THERMIQUE. Les acteurs de la construction réunis en Conseil se sont déclarés favorables dans leur majorité à la prolongation de la dérogation à la RT2012 qui concerne les bâtiments collectifs neufs. Mais préfèrerait que l'État ne procède pas à des "paramétrages techniques complexes difficilement appréhendables" dans le cadre de la future réglementation environnementale 2020.
Il semble de plus en plus probable que la réglementation thermique 2012 ne sera jamais appliquée, à proprement parler, telle qu'elle avait été imaginée. En effet, la fameuse dérogation sur les bâtiments collectifs, reconduite années après années, devrait toujours être réalité en 2020, dans l'attente de l'entrée en vigueur de la prochaine réglementation environnementale 2020. Le Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE), qui réunit les acteurs de la filière construction, s'est en effet déclaré favorable à la prolongation de cette dérogation. Pour rappel, elle autorise "une consommation moyenne des bâtiments collectifs nouveaux et parties nouvelles de bâtiment collectif de 57,5 kWh/m² par an contre 50 kWh/m² par an".
Pas un "recul" de la filière
En cette période de vives discussions, voire polémiques, sur les contours de la future réglementation environnementale 2020 - une pétition les critiquant a récolté 1.401 signatures - le CSCEE assure qu'il ne s'agit pas là d'un "message de recul de la filière", précise un communiqué de presse daté du 7 décembre 2019. Les acteurs parlent plutôt de "pragmatisme". En effet, il faudrait permettre à la filière de se focaliser sur l'arrivée de la RE2020, introduisant notamment l'analyse du cycle de vie (ACV), plutôt que de lui imposer une nouvelle contrainte dans l'immédiat, qui imposerait aux acteurs "des travaux d'adaptation sur des permis de construire qui doivent être déposés dans les prochaines semaines". Le défi de la RE2020 est qualifié de "transition colossale" par le CSCEE. Qui rappelle en outre que les niveaux E1 et E2 de l'expérimentation E+C-, qui préfigure la RE2020, "s'appuient sur la modulation autorisée de 57,5 kWh/m² par an". C'est d'ailleurs l'une des critiques formulées à l'encontre du futur texte réglementaire : le fait de ne pas être assez exigeant sur la partie énergétique, au profit du carbone. Mais c'est le sens de nombreuses annonces gouvernementales récentes : la priorité semble de plus en plus clairement mise sur la décarbonation, avec comme colonne vertébrale la stratégie nationale bas carbone 2050.
Le CSCEE estime que la prolongation de cette dérogation peut se justifier par le fait que le secteur a considérablement progressé en matière d'efficacité des bâtiments neufs. "Les émissions de CO2 de l'ensemble du parc résidentiel comme tertiaire sont stables depuis 1990 alors que le nombre de logements entre 1986 et en 2016 a augmenté de plus de 40%", assure l'instance.
Le CSCEE invite l'État à ne pas toucher au coefficient d'énergie primaire de l'électricité
Dans son communiqué de presse, le CSCEE prend également position sur les récents débats autour de la probable modification du coefficient de conversion de l'électricité, qui devrait passer de 2,58 à 2,3. L'instance, sans prendre de position radicale, invite ainsi les pouvoirs publics à se focaliser sur le niveau des seuils qui seront choisis en énergie et en carbone, en fonction des prévisions en matière de "réchauffement climatique", plutôt que de procéder à des "paramétrages techniques complexes difficilement appréhendables (coefficient de conversion énergie primaire vs. finale, facteur d'émission de l'électricité...". Une prise de position pourrait être prise plus clairement par le CSCEE dans le cadre de la concertation annoncée pour le printemps prochain. "Les décisions ne doivent pas se faire dans la précipitation au risque de manquer les objectifs d'une réglementation ambitieuse et soutenable à la fois techniquement et économiquement", avertit l'instance.