retombées économiques locales. Je rappelle enfin que nos entreprises sont responsables et qu'elles ont plaidé pour se doter de la carte d'identification du BTP.
Batiactu : La clause Molière pourrait être rendue illégale en France d'ici à la fin de l'année, qu'en pensez-vous ?
José Ramos :
Dans la profession des TP, on a un avis partagé. Clause ou pas, il faut a minima avoir un langage commun et un code. Au-delà de pictogrammes, il est nécessaire de se comprendre par la langue.
"RER A : Félicitons les entreprises car elles ont réagi très vite après l'incident"
à lire aussi
Batiactu : Enfin, quelques semaines après l'incident de forage survenu sur le chantier Eole de la porte Maillot (Paris) ayant inondé le RER A, quel est votre analyse ?
José Ramos :
Je tiens surtout à féliciter les entreprises (NDLR : Bouygues Travaux Publics, DTP Terrassement, Eiffage Travaux Publics, Eiffage TP Fondation, Razel Bec, Sefi Intrafor), pour leur réactivité. Félicitons-les car elles ont réagi très vite après l'incident. Nous travaillons sur des sols qui bougent, nous devons gérer les imprévus !