Le projet Jupiter 1000 verra le jour sur le Grand Port Maritime de Marseille à Fos-sur-Mer. Il s'agit d'un démonstrateur de taille industrielle de la technologie "Power to Gas", qui permet de transformer l'électricité, produite par des sources renouvelables, en hydrogène qui peut être stocké ou injecté au réseau de distribution. Il pourra même être combiné à du gaz carbonique pour produire du méthane de synthèse. Entrée en service prévue en 2018.
Deux ans après les annonces d'Arnaud Montebourg sur la constitution d'une filière industrielle de l'hydrogène en France, la concrétisation est longue à venir. Mais le premier démonstrateur de taille industrielle relié au réseau de transport de gaz français, nommé "Jupiter 1000", pourrait venir changer la donne… en 2018. GRTgaz et le Grand Port Maritime de Marseille ont en effet annoncé, ce mercredi 30 mars 2016, la future installation du système "Power to Gas" - qui convertit l'électricité en gaz - dans la zone industrielle de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône). "Ce projet unique en France permettra d'étudier la validité technico-économique du procédé et de faire émerger une nouvelle filière de production de gaz renouvelable à l'horizon de 2030", annoncent les partenaires(*) de l'initiative.
Réduire les importations de gaz naturel
Le procédé consiste à transformer les excédents d'électricité d'origine renouvelable (solaire photovoltaïque ou éolien) en gaz qui, lui, peut être stocké dans des cuves ou injecté sur le réseau de transport. Ce gaz est produit par hydrolyse de l'eau, qui sépare les atomes d'oxygène de ceux d'hydrogène. Ce dernier peut être directement mélangé au gaz naturel, à hauteur de 5 à 20 %. Mais, en allant plus loin, il est également possible de le combiner avec du gaz carbonique (CO2) afin d'obtenir du méthane (CH4) de synthèse. Ce procédé, la "méthanation", est une piste prometteuse qui permettrait de valoriser le dioxyde de carbone. D'autant que, comme le souligne GRTgaz, le réseau de gaz français existe déjà, ne nécessite aucun investissement supplémentaire afin de l'adapter - contrairement au réseau électrique, non dimensionné pour accueillir un surplus d'électricité non carbonée - et qu'il est donc prêt à accueillir le surplus d'énergie envisagé. "Le Power to Gas favorise le développement des énergies renouvelables en facilitant l'équilibrage des réseaux électriques", résument les porteurs du projet. Une solution qui aurait l'ultime avantage d'améliorer la balance commerciale en évitant l'importation de gaz naturel.
Stocker les surplus d'électricité pour se passer de centrales
GRTgaz estime que le surplus de production électrique lié au photovoltaïque et à l'éolien pourrait atteindre les 50 TWh en 2050, "soit l'équivalent de la production annuelle de plusieurs centrales nucléaires". Une production qui devra être stockée pour être utilisée au moment opportun. Afin d'y parvenir, le gestionnaire du réseau de gaz estime qu'une centaine d'installation de 10 MW (soit dix fois celle de Jupiter 1000) pourraient être opérationnelles sur le territoire français en 2030 pour convertir 3 TWh, avant d'atteindre le chiffre impressionnant de 1.000 installations en 2050, pour 20 TWh de production.
Alors qu'une vingtaine de démonstrateurs fonctionnent déjà en Europe, et notamment en Allemagne, toujours en pointe dans la transition énergétique, le projet Jupiter 1000 d'une puissance de 1 MWe sera le premier de cette puissance dans l'Hexagone. Quelques systèmes Power to Gas plus modestes sont déjà en fonctionnement, mais leur production d'hydrogène alimente une pile à combustible. Le CO2 qui sera valorisé par méthanation sera, quant à lui, prélevé sur les fumées d'un site industriel voisin. Le budget du projet s'élève à 30 M€, dont près des deux-tiers ont été apportés par les partenaires industriels, tandis que le reste l'a été par l'Union européenne (Feder), l'Etat (Programme des investissements d'avenir piloté par l'Ademe) et la région PACA.
(*) Atmostat, CNR, CEA, GRTgaz, Grand Port Maritime de Marseille, Leroux & Lotz Technologies, McPhy Energy et TIGF