ÉCONOMIE. La situation en matière de délais de paiement reste préoccupante pour le secteur de la construction, d'après le dernier rapport de l'observatoire des délais de paiement. Détails.
L'effet ciseaux continue de jouer à plein dans le secteur de la construction, d'après le dernier rapport de l'observatoire des délais de paiement, rendu public le 8 avril 2019 par le ministère de l'Économie. En effet, depuis 2002, le délai de paiement clients est passé de 67,1 jours de chiffre d'affaires à 63,9 (soit une baisse de 4,8%) en 2017. Le délai fournisseurs suite la même tendance, mais avec un dynamisme tout autre : 73,6 en 2002, et 57,1 en 2017, (-22,4%). Les délais clients diminuant beaucoup moins vite que les délais fournisseurs, le solde commercial s'agrandit ces dernières années pour les entreprises de construction (22,6 jours de CA en 2002, 27 jours en 2017). En d'autres termes, les entreprises de construction font de plus en plus la banque.
Fragiliser des entreprises en phase de reprise
Le secteur du bâtiment est impacté d'une part par le fait que de nombreux de ses clients sont particuliers, d'autres étant des collectivités locales ne respectant pas toutes le délai de paiement légal. Il fait pourtant partie des deux secteurs ayant fait le plus d'effort pour réduire les délais de paiement fournisseurs, avec l'industrie manufacturière. La Fédération française du bâtiment (FFB) fait bien sûr part de son inquiétude. "Après avoir contribué à la dégradation des trésoreries dans le bâtiment pendant la lourde crise qu'a traversé le secteur entre 2008 et 2015, l'écart à nouveau très défavorable entre délais de règlements clients et fournisseurs ne peut que fragiliser des entreprises en phase de reprise, qui doivent financer l'achat de matériaux et de services pour un volume d'activité plus important", peut-on lire dans le rapport.
La Capeb, pour sa part, fait état d'une situation plus contrastée. Elle remarque tout d'abord que ses délais clients sont au plus bas, à 19 jours fin 2018. Mais insiste sur les difficultés que peuvent rencontrer, ponctuellement, des artisans. "Les clients particuliers sont de plus en plus nombreux à demander l'étalement de leurs paiements. Les cas où les entreprises patientent jusqu'à 10 mois pour obtenir le règlement complet de leur facture ne sont pas rares", précise ainsi le rapport. Quant aux grands donneurs d'ordres privés, même souci pour être payé, dans les délais contractuels. Les TPE sont également réticentes à réclamer des indemnisations des retards de paiement de crainte de perdre des clients.
"Moins d'une entreprise sur deux est payée en temps et en heure"
En matière de retards de paiement enregistrés dans la construction, "moins d'une entreprise sur deux est payée en temps et en heure", précise le rapport. Et les dépassements observés sont significatifs et récurrents. L'observatoire fait état de plusieurs causes, à commencer par le fait que des débiteurs peuvent eux-mêmes souffrir de retards de paiement de leurs clients, et répercuter ces difficultés. Autre possibilité : les abus autour de la retenue de garantie (notamment une retenue dépassant le seuil des 5% du montant du marché). Quoi qu'il en soit, au troisième trimestre 2018, d'après une étude Altarès, le retard de paiement moyen dans la construction était de 9,1 jours (la moyenne générale se situant à 10,9 jours).
Les collectivités locales progressent peu
D'après le rapport 2019 de l'observatoire des délais de paiement, les collectivités locales semblent au mieux stagner dans leur pratiques de paiement. Le délais global de paiement des régions passe ainsi, entre 2017 et 2018, de 31,9 à 33,1 jours ; les départements se maintiennent à 23 jours ; et les communes baissent légèrement de 20,6 à 20 jours - tout comme les offices publics de l'habitat, de 27,3 à 26,9 jours).
D'après le rapport 2019 de l'observatoire des délais de paiement, les collectivités locales semblent au mieux stagner dans leur pratiques de paiement. Le délais global de paiement des régions passe ainsi, entre 2017 et 2018, de 31,9 à 33,1 jours ; les départements se maintiennent à 23 jours ; et les communes baissent légèrement de 20,6 à 20 jours - tout comme les offices publics de l'habitat, de 27,3 à 26,9 jours).
La Fédération nationale des travaux publics (FNTP) fait d'ailleurs état d'une préoccupation majeure sur le sujet des retards de paiement, dans un contexte d'inflation des coûts de +3%. "Des cas très concrets de retards de paiement allant de trois à six mois sont régulièrement relayés à la fédération tant en marchés publics qu'en marchés privés", assure le rapport. "Par ailleurs, les opérateurs du secteur sont confrontés à des procédures de vérification des demandes de paiement, mensuelles ou définitives, parfois complexes qui ont pour effet de retarder le point de départ de la comptabilisation des délais de paiement. Or, tous ces comportements menacent la santé financière notamment des petites et moyennes entreprises des travaux publics."
Les grandes entreprises gardent la main sur les délais de paiement
D'après le rapport 2019 de l'observatoire des délais de paiement, les grandes entreprises "voient leur solde commercial se réduire d'un peu plus d'une journée et tomber sous les 4 jours de chiffre d'affaires en 2017". "Elles ont certes consenti des efforts pour améliorer leurs conditions de règlement auprès de leurs fournisseurs (-2,3 jours entre 2016 et 2017), mais pour un nombre de jours de règlement fournisseurs encore au-delà de 60 jours, et elles ont bénéficié dans le même temps de règlements plus rapides de leurs clients (- 2,6 jours)." Les ETI, à l'inverse, sont "le plus important financeur de crédit inter-entreprises", avec un solde commercial de 12,6 jours de CA en 2017.