Après s'être un peu égarée au 20ème siècle, la couleur fait depuis quelque temps son grand retour sur les façades d'immeubles. Désormais, les villes osent et donnent carte blanche aux architectes qui proposent des projets audacieux où les touches colorées viennent égayer les ambiances urbaines. Découvrez quelques projets multicolores.
«Si les goûts et les couleurs ne se discutent pas», l'architecture prend partie non pas pour une, mais pour toutes les couleurs. Effectivement, depuis quelques années, les paysages urbains s'intensifient d'immeubles rouges, de crèches roses et jaunes, de médiathèques multicolores ou encore de HLM bleus.
Si, au début du 20ème siècle, l'absence de couleur est la marque de la bourgeoisie conservatrice, les lignes ont bougé depuis, notamment grâce à la reprise économique et la reconstruction d'après-guerre. La couleur s'est imposée au fur et à mesure des décennies comme un gage de progrès. Rattachée à l'esthétique, elle se pose comme un véritable critère de distinction pour certains bâtiments. Elle peut même parfois participer à la fonction de l'établissement comme, par exemple, pour les crèches, les centres de loisirs pour enfants, les entreprises et les structures de santé.
Des hôpitaux, des logements
Ainsi, l'hôpital de Bailleul dans la Sarthe (72) alterne rose, blanc, jaune, bleu, vert et crée une atmosphère sensorielle apaisante. On peut également observer des patios fuschia et citron qui «jouent comme une signalétique, ménageant un parcours de lieux successifs identifiés par la couleur», une manière d'afficher la «lisibilité du projet», explique Jean-Philippe Pargade, architecte de la structure, avant de préciser que «la couleur donne un côté optimiste au bâtiment».
Mais cette tendance ne se limite pas aux espaces publics, le logement aussi affiche de nouvelles couleurs. En effet, les villes sont de plus en plus nombreuses à donner le feu vert à des projets sociaux colorés montrant ainsi leur attachement aux questions d'urbanisme et à la valorisation des habitants.
La couleur liée aux évolutions technologiques
Mais ce qui a fait avancer l'utilisation de la couleur au 21ème siècle, ce sont la recherche et le développement autour des nouveaux matériaux. Le verre teinté, les sols imprimés grâce aux techniques numériques, le plastique coloré… Tout a été élaboré de manière à faire converger la couleur et la matière. Et désormais, l'harmonie des tons semblent bien implantée dans le paysage urbain. Et si les industriels et les architectes continuent de travailler ensemble leur matière grise, les villes devraient bientôt voir la vie en rose !
«Il est important d'harmoniser les couleurs», Marie-Pierre Servantie, architecte coloriste
Marie-Pierre Servantie s'intéresse depuis de nombreuses années à l'architecture, l'urbanisme et la couleur. Cette architecte coloriste bordelaise défend l'harmonie des couleurs dans les villes. Interview.
Batiactu : Comment expliquez-vous le regain de la couleur dans l'architecture ces dernières années ?
Marie-Pierre Servantie : On a connu un siècle de non-couleur. En effet, les différentes guerres ont cassé la couleur et, au moment de la reconstruction sociale, il y a eu un rejet. Toutefois, les années 60-70 ont joué autour des bruns, marrons, orangé mais là encore, il y a eu rejet. Les architectes ont alors privilégié des tons «pierre» puis on a vu apparaître l'architecture fonctionnaliste, propre et blanche où les volumes et les ombres tenaient une grande importance. Dans les années 80 - 2000, on a enchaîné avec la mode du béton brut, de l'acier et du verre. Ces différentes tendances ont créé un manque, on ne pouvait pas continuer à vivre dans un monde sans couleur. Aujourd'hui, les architectes l'appliquent par touche, que ce soit sur un volume, une entrée, un porche. Toutefois, à partir de deux ou trois couleurs, il faut savoir harmoniser. La couleur est un atout en architecture, mais il ne faut pas se tromper.
Marie-Pierre Servantie : On a connu un siècle de non-couleur. En effet, les différentes guerres ont cassé la couleur et, au moment de la reconstruction sociale, il y a eu un rejet. Toutefois, les années 60-70 ont joué autour des bruns, marrons, orangé mais là encore, il y a eu rejet. Les architectes ont alors privilégié des tons «pierre» puis on a vu apparaître l'architecture fonctionnaliste, propre et blanche où les volumes et les ombres tenaient une grande importance. Dans les années 80 - 2000, on a enchaîné avec la mode du béton brut, de l'acier et du verre. Ces différentes tendances ont créé un manque, on ne pouvait pas continuer à vivre dans un monde sans couleur. Aujourd'hui, les architectes l'appliquent par touche, que ce soit sur un volume, une entrée, un porche. Toutefois, à partir de deux ou trois couleurs, il faut savoir harmoniser. La couleur est un atout en architecture, mais il ne faut pas se tromper.
Batiactu : Qu'apporte la couleur à un bâtiment ?
M.-P. S. : Dans les bâtiments publics, elle permet de créer une identité, une notion de repérage et d'esthétique. La lumière, l'objet et l'œil forment les trois éléments essentiels pour voir une couleur. Par la suite, c'est le cerveau qui l'interprète. Si la couleur influe sur le comportement humain, on peut l'utiliser partout à condition de gérer son intensité notamment en fonction des lieux. Il faut également penser à des zones de repos avec des tons plus sobres. Ainsi, des hôpitaux, des crèches utilisent des couleurs mais les niveaux d'intensité ne sont pas les mêmes, tout dépend des fonctionnalités des pièces. L'objectif est de parvenir à trouver une harmonie que ce soit pour les visiteurs ou le personnel. Concernant les logements, la couleur témoigne de l'intérêt qu'on porte aux occupants des lieux. Pour les pouvoir publics, sortir du blanc et du gris, c'est une manière de montrer leur considération, de montrer qu'on fait une action pour ses habitants.
Batiactu : Comment les industriels travaillent-ils avec les architectes sur les questions de couleurs ?
M.-P. S. : Moquettes, carrelages et revêtements sont passés à la couleur. Les industriels ont compris et proposent des gammes. Ainsi, on trouve du plexiglas, du verre, de l'aluminium coloré. Des matières qui vivent par elles-mêmes sans intervention de peinture. On sent que les industriels ont envie de faire bien.
Batiactu : Comment les bâtiments colorés vieillissent-ils ?
M.-P. S. : Tout dépend des matériaux, s'ils sont pérennes ou non. L'orientation et l'implantation des bâtiments par rapport au soleil, entre autres, comptent également.
Batiactu : Qu'en est-il du phénomène de lassitude de ce genre de construction ?
M-P S : Pour les bâtiments publics, c'est un risque. Quand on ose ce genre de construction, forcément c'est un impact fort et volontaire. Mais dans ce cas, la couleur fait partie intégrante de l'identité du bâtiment. C'est lui, il est là et il est comme ça et on l'a accepté.
Logements roses
La couleur s'immisce partout même dans le logement. A Paris, dans le 12ème arrondissement, on trouve des logements avec des touches colorées rose bonbon. Et les habitants semblent apprécier : "Si au départ, j'ai été surprise, j'ai tout de suite adhéré. Je me suis rapidement appropriée les lieux et aujourd'hui je n'y prête plus attention. C'est mon logement et c'est tout", confie une des locataires.
Façades vertes
Des logements avec des façades vertes à Paris.
La médiathèque Marguerite Yourcenar
La médiathèque Marguerite Yourcenar a ouvert ses portes le 14 février 2008 dans le 15è arrondissement de Paris. Une façade en double-peau y abrite des espaces-plateaux aménageables, propices à de multiples configurations. A l'origine de cette construction, l'agence d'architecture Babel.
Le musée de la mode et du design
Baptisé Plug over, le musée de la mode et du design de Paris prend des allures de serpent vert.
Laboratoires Genzyme
La nouvelle unité de Genzyme, située à Lyon et réalisée par le cabinet Patriarche & Co, a été inaugurée début décembre. La façade de cette entreprise est multicolore.
Centre de Loisirs à saint-Cloud
Un lego arc-en-ciel s'est récemment posé à Saint-Cloud. Centre sportif et de loisirs pour enfants, cette structure fait la part belle aux espaces et à la fluidité. Le cabinet Koz Architectes, membre de PLAN01, a fait le pari audacieux de la couleur. Et preuve que le concept semble fonctionner, les enfants ont déjà baptisé cet accès «la rivière jaune», du fait de sa couleur. Pour Christophe Ouhayoun, un des architectes du projet, «c'est une belle appropriation du lieu !».
La maison de la petite enfance à Epinay/Sénart (91)
La maison de la petite enfance à Epinay/Sénart (91), est l'oeuvre de [BP] Architectures (Jean Bocabeille / Ignacio Prego), membre de PLAN01. Petit éloge de la douceur et de la couleur !
Hôpital multicolore
Un hôpital multicolore posé au milieu d'une prairie dans la Sarthe (72), l'idée peut paraître incongrue pourtant le projet de l'architecte Jean-Philippe Pargade est bien réel.
Résidence Emile Counord, Cité du grand parc à Bordeaux (FR).
Résidence Emile Counord, Cité du grand parc à Bordeaux (FR).
Ce travail de requalification de l'image architecturale se définit comme de "l'urbanisme chromatique" ou du "paysagisme".
Sociéte nationale immobilière,1997
Chromo-architecte: MP Servantie
Ce travail de requalification de l'image architecturale se définit comme de "l'urbanisme chromatique" ou du "paysagisme".
Sociéte nationale immobilière,1997
Chromo-architecte: MP Servantie
mise en couleur: MP SERVANTIE Chromo-Architecte dplg
Collège Pablo Neruda à Bègles
Collège Pablo Neruda à Bègles, 33 (FR), 2004
architecte: Francois Guibert
chromo-architecture: MP Servantie
architecte: Francois Guibert
chromo-architecture: MP Servantie
mise en couleur: MP SERVANTIE Chromo-Architecte dplg
CHU de Bordeaux Pellegrin, 2006
CHU de Bordeaux Pellegrin, 2006
Hall d'entrée
architecte: MP Servantie
chromo-architecture: MP Servantie
Hall d'entrée
architecte: MP Servantie
chromo-architecture: MP Servantie
mise en couleur: MP SERVANTIE Chromo-Architecte dplg
Immeuble à Berlin
A l'étranger, la couleur est également tendance. Ici, un immeuble à Berlin en Allemagne jouant avec une façade multicolore.
Chromo-architecture - L'art de construire en couleur de Marie-Pierre Servantie- Editions : Alternatives.