BUDGET 2025. Quelques heures après l'adoption définitive du projet de loi de finances par le Parlement, et face aux réactions et inquiétudes des auto-entrepreneurs, le ministre de l'Économie Éric Lombard a annoncé la suspension de l'abaissement du seuil d'exemption de TVA le temps de mener une concertation avec les acteurs concernés.

[Mise à jour le 6 février 2025, à 21h10]

 

Le Gouvernement fait (déjà) machine arrière. L'abaissement du seuil d'exemption de TVA figurant dans le projet de loi de finances, définitivement adopté ce 6 février 2025, a été suspendu le soir même. Le ministre de l'Économie, Éric Lombard, l'a annoncé sur le plateau du 20 Heures de France 2.

"C'était une demande des artisans pour maintenir plus d'égalité entre eux et les auto-entrepreneurs"
, a-t-il rappelé. Mais, assurant avoir "entendu les demandes des auto-entrepreneurs", il a indiqué le lancement d'une "concertation, afin d'ajuster cette mesure si c'est nécessaire. Durant le temps de cette concertation, la mesure sera suspendue. Nous aurons le temps du dialogue".

 

La mesure n'avait pas manqué de faire réagir les représentants des micro-entreprises et des auto-entrepreneurs. Car elle prévoyait d'abaisser le seuil d'exemption de TVA à 25.000 euros de chiffre d'affaires annuel, contre 85.000 euros pour les activités commerciales et d'hébergement et 37.500 euros pour celles de prestation de services ainsi que les libérales. Avec donc un impact direct sur nombre de ces entreprises.

 

Une mesure avancée au nom de la simplification

 

Cette mesure avait été intégrée dans le projet de loi au nom de la simplification. "[L]es seuils très élevés génèrent des distorsions de concurrence importantes au sein du segment des petites et moyennes entreprises, entre celles qui y recourent et celles qui n'y recourent pas, avait ainsi expliqué Laurent Saint-Martin, chargé du Budget et des Comptes publics sous le gouvernement Barnier, d'après des propos rapportés par Public Sénat. Il apparaît opportun de simplifier et de rationaliser le dispositif de franchise en base en matière de TVA en instaurant un seuil unique de franchise fixé à 25.000 euros."

 

Le Bâtiment avait exprimé sa satisfaction

 

"La mise en place d'un seuil unique de franchise de TVA à 25.000 euros, qui permet de renouer avec la vocation initiale des micro-entreprises, à savoir celle d'un tremplin vers une activité pérenne et un statut protégeant mieux le chef d'entreprise", s'était félicité la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) avant la suspension de la mesure. "Néanmoins, cela ne doit pas faire oublier la nécessité de faire baisser globalement la pression fiscale sur le coût du travail dans l'ensemble des entreprises en refondant le modèle de financement de la protection sociale de notre pays."

 

Même son de cloche du côté de la Fédération française du bâtiment (FFB) : "La limitation de la franchise de TVA accordée aux microentrepreneurs concoure à rétablir un minimum d'équilibre concurrentiel à l'égard des artisans. Le retour à un niveau plus raisonnable de franchise doit permettre au régime de renouer avec sa vocation initiale : un marchepied vers l'entreprise, et non pas un régime qui encourage durablement la concurrence déloyale." Un point de vue que ces organisations professionnelles ne manqueront pas de rappeler au cours de la concertation à venir.

 

Dans un communiqué de presse publié le 5 février 2025, l'Union des entreprises de proximité (U2P) reconnaissait bien "que cette mesure [était] de nature à simplifier les seuils nationaux de TVA et surtout à limiter les distorsions de concurrence, en France et en Europe, entre entreprises qui exercent une même activité". Elle regrettait cependant le manque de consultation et demandait au gouvernement de porter une "attention particulière" à certaines professions lors de la mise en œuvre de la mesure.

 

250.000 auto-entrepreneurs concernés

 

Plus virulente, la Fédération nationale des auto-entrepreneurs (FNAE) dénonçait "une complexification majeure pour tous ceux qui vont passer à la TVA". Elle soulignait également un risque d'accélération de la fraude "par sous-déclaration du chiffre d'affaires" et "une perte du pouvoir d'achat des Français qui vont se retrouver avec des prix augmentés de 20%".

 

"La douche est froide pour 250.000 auto-entrepreneurs", a ainsi déclaré son président Grégoire Leclercq sur ses réseaux sociaux, qui fustige une attaque "frontale", mettant en péril "des centaines de milliers de petites entreprises".

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