RAPPORTS LOCATIFS. Au lendemain de sa présentation à la presse par son auteur, le député (LREM) Mickaël Nogal, la proposition de loi visant à pacifier les relations entre locataires et bailleurs divise encore.
Après son rapport "Louer en confiance" présenté en juin 2019, qui s'appuyait sur 37 propositions, le député (LREM) de Haute-Garonne Mickaël Nogal est revenu ce mardi avec une proposition de loi orientée autour de trois grandes mesures, qui sera étoffée de quelques décrets. Alors qu'il martèle sa volonté de "réconcilier les locataires et les propriétaires", Mickaël Nogal reçoit à nouveau un accueil mitigé de la part des parties concernées.
Sa proposition de loi, qui sera déposée à la fin du mois avant d'attendre l'avis juridique du Conseil d'Etat, repose sur la consignation du dépôt de garantie auprès d'un administrateur de bien (même dans le cadre d'une location de particulier à particulier), la limitation des dossiers de candidature à un seul garant physique, et la création d'un mandat de gestion avec obligation de résultats, avec la garantie du loyer payé en temps et en heure par l'administrateur de biens, en cas de retard ou d'incident de paiement de la part du locataire.
Vers un regain de "désirabilité" pour les administrateurs de biens ?
La proposition de loi a rebattu les cartes des pour et des contres, à commencer par le secteur des professionnels immobiliers, qui, par la voix de la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) n'a pas caché sa satisfaction, notamment sur la consignation du dépôt de garantie qu'ils auront en charge dans le cadre d'un nouveau mandat de gestion. Avant qu'elle ne soit inscrite dans le marbre de la proposition de loi, cette mesure était d'abord envisagée comme la mise sous séquestre du dépôt de garantie du locataire auprès d'un organisme tiers, vivement critiquée par la profession immobilière.
Pour des raisons de coût et de mise en place, le député toulousain a finalement fait le choix d'élever cette consignation comme un nouveau mandat de gestion, qu'il dit considérer comme un premier pas menant les administrateurs de biens vers le statut de "tiers de confiance", régulièrement réclamé par ces derniers.
"J'y vois la reconnaissance de ce que nous sommes", s'est réjoui Jean-Marc Torrollion, président de la Fnaim, le 15 janvier lors d'une conférence de presse de début d'année, reconnaissant que la profession avait été "bousculée" par le député Mickaël Nogal. Si la Fnaim a émis quelques propositions d'amélioration sur le futur système de cautionnement -appelant à ne pas freiner les cautions familiales, signes de "solidarité" - elle a trouvé un autre point de réjouissance sur le mandat de gestion avec obligation de résultats, qui obligera ses adhérents, s'ils y souscrivent, à verser au propriétaire bailleur le loyer qui lui est dû, à date, en cas de retard ou d'incident de paiement de la part du locataire.
Un point sur lequel l'Union des syndicats de l'immobilier (Unis) avait quelques réserves, craignant qu'un mandat obligatoire ne pénalise les petites structures dont les fonds propres ne permettraient pas d'assurer les risques liés à leur patrimoine en gestion. Et de leur infliger un coût conséquent en termes de tarifs et de primes auprès de leur assureur. Pour l'heure, Mickaël Nogal s'est dit contre l'idée d'un mandat obligatoire, convaincu que l'attractivité de ce nouveau produit ne pourra qu'être incitatif, au vu des nouvelles parts de marché qu'il pourrait engranger. En conférence de presse le 14 janvier, le député n'a pas non plus fermé la porte à une obligation. L'Unis devrait rendre sa position définitive à l'issue de son comité stratégique commun avec la Fnaim, le 21 janvier prochain.
Les propriétaires et locataires attendent la facture
Comme un postulat de sa proposition de loi, Mickaël Nogal s'appuie régulièrement sur les chiffres de la gestion locative intermédiée, qui ne représente aujourd'hui qu'un tiers des locations, largement devancées par les locations de particulier à particulier. Redonner confiance dans le professionnel immobilier pour réconcilier locataires et propriétaires ? Le chemin s'annonce encore complexe, alors que ce "contrat de mariage" est refusé par les deux parties.
En effet, la consignation du dépôt de garantie et le nouveau mandat de gestion avec obligation de résultats laissent les propriétaires et les locataires circonspects, quand ils ne sont pas tout simplement offusqués. C'est plus précisément le cas de l'Union nationale des propriétaires immobiliers (Unpi), qui, par la voix de son président Christophe Demerson, a déploré la "confiscation du dépôt de garantie", moyen détourné visant à "forcer les bailleurs particuliers à faire gérer leurs logements par un administrateurs de bien". Plus tard dans la soirée de mardi, Christophe Demerson appellera "le Premier ministre à faire retirer ce projet de loi".
La question des coûts est également un point d'inquiétude pour les propriétaires comme les locataires. L'Unpi s'interroge sur le coût "inconnu" de l'assurance liée au nouveau mandat de gestion, qui aurait plus de risques d'être répercutée sur le bailleur que le locataire. C'est du moins ce que pense David Rodriguez du CLCV: "il peut y avoir un risque de répercuter le coût de cette assurance sur le loyer, mais l'encadrement des loyers à la relocation prévu par la loi Alur devrait agir comme garde-fou". Il redoute en revanche, "un recours imposé" aux start-up de cautionnement, en guise de garantie supplémentaire aux loyers impayés, par les administrateurs de biens.