Le groupe familial suisse, spécialiste de la chimie de la construction, ne souhaite pas passer sous le contrôle de Saint-Gobain. La transaction, qui ne concerne qu'une partie du capital, estimée à 2,3 milliards d'euros, permettrait cependant au géant français de disposer d'une majorité des droits de vote de Sika. Explications.
Le groupe de matériaux de construction Saint-Gobain vient d'abattre son jeu : il compte prendre le contrôle du suisse Sika, spécialisé dans la chimie de la construction. "Le projet consiste en l'acquisition, pour environ 2,3 milliards d'euros, de la holding Schenker Winkler qui détient 16,1 % du capital et 52,4 % des droits de vote", précise le géant français dans un communiqué. Une manœuvre qu'il souhaitait boucler rapidement, au plus tard au second semestre de 2015, sans avoir à passer par une offre publique d'achat qui aurait été bien plus chère (près de 7 Mrds € suivant la capitalisation boursière) : "Saint-Gobain n'a pas l'intention de procéder à une offre sur la totalité du capital de Sika", annonce bien le groupe. Mais le conseil d'administration de l'entreprise helvète ne l'entend pas de cette oreille. Informé vendredi 5 décembre au soir, il a répondu par un bref communiqué qu'il ne soutenait pas ce rapprochement qui bouleverserait fondamentalement la structure de la société et ne serait pas bénéfique à son activité.
Pierre-André de Chalendar, président-directeur général de Saint-Gobain, s'est déclaré "surpris" du rejet de cette offre, assurant lors d'une conférence téléphonique, qu'il s'agissait d'un "revirement" survenu au cours du week-end. Cependant, le dirigeant a assuré que cette prise de position ne modifiait pas ses intentions. "Il s'agit d'un mouvement majeur pour la mise en œuvre de la stratégie et du renforcement de notre groupe", a-t-il indiqué. "Après acquisition, le groupe Saint-Gobain pourra consolider Sika par intégration globale dans ses comptes avec un impact positif sur le résultat net dès la première année", explique le groupe français. Car Sika est une entreprise qui dégage d'importants bénéfices : elle a réalisé, en 2013, un chiffre d'affaires de 4,3 Mrds € et a connu une croissance moyenne de 8 % par an depuis 2007.
Divergence de point de vue sur les synergies
"Sika est le leader mondial de la chimie de la construction et le numéro deux mondial des adhésifs et joints pour ses applications industrielles. Son offre repose sur une expertise technologique forte sur l'étanchéité, l'insonorisation, le collage et le scellement, la protection et le renforcement des structures. Compte tenu de la proximité des activités de Sika avec les métiers de Saint-Gobain, tant dans les 'Produits pour la construction' que les 'Matériaux innovants' ou la 'Distribution bâtiment', l'opération devrait générer un montant de synergies de 100 M€ dès la deuxième année (2017), augmenté à 180 M€/an à compter de 2019", soutient Saint-Gobain qui assure que l'opération sera créatrice de valeur à partir de la quatrième année. Un avis que ne partage pas le directoire de Sika qui ne voit pas de logique industrielle dans la transaction, ni de synergie significative. Reste que le rapprochement demeure soumis à une validation des autorités de la concurrence.Financer l'opération par la cession de Verallia
Parallèlement, pour financer cette acquisition, Saint-Gobain a annoncé le lancement d'un processus concurrentiel de mise en vente de Verallia, l'entité spécialisée dans les emballages verriers, une activité qui emploie 10.000 personnes dans 13 pays, et qui a généré un chiffre d'affaires de 2,43 Mrds €. "Cette annonce est la suite logique de la cession des activités nord-américaines finalisée en avril 2014", précise le groupe français. L'objectif est désormais de trouver un acheteur afin de valider la reprise avec les instances représentatives du personnel avant l'été 2015. "Les deux opérations dont nous annonçons le projet vont accélérer le recentrage stratégique du groupe Saint-Gobain sur la conception, la production et la distribution des solutions innovantes et de haute performance pour l'habitat et l'industrie", commente Pierre-André de Chalendar. "Elles répondent aux objectifs énoncés en novembre 2013 : augmentation du potentiel de croissance et réduction de l'intensité capitalistique de nos activités, accroissement de notre présence en pays émergents et aux Etats-Unis, extension de notre gamme de produits différenciés, appuyés sur des marques fortes". Des caractéristiques propres à Sika qui affiche un fort développement dans les pays émergents, où la société réalise désormais 38 % de ses ventes.Ce lundi soir, Sika réagissait. Le président du conseil d'administration du groupe suisse Sika (spécialités chimiques) cherche des solutions alternatives à la prise de contrôle par le groupe français Saint-Gobain, a-t-il déclaré lundi à l'AFP. "Nous avons 6 mois, le temps que les autorités de la concurrence statuent sur cette transaction, pour trouver d'autres solutions", a déclaré Paul Hälg, qui entend démissionner, comme tous ses collègues, si l'opération aboutit.
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