DIAPORAMA. A 56 ans, l'architecte japonais Shigeru Ban vient de se voir attribuer le prestigieux prix Pritzker, récompense convoitée dans le secteur de l'architecture. Il a notamment été distingué pour ses ouvrages élégants et inventifs, mais aussi pour son engagement humanitaire. Portrait.
L'architecte japonais Shigeru Ban a la victoire modeste. Ayant lui-même fait partie du jury du prix Pritzker entre 2006-2009, il fait une confession lors de l'annonce de son nom : "Je ne pense pas avoir encore atteint ce niveau pour le moment (…) Si c'est un grand honneur pour moi, je dois être prudent. Je dois continuer à écouter les gens avec lesquels je collabore, que ce soit pour mes commandes privées ou dans mon travail pour les victimes de désastres".
Né en 1957 à Tokyo, l'architecte a toujours été fasciné par la construction. Tout petit, il observait les charpentiers qui œuvraient sur le chantier de sa maison de famille. D'ailleurs, enfant, il voulait devenir menuisier. Passionné par le travail du bois dont il apprécie tout particulièrement l'odeur et le toucher, il n'hésite pas à réaliser des maquettes à partir de chutes. Mais à l'âge de 11 ans, après avoir imaginé une maison pour un travail de classe, c'est la révélation : il sera architecte.
Un architecte engagé
Après avoir obtenu son diplôme à New York aux Etats-Unis dans les années 80, l'architecte s'oriente rapidement vers l'humanitaire. En 1994, il conçoit des maisons en carton pour des réfugiés rwandais, victimes du conflit qui sévit dans le pays. Un engagement qui l'amène à devenir consultant pour les Nations unies. Un an plus tard, après le tremblement de terre de Kobe au Japon, il récidive et propose des constructions en bois et papier pour les plus démunis, et réalise notamment une église. C'est d'ailleurs ce dévouement que la Fondation Hyatt, qui finance et décerne le prix Pritzker, a tenu à valoriser : "Il a voyagé pendant 20 ans sur les lieux de catastrophes, naturelles ou humaines, pour travailler avec des citoyens, des bénévoles, des étudiants, afin de dessiner et construire des abris recyclables, à bas coûts, qui redonnent de la dignité" aux victimes. "Un exemple pour tous", selon la Fondation.
Une architecture durable
Porteur d'une architecture durable, le Japonais utilise des matériaux comme le bambou, la fibre de papier recyclé, le tissu… "Quand je me suis dirigé dans cette direction, il y a 30 ans, personne ne parlait d'environnement. Mais pour moi, c'était naturel. Je me suis toujours préoccupé des questions de coûts, du travail local et des matériaux réutilisables", raconte-t-il. Résidences privées, sièges sociaux, musées, salles de concert et équipements publics… Pour chacune de ses réalisations, Shigeru Ban a souhaité apporter son originalité, son sens de l'économie et son ingéniosité.
Le 13 juin prochain, à Amsterdam, l'architecte du centre Pompidou Metz (en collaboration avec Jean De Gastines) et de la future cité musicale sur l'île Seguin, recevra officiellement le prix Pritzker 2014, considéré comme le Nobel de l'architecture. Il sera ainsi le septième Japonais à recevoir ce titre prestigieux, après Toyo Ito l'année dernière, le duo Sejima-Nishizawa de l'agence Sanaa en 2010, Tadao Ando en 1995, Fumihiko Maki en 1993 et Kenzo Tange en 1987.
Le prix Prtizker, fondé en 1979 par Jay A. Pritzker et son épouse, vise à honorer, chaque année, un architecte vivant dont le travail démontre une combinaison de talent, vision et engagement, qui a aussi produit de constantes et significatives réalisations à vocation humanitaire et environnementale. Le lauréat reçoit la somme de 100.000 dollars et une médaille de bronze.
Découvrez quelques projets de l'architecte en pages suivantes...
"Il a une façon de travailler très efficace et rigoureuse. Il valorise une idée simple avec une grande réflexion, prenant par la suite beaucoup de temps pour dessiner les détails. Il respecte toujours son point de départ, faisant preuve d'un acharnement qu'on pourrait qualifier d'artisanal. Au final, cette idée simple paraît couler de source. Lors de mon passage dans son agence, j'ai vraiment apprécié son approche de l'architecture, peut-être moins intellectuelle que celle que l'on peut trouver en France. D'ailleurs avec mon partenaire, Marc-Antoine Maillard, qui a également travaillé dans une de ses agences, nous avons conservé cette noblesse de rendre l'idée simple, riche et forte. Aujourd'hui encore, on se donne la contrainte (de départ) comme principe et ligne directrice dans nos projets".