C'est par un communiqué lapidaire que la ministre de l'Ecologie a annoncé le report de l'obligation, prévue en janvier 2015, de mesurer la qualité de l'air intérieur dans les crèches. Ségolène Royal évoque des inquiétudes du côté des maires, tandis que les professionnels sont partagés. Explications et réactions.

Le Dr Suzanne Déoux nous l'avait laissé entendre en mai dernier, à la veille du Colloque Défis du Bâtiment. Au sujet du décret à paraître relatif à l'obligation de surveillance et de mesure de la qualité de l'air intérieur dans certains établissements clos ou ouverts au public au 1er janvier 2015, elle nous confiait : "Je pense à un éventuel report de l'échéance prévue".

 

Elle avait vu juste. Ce mercredi 24 septembre, Ségolène Royal a annoncé, dans un communiqué très court, que l'obligation de mesurer la QAI dans les crèches est repoussée, et remplacée par un guide de bonnes pratiques. C'est notamment en réponse à "l'inquiétude des maires" qu'elle "met en place une décision simple, pragmatique qui concilie qualité de l'air et simplicité des actions".

Contrôle absurde

Ces mesures devaient être réalisées dans des bâtiments occupés, pendant 5 jours, du lundi au vendredi. Elles concernent trois polluants : le formaldéhyde, le benzène et le CO2. "A ce jour, on ne peut constater qu'un faible taux de structures qui ont programmé ces mesures ! Certes, les échéances des municipales ont dû freiner les démarches des collectivités, de même que le coût des mesures qui dépend du nombre de pièces instrumentées -ce qui peut faire vite grimper la facture - mais il y a une prise de conscience indéniable chez les gestionnaires", nous expliquait le Dr Suzanne Déoux. Force est de constater que les collectivités ont eu le dernier mot.

 

Cependant, si des contrôles systématiques sont nécessaires, les professionnels qui défendent la QAI s'accordent à dire que certains d'entre eux sont contre-productifs et absurdes. A l'instar du contrôle de l'ouverture des fenêtres par un organisme accrédité. Une mesure qui avait obtenu le "deuxième prix des normes absurdes", dans le cadre du rapport rendu, en mars 2013, par Alain Lambert et Jean-Claude Boulard sur l'inflation normative. "Il faut pouvoir faire des recommandations techniques en fonction des différents contextes car il n'existe pas de solution unique. Un effort pédagogique est également nécessaire pour rappeler l'importance d'ouvrir les fenêtres lors des pics de pollution intérieurs et ne pas préconiser le contraire à la population", soulignaient, ce mercredi 24 septembre 2014, les intervenants au débat "Préserver la qualité de l'air intérieur : faut-il instaurer un label ?" organisé par Equilibre des énergies.

Faire évoluer la RT

Et Pierre-Louis François, Président d'Uniclima, d'ajouter : "Il serait raisonnable de faire évoluer la réglementation des logements, notamment étanches, avec des débits de renouvellement d'air plus importants, afin de répondre aux enjeux de santé, soulignés par les experts. Nous préconisons une approche progressive et expérimentale en profitant notamment des futurs labels environnementaux".

 

A l'occasion de la présentation du rapport d'étape du groupe de travail RBR 2020 ce jeudi 25 septembre, Philippe Pelletier, président du Plan Bâtiment Durable, a estimé, pour sa part, que le texte n'était pas adapté : "Faire intervenir des professionnels dans les crèches et les écoles afin de s'assurer que des fenêtres sont bien mises en place et qu'elles s'ouvrent, c'était un peu bête". L'avocat - partisan d'un droit "souple" sans obligation ni contrainte - milite pour une politique d'adhésion par l'incitation plutôt que par la coercition.

actionclactionfp