L'Association des entreprises pour la réduction de l'effet de serre (AERES) a agréé les engagements des cimentiers français Lafarge, Holcim France et Vicat. Membres de l'association, ces derniers seront pénalisés financièrement en cas de non respect de l'accord.

Le hasard fait bien les choses. Ce mercredi 19 février connaît à la fois l'ouverture de la 20ème session plénière du Groupe d'Experts Intergouvernemental sur l'évolution du climat, l'agrément par l'AERES des engagements de trois cimentiers français et la promotion par Jacques Chirac d'une " économie responsable " en terme écologique devant un parterre de grands patrons, dont ceux de Lafarge ou Saint-Gobain.

Cette association, qui compte 23 membres fondateurs, dont les trois cimentiers, le chimiste Rhodia, mais aussi TotalFinaElf ou Ciment Calcia, a été créée le 17 octobre dernier. Son conseil d'administration compte de droit le Medef, l'Association française des Entreprises privées (AFEP-AGREF) et les Entreprises pour l'environnement (EPE). Elle est présidée par Yves-René Nanot, par ailleurs président de Ciments Français.

Selon l'article trois de ses statuts, l'association a pour vocation d'être " le support de la gestion des engagements volontaires de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre (GES) établis sur la base de l'engagement-cadre ".

Elle s'inscrit " dans un processus expérimental en vue de préparer la mise en œuvre des dispositifs communautaires européens relatifs à la maîtrise des émissions de GES ". Aussi, elle inscrit son action dans le cadre de l'application du Protocole de Kyoto et de la réduction de l'effet de serre.

Dans un communiqué, Lafarge indique que cet engagement doit le conduire à diminuer ses émissions nettes de CO2 e 30,8% en France en 2010 par rapport à 1990, soit de 6.420 Kt/an à 4.440 Kt/an. " Cet engagement contribuera à la lutte contre le changement climatique conformément au protocole de Kyoto, sur la période 1990 à 2010 ", a précisé le groupe.

Sanctions financières

Les " engagements individuels établis respectivement par les sociétés cimentières Holcim (France), Lafarge Ciments et Vicat pour la réduction de leurs émissions de GES aux échéances 2004 et 2007 dans la perspective 2010 " est un début prometteur.

D'autant plus que l'AERES, dont l'un des objectifs est de " coordonner et de valider les prochains engagements quantifiés de maîtrise " des émissions de GES de chaque adhérent, est habilité à leur infliger des sanctions en cas de non-respect de leurs engagements.

" Les recettes nettes liées à l'application des sanctions sont affectées, sur un compte séparé, au financement d'actions collectives concernant la lutte contre le changement climatique ", indiquent les statuts de l'AERES.

Industrie très polluante, le secteur du ciment tente depuis quelque temps de redorer son blason. Le 13 novembre 2001, Denis Kessler avait déclaré, au cours du forum " En avant l'entreprise, en avant la France " que "le développement durable peut être vu comme une contrainte nouvelle, mais c'est pour les entrepreneurs un nouveau défi, un nouveau challenge, une occasion pour faire gagner les valeurs de l'entreprise ".

Meilleures performances

Lafarge Ciment et Holcim sont également membres du World Business Council for Sustainable Development, comme huit autres cimentiers. Ce consortium de 160 entreprises internationales, originaires de plus de 30 pays et de 20 secteurs industriels avait commandé un rapport auprès du Battelle Memorial Institute sur la question du " développement durable et de l'industrie du ciment ".

Ce rapport, remis en mai dernier, met en évidence " le fait que la communauté financière a de plus en plus tendance à considérer que les entreprises gérées dans une perspective de développement durable réalisent de meilleures performances sur bon nombre de critères ".

Parmi eux, l'étude souligne une réduction des coûts, due à l'accroissement de l'efficacité opérationnelle et de la productivité, un accroissement des profits grâce à la différenciation des produits et à une meilleure acceptation du marché, ou encore une réduction du capital investi.

De fait, le rapport de Battelle ne se voulait pas naïf. Et c'est sans doute que qui lui a permis d'avoir un impact important sur la communauté industrielle. Parmi ses observations, il indique qu' " il n'est pas réaliste de penser que les entreprises de ciment accepteront de subir des coûts importants (ou seront capables de les subir) au nom du développement durable, à moins qu'une véritable logique d'entreprise, apportant une rentabilité économique, ne les y incite ".

La mise en avant de cette rentabilité économique, ainsi que la mise en place d'un groupe de plusieurs industriels, a joué dans le bon sens pour faire émerger une culture du développement durable au sein des entreprises polluantes. Sans doute aussi la perspective de l'épée de Damoclès du " pollueur payeur ".

La démarche environnementale de l'industrie cimentière a été formalisée dans la charte environnement de 1995. En 2001, cette industrie avait consacré 8% de son chiffre d'affaires aux investissements industriels, dont 25% à 30% en faveur de l'environnement.

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