Le ministre de l'Equipement a indiqué mardi 8 octobre les orientations de l'assouplissement que devrait connaître la loi SRU. Malgré son caractère politique, l'essentiel de cette loi devrait être conservé en raison de sa haute technicité.

Lorsque la loi fut votée, le 13 décembre 2001, les interrogations et les craintes ont suivies rapidement. Le texte devait sans doute manquer de clarté. Progressivement, les esprits se sont apaisés. Mais ce ne fut que de courte durée. Aussitôt les élections présidentielles et législatives passées, les grands acteurs de la construction, sociale ou non, se sont rappelés au bon souvenir du gouvernement Raffarin. L'automne a été placé sous le signe de la saturation foncière et le fameux article 55 de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbains), relatif aux 20% de logement social obligatoire dans chaque commune, a catalysé les enjeux.

Aujourd'hui, Gilles de Robien, ministre de l'Equipement, des Transports et du Logement, indique que le gouvernement est en train de préparer des mesures d'assouplissement pour certaines dispositions de la loi SRU afin d'augmenter l'offre de foncier en France.
" Trois mesures de la loi SRU bloquent le foncier ", a-t-il indiqué devant l'Assemblée Nationale, " La première mesure à débloquer est celle de la règle des 15 km ". Cette annonce fit suite à l'interpellation du député (UMP) des Hauts-de-Seine Patrick Ollier. " La loi SRU impose une distance de 15 km par rapport à la ville-centre pour autoriser la construction dans les petites communes tant qu'elles n'ont pas fait voter les schémas de cohérence territoriale. Là aussi le risque d'opposer le monde rural au monde urbain est grand ", avait-il dit. Sur ce point, le ministre s'est exprimé en faveur d'un assouplissement du système : " Nous allons la débloquer pour que des terrains qui n'étaient plus constructibles le redeviennent ". Malheureusement, le ministre ne s'est pas étendu sur ce problème, et les moyens à mettre en œuvre restent inconnus.

Le deuxième point abordé à l'Assemblée Nationale par M. Ollier a été le problème de l'élaboration des plans locaux d'urbanisme (PLU) : " L'élaboration des plans locaux d'urbanisme, longue et complexe, bloque l'application des plans d'occupation des sols. Comble ! La loi SRU a supprimé la mise en œuvre des coefficients d'occupations des sols; il s'ensuit un risque de développement anarchique de l'habitat contre la volonté des conseillers municipaux ". A cela, le ministre a annoncé que " la période transitoire entre les POS et les PLU sera prolongée, en attendant, nous autoriserons une révision exceptionnelle des POS pour favoriser la constructibilité ".
Une transition avait déjà été accordée sur ce point en mai dernier. Ainsi pouvait-on lire dans la réponse ministérielle à la question écrite n°37.892 de Jean-Léonce Dupont, publiée en page 1.304 du JO Sénat du 2 mai 2002 : " Les modifications ou les révisions des anciens POS ou des PLU qui visent à ouvrir à l'urbanisation une zone qui ne l'était pas, qu'il s'agisse de projets en cours ou de procédures nouvelles, peuvent jusqu'au 1er juillet [2002, ndlr], être approuvées par la commune sans qu'il soit besoin de demander l'accord du préfet ou de l'établissement public chargé d'élaborer le schéma de cohérence territoriale " (SCOT). Plus loin dans le même texte, on pouvait lire : " La date d'entrée en vigueur de cet article n'est pas une date butoir avant laquelle les périmètres des SCOT devraient être arrêtés. Si les communes et les communautés estiment devoir prendre plus de temps pour déterminer ces périmètres, elles en ont totalement les moyens ". La réaction du gouvernement face aux questions du parlementaire n'est donc pas une nouveauté, et il semble bien qu'à force de prolongement de période de transition il en vienne à supprimer définitivement les principes de cette loi.


A la charge du citoyen

Dernier point de l'intervention du ministre suite à l'intervention de M. Ollier, les modalités de financement de la voirie et des réseaux.. Gilles de Robien a à cette occasion clarifié la position du gouvernement sur ce point : " En milieu rural, les maires n'osent plus accorder de permis de construire de crainte d'avoir à financer les réseaux et la voirie. Nous allons mettre clairement ce coût à la charge du propriétaire ".
De fait, avant l'intervention de la loi SRU, seul le coût des réseaux d'eau et d'électricité pouvait être mis à la charge, en tout ou en partie, d'un constructeur. C'est pourquoi le problème de l'aménagement de la voie n'était jamais posé lors de la délivrance du permis de construire. Ces aménagements, qui devaient inéluctablement être réalisés ultérieurement, devaient être entièrement financés par la commune. Mais avec la loi SRU, la situation a changé, comme l'indique une nouvelle fois la réponse ministérielle du 2 mai 2002. Elle explique ainsi que " désormais la commune peut mettre à la charge des propriétaires riverains le financement des équipements rendant constructibles les terrains à condition d'approuver, avant la délivrance du permis de construire, le projet d'aménagement de la voie et des réseaux. " Et plus loin dans le texte : " Outre la possibilité d'obtenir un préfinancement des propriétaires avant même qu'ils construisent, rien dans le nouveau dispositif législatif n'impose à la commune d'avoir réalisé l'ensemble des travaux prévus avant de délivrer le permis de construire ". Aussi semble-t-il que le seul problème, sur ce point, relève de la communication en direction des maires.

Les hasards de l'actualité donnent aussi, peut-être à tort, un autre éclairage sur la gestion du dossier SRU. En effet, il y a quelques semaines, le gouvernement annonçait une nouvelle augmentation du prix du tabac. En apparence, rien à voir avec le logement ou l'urbanisme. L'augmentation, prévue pour janvier est spectaculaire, de l'ordre de 15%, ce qui est du jamais vu. Officiellement, l'objectif est de porter un coup dur à la tabagie chez les jeunes, officieusement, on parle de la dette de la France et de la nécessité d'équilibre budgétaire. Mais une proposition de loi, daté du 3 août dernier multiplie encore les interprétations. Présentée par Denis Badré, sénateur (groupe Union Centriste) des Hauts-de-Seine (Ile-de-France), elle propose d'assouplir l'article 55 de la loi SRU, article obligeant les communes à se doter de logements sociaux à hauteur de 20% de leur parc foncier d'habitat, sous peine d'amende. Cette article fit grand bruit, et fut l'objet de débat dans ces dernières semaines encore. Assouplir cet article, pour le sénateur, revenait à diminuer le nombre d'amendes aux communes. Mais comme ce dispositif aurait été un manque à gagner pour l'Etat, il a rédigé ainsi l'article 8 de sa proposition de loi : " Les pertes de recettes résultant de la présente proposition de loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle au droit de consommation sur les tabacs visé à l'article 575A du code général des impôts ".
Quoiqu'il en soit, et malgré l'apparente confusion des propositions faites, l'intervention de Gilles de Robien du 8 octobre montre combien le gouvernement souhaite effectivement résoudre les problèmes que cette loi pose. Loi politique, mais surtout très technique, elle ne peut être modifiée dans son fond, comme l'article 55, les règles de l'urbanisme ne pouvant suivre une actualité chaotique, et qui transcende complètement le simple clivage droite/gauche, comme l'atteste l'attachement que montre Jean-Louis Borloo à cette loi.

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