"Ceinture exubérante" pour Perrault, "façade floue" pour Poitevin et Reynaud, "résille structurelle continue" pour Nicolas Michelin, ou "lames espacées" pour Bernard Tschumi", l'île Seguin attendra septembre pour découvrir sa "façade-enveloppe".

Les quatre projets architecturaux dévoilés lundi par le sénateur maire de Boulogne-Billancourt Jean-Pierre Fourcade ont pour ambition première de garder "une unité" -tout du moins de façade- au site mythique des usines Renault. Leur présentation constitue le dernier avatar d'un feuilleton urbanistique à rebondissements, depuis la fermeture du paquebot ouvrier en 1992. Comment aménager cette île de 11,5 ha, située sur la Seine entre Boulogne-Billancourt et Meudon'

En 1999, le projet déjà remanié de l'architecte Bruno Fortier -avec petits îlots, espaces verts et chemins piétonniers- avait bien reçu la faveur du syndicat mixte du Val-de-Seine, avant de capoter brutalement 2 mois plus tard. L'architecte Jean Nouvel était monté au créneau pour dénoncer, dans un article intitulé "Boulogne assassine Billancourt", la disparition du "krak des ouvriers, ce vaisseau de pierre aussi beau que le Krak des Chevaliers" (Syrie). Il fallait sauver la mémoire ouvrière, symbolisée par le mur-rempart de l'île, haut de 11 mètres. La CGT s'était mise de la partie. Reste que le mur en question, assez fragile, ne pouvait rester en l'état. D'où un nouveau concours.

Plus de 50 architectes se sont mis sur les rangs. Et sur les douze sélectionnés par le jury, quatre équipes ont été retenues, associant architectes et artistes: ARM architecture/Mathieu Poitevin-Patrick Reynaud (avec Stéphane Maupin et Jérôme Sans), Nicolas Michelin (avec Yann Kop, Bertrand Segers et Antonio Gallego), Dominique Perrault (avec Daniel Buren), Bernard Tschumi (avec Michel Crespin). Le choix du lauréat sera connu en septembre.
Ainsi, la "façade-enveloppe" enveloppera l'île entière, à l'exception du terrain réservé à la Fondation d'art contemporain Pinault (architecte: Tadao Ando) qui doit ouvrir en 2007, sur 32.000 m2, dans la pointe aval de l'île.

Dominique Perrault, estimant que "cette ceinture doit avoir un aspect exubérant", pense que "le côté extravagant pourrait être obtenu en se servant du mur de 11m (en maille spirale inox tissée) comme d'un tremplin à une série de jeux d'eau qui animeraient ainsi tout l'extérieur".

L'équipe Mathieu Poitevin-Patrick Reynaud, envisage une double promenade, en haut et en bas de la façade, structurée par une série de cellules de 2,20m par 4,40m, ayant pour matériaux des portiques métalliques, une peau légère constituée de lames et un garde corps en verre.

Nicolas Michelin imagine "une résille structurelle continue, légère et immatérielle, constituée de câbles en tension en acier inox et de barres de compression en acier, en bois en verre, pour une promenade continue".

Bernard Tschumi conçoit, pour sa part, un "ouvrage discontinu, constitué d'une série de L.A.M.E.S (Lieux Aléatoires Multiples et Singuliers), perçue comme une série de verticales, avec une structure de lames en acier et une enveloppe constituée de matériaux très légers et résistants".

A un journaliste qui lui demandait s'il n'y avait pas "une imposture" à présenter un ouvrage dont la mémoire ouvrière semblait singulièrement absente, M. Fourcade a répondu qu'on ne pouvait "ni tout garder ni tout raser" et qu'un lieu de mémoire des usines Renault serait édifié sur l'île.

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